La Dépêche de Kabylie : Vous paraissez avoir un grand intérêt pour la cuisine kabyle ?
Mme Aloisia Wörgetter : Nous avons un étudiant algérien dans une école d’hôtellerie à Vienne. Si nous pouvions augmenter ce chiffre, ça serait vraiment bien. Maintenant, je suis là pour mieux voir encore. Si on pourrait organiser une semaine d’échange, durant laquelle nous ferons, par exemple, venir des chefs cuisiniers autrichiens dans le but d’enseigner la cuisine autrichienne, et à leur tour, ils apprendraient la cuisine algérienne, ça serait meilleur encore. Car, au-delà du couscous, il y a des plats intéressants qui ne sont toujours pas connus chez nous, surtout ce que vous faites avec les pâtes… Donc, je compte faire cette proposition ici en espérant qu’on sera d’accord avec moi. Voilà on peut démarrer sur des idées comme ça et pourquoi pas concrétiser quelque chose de grand à l’avenir. L’idéal serait d’arriver à avoir une semaine de cuisine autrichienne en Kabylie et l’équivalent en Autriche.
Y a-t-il d’autres sujets qui ont motivé votre visite ?
Bien sur, nous avons également parlé de Mohamed Iguerbouchène avec le directeur de la culture. Car c’est un artiste qui a marqué son passage en Autriche où il a fait sa formation quand il était jeune. Il a également joué son premier concert en 1925 à Bregenz. Il a écrit sa plus grande œuvre « Rapsodie Kabilia » en Autriche. Dans ce cadre, j’ai proposée au wali, ainsi qu’au directeur du centre culturel de Tizi-Ouzou, de composer un orchestre algérien qui, plus tard, présentera Rapsodie Kabilia, ici en Algérie mais également en Autriche. J’ai demandé à nos experts autrichiens de chercher dans nos archives s’ils pouvaient trouver des traces du passage de ce grand homme en Autriche et dès qu’on trouvera quelque chose on le présentera à nos amis algériens. C’est vrai que 1925 est trop loin et nous n’avons pas pu tout garder, mais je reste optimiste et persuadée de trouver des traces de son passage. Iguerbouchène a également poursuivi sa carrière à Hollywood, il a collaboré à la bande son du film « pépé le moko » dans lequel a jouée une actrice Autrichienne, Hedy Lamarr, qu’on présentait alors comme la plus belle femme au monde. Alors, je suis sure que les deux se sont croisés et je voudrais bien voir s’il y a des traces de leur rencontre et s’ils ont continué à travailler ensemble, d’autant plus qu’il été entouré d’une équipe autrichienne et qu’il parlait Allemand.
On voit bien que vous n’êtes pas là en simple touriste…
Oui, effectivement. D’ailleurs, je prépare ce projet depuis un bon moment. Et ça me tient à cœur de réaliser quelque chose dans ce sens. Mais au préalable, nous devons vraiment trouver quelque chose dans les archives. De plus, le directeur de la culture de Tizi-Ouzou s’est engagé à nous apporter assistance. Par ailleurs, de mon coté un sponsor qui pourra financer ce concert est déjà en vue, maintenant, nous sommes à la recherche de nouveaux musiciens algériens, ainsi qu’un chef d’orchestre qui pourrait faire la mise en scène de ce chef d’œuvre d’Iguerbouchène.
Mais, sinon, peut-être un commentaire sur votre visite à Tizi-Ouzou ?
Je suis fascinée par la Kabylie, ses merveilleux paysages et son niveau culturel. C’est une magnifique région. Par ailleurs, je suis aussi venue pour parler au wali des différentes choses que nous pourrions faire au niveau économique, parce que l’Autriche et la Kabylie se ressemblent étant toutes deux des régions montagneuses. J’ai remis un dossier au wali sur les propositions d’investissements que nous pouvons faire au niveau de Tizi-Ouzou. Pour le moment, je ne pourrais pas vous dévoiler le contenu de ces projets, mais dans quelques semaines, je serai plus libre de m’exprimer à ce sujet.
Quelle a été la réponse du wali ?
A ce sujet également je ne pourrai rien ajouter, mais tout ce que je peux vous dire c’est que nous sommes partis sur de bonnes bases et, pour le moment, il faut croiser les doigts.
Est-ce que vous êtes fan de football ?
Rire… Oui, je suis un peu l’actualité sportive. En Algérie je soutiens le MCA et la JSK.
Sans doutes que depuis que vous êtes à Alger, on vous a déjà reparlé de ce match…historique entre votre pays et l’Allemagne…
Rire… oui, ce n’est pas la première fois qu’on me parle de ce match. En arrivant en Algérie, les gens me demandaient d’où je venais, alors je répondais d’Autriche, et en leur demandant s’ils connaissaient mon pays ils répondaient « oui on le connait depuis 1982 ». Et là j’étais étonnée et j’ai commencé à me demander ce qui s’était passé en 1982 et je me suis rappelée du fameux match. J’étais enfant, à ce moment là j’ai vu ce match à la télévision en direct et c’était honteux. Même les journalistes de la télévision autrichienne avaient mis un commentaire, je m’en rappelle bien, ils avaient écrit « ce match est une honte ». C’était un écrit qui défilait en même temps que les images du match. Mais ce n’est qu’une fois en Algérie que j’ai compris que les algériens avaient souffert à cause de ce match, ce qui a fait que vous l’avez toujours gardé en mémoire. En ce moment même, je discute avec notre association de football pour voir si nous pourrions organiser un match amical entre l’Algérie et l’Autriche, bien que le niveau de notre équipe ne soit pas vraiment très bon. Ça sera une manière de surmonter le passé.
Entretien réalisé par S. B.