(2e partie et fin)
Après quelques heures de marche, ils arrivent chez leur deuxième fille pour passer la nuit. Pris soudain d’un mal de tête, le mari idiot demande à sa femme de la lui ceindre avec un foulard. Ne trouvant rien à porter de main, elle arrache du métier à tisser non terminé, la bande de tissu désiré et ceint la tête de son mari. Se sentant soulagé, l’idiot de mari s’endort à poings fermés.Quand leur deuxième fille se réveille à l’aube, et qu’elle va voir le métier à tisser, et qu’elle le trouve saccagé, elle en fait le reproche à sa mère, pour toute réponse elle lui dit : “C’est le seul tissu que j’ai trouvé pour soulager la tête de ton père enfiévré. Puisque tu me le repeoches, je ne vais pas te laisser goûter à la pâte à beignets que j’ai ramenée, et je ne vais pas rester une minute de plus ici !Courrocés, ils se rendent chez leur troisième fille. Après avoir déjeuné, l’idiot de mari avise un pot de miel, il met un doigt dedans, le trouvant très bon, il enfonce sa main pour en prendre une poignée, la fermant il ne peut plus la retirer. Sa main prisonnière du pot, il s’adresse à son idiote de femme et lui dit :“— Amek ara khed’magh ? (Comment faire ?)Elle lui répond :“Va casser le pot sur cette pierre que tu vois scintiller, mais en guise de pierre c’était la tête du mari de leur fille qu’il s’agit.”De toutes ses forces, l’idiot de mari tape le pot contre la tête du pauvre homme qui somnolait, l’envoyant ainsi dans les vertes prairies.Quand sa femme s’aperçoit du drame, elle se met à pleurer reprochant à son père la mort de son mari.Sa mère offusquée lui dit : “La main de ton père est prisonnière du pot, pour s’en défaire il fallait le briser, j’ai pris la tête chauve de ton mari pour une pierre polie, je n’ai rien à me reprocher !Et puisque tu le prends sur ce ton, tu ne goûteras pas à la pâte à beignets que j’ai ramenée, et je ne resterai pas une minute de plus ici !”L’idiot et l’idiote quittent la demeure de leur troisième fille après avoir marché des lieues, ils commencent à délirer et se mettent tous les deux à crier : “Ad’qarente ! Ad quarente ! (elles vont s’assécher ! Elles vont s’assécher !)”Passant à proximité de paysans en train de planter des figuiers, les entendant augurer leur mauvais présage, ils les prennent à partie. Ils ne doivent leur salut qu’en prenant leurs jambes à leurs cous. Un peu plus loin, ils se mettent à crier.“Ad’Vezgent ! Ad’Vezgent (elles vont se gonfler ! Elles vont se gonfler !)”Ils arrivent dans un village où toute la population est atteinte d’ophtalmie (k’indaou).Les entendant proférer de telles paroles, qu’ils prennent pour des moqueries, les villageois leur courent après pour les tabasser.Après ces préripéties, ils reviennent chez eux. L’idiote a une idée, elle dit à son idiot de mari.“— J’ai de la pâte, je vais préparer des beignets, toi tu vas égorger un mouton, nous allons faire la fête comme de nouveaux mariés.”Les beignets préparés, le mouton égorgé, l’idiote prend les intestins du bélier et en ceint sa tête. Les intestins ne tardent pas à attirer une nuée de mouches, l’idiote demande à son mari de les chasser. Ce dernier est en train de couper du bois avec une hâche bien aiguisée.Dès qu’elle l’appelle, il pose sa hache et se précipite pour chasser les mouches importunes. A la troisième reprise, il oublie de poser sa hache, voulant chasser les mouches, il leur frappe dessus, mais en même temps il frappe sur la tête de son idiote de femme qu’il pourfend.Se rendant compte trop tard de sa bévue, il se met à pleurer sur le corps inerte de sa femme étalé devant lui… “Our kefount eth’houdjay i nou our kefoun ird’en tsemz’ine. As n-elâid’ anetch ak’soum ts h’em’zine ama ng’a thiouanz’iz’ine. » (Mes contes ne se terminent, comme ne se terminent le blé et l’orge. Le jour de l’Aïd, nous mangerons de la viande avec des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).”
Benrejdal Lounèsbenrejdallounes@yahoo.f
