Les APC ont-elles pris les devants ?

Partager

Les intempéries de l’hiver dernier sont encore vivaces dans tous les esprits, avec les blocages de routes par la poudreuse, l’absence de gaz butane dans de nombreuses localités et, beaucoup plus grave encore, les éboulements de terrains qui ont endommagé voire dans certains cas, entièrement détruit, des demeures. 

Cela s’est produit le 18 avril dernier, lorsque les pluies s’étaient abattues sur la région de Taghzout durant plusieurs jours. Des familles avaient été évacuées vers l’école primaire de Chaâbet Brahem en attendant leur relogement. Un relogement qui se fait toujours attendre huit mois plus tard et c’est toujours dans des conditions plus que déplorables que ces familles survivent en l’absence de commodités.     Les pluies sporadiques qui se sont abattues, ces dernières 24 heures, à travers le territoire de la wilaya de Bouira, suffisent amplement pour faire prendre conscience aux autorités locales de l’ampleur des dégâts que généreraient des pluies plus importantes et qui perdureraient dans le temps.  A Bouira, chef-lieu de wilaya, le vieux bâti, datant de l’ère coloniale et composant une partie importante du tissu urbain, est sans aucun doute le plus fragile, surtout lorsque la pluie est accompagnée de rafales de vent. D’ailleurs, en septembre 2007, les intempéries avaient coûté la vie à deux citoyens du fait de l’effondrement d’un mur, dans la cité El Wasfa, à Sour El Ghozlane. Dans la région de M’Chedallah, un mouvement géologique survenu en février 2010, et non des moindres, continue à inquiéter tout un quartier du village Ath Ivrahim, Aârkouv en l’occurrence, composé d’une vingtaine d’habitations et dont les habitants toisent avec effroi le cratère qui se rapproche dangereusement du premier pâté de maisons se trouvant à un jet de pierre. Ces habitations risquent d’être englouties à tout moment, notamment en cette période hivernale. À Bechloul, chef-lieu de daïra, l’un des endroits réputés les plus inondable de la wilaya, la population locale continue de scruter le ciel la peur au ventre. En effet, l’année dernière au mois de septembre, le pire avait été évité de justesse lorsque les eaux de pluie avaient envahi la cité jusqu’à y bloquer toute circulation. La RN5, traversant cette localité s’est transformée, en un laps de temps, en une rivière où la furie des eaux a provoqué une panique sans précédent au sein de la population. Fort heureusement, la durée de ce changement de climat n’a duré que quelques minutes, ce qui avait épargné Bechloul d’une catastrophe semblable à celle de 1998. Pour rappel, cette date demeure gravée dans la mémoire collective. Ce jour-là la furie des eaux avait provoqué des dégâts matériels inestimables. Même un train, de passage au moment fatidique, avait déraillé de sa voie avec à son bord plusieurs voyageurs. Beaucoup de maisons et autres locaux commerciaux avaient été sérieusement touchés. Avec tous ces signes apparents, la demande formulée aux autorités compétentes pour déclarer la commune comme zone sinistrée avait été refusée, ce qui a pénalisé les victimes qui n’avaient pas été indemnisées. Dans la ville de Bouira, à chaque averse, de nombreuses artères et boulevards deviennent rapidement des piscines géantes. L’état des avaloirs, tout de suite obstrués et dépassés par le flux d’eau, ne permet pas une meilleure évacuation. Du coup, l’eau couvre l’asphalte pour déborder carrément sur les trottoirs et va jusqu’à inonder les appartements du rez-de-chaussée. Cela a été le cas en octobre 2008, au niveau de la cité du premier novembre à Draâ El Bordj, où les appartements ont été submergés d’eau à hauteur de plus d’un demi-mètre. Fort heureusement, la flotte n’avait touché que le mobilier et les fortes rafales de vent n’avaient pas suivi. La même intrusion d’eau avait été enregistrée du coté de la cité des 122 logements. Là aussi, les eaux pluviales avaient inondé les appartements du rez-de-chaussée. Hier matin, le boulevard de la zone des Parcs, menant vers le siège de la Conservation des forêts, était totalement inondé et quasiment impraticable à la circulation automobile.  Par ailleurs, la rudesse de l’hiver, si rudesse il y aura, se sentira davantage dans les villages et les hameaux reculés de Bouira. La poudreuse s’est déjà posée dans la nuit de mercredi à jeudi sur les hauteurs de la wilaya culminant à près de 1000 m d’altitude. Le tableau est sans doute beau, d’autant plus qu’il est agrémenté de temps à autre, de belles éclaircies. Seulement, cette beauté formelle n’est pas forcément appréciée par tous les imesdurar (montagnards). A vrai dire, eux, c’est avec la peur au ventre qu’ils accueillent ces premières chutes de neige. Le triste souvenir des hivers rudes, notamment celui de 2004-2005, et de l’hiver dernier sont inoubliables. L’on se rappelle tous de ces hameaux et villages qui, pendant ces hivers et durant une bonne semaine, étaient coupés du monde. Rien ne roulait sur les routes obstruées par la neige et la gadoue. Pour s’approvisionner, les villageois, ceux, bien entendu, qui ne sont pas loin des centres urbains, n’avaient d’autre choix que de se déplacer à pieds.    Les plus éloignés se sont rabattus sur les moyens les plus vieux et les plus sûrs de locomotion, les bêtes de somme. Mais la situation devient dramatique dès lors qu’il s’agit d’une urgence. C’était le cas, rappelons-le, de cette jeune femme de la région d’El Hachimia, sur le point d’accoucher et qu’on évacuera, faute de mieux, à dos de mulet vers l‘hôpital. La jeune femme ne survivra pas. D’autres cas, aussi tristes les uns que les autres, avaient été aussi signalés ça et là à travers les villages de Bouira.   Des familles entières en provenance de l’Est et de l’Ouest du pays avaient été bloquées au niveau de la RN5 et de l’autoroute. Fort heureusement pour elles, l’élan de solidarité s’était spontanément et tout de suite manifesté. Ces familles ont été prises en charge, le temps que la situation se débloque, par les populations des daïras de Bechloul et de M’Chedallah. Sinon, aucun centre d’accueil n’avait été prévu par les autorités locales. Cela viendra dans la précipitation, un peu plus tard. Et à ce propos, force est de constater que les responsables locaux ne semblent pas accorder de l’intérêt aux bulletins météorologiques. Autrement, ils auraient pris les devants en mettant en place les mécanismes à même de pallier, un tant soit peu et au bon moment à la situation de blocage. Cela passe par l’apprivoisement des zones reculées en gaz et, surtout, d’affectation d’engins et autres bulldozers au niveau des routes principales reliant les villages aux centres urbains.    Il est vrai qu’on est loin de la situation de l’année dernière, mais l’hiver n’a pas encore frappé à nos portes. Il est donc recommandé aux autorités locales, à leurs têtes les nouveaux élus, de  prendre, dès maintenant, leurs devants et d’avoir cette « culture de la prévision’’.                              

 Hafidh B.

Partager