Huit zones d’expansion touristiques à aménager

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Toute la littérature économique de ces dernières années, produite aussi bien par la haute administration que par des experts indépendants, fait de la diversification des activités et des recettes budgétaires en dehors de la sphère des hydrocarbures son crédo. 

Le dernier colloque patronal à ce sujet est celui organisé par le FCE en mars 2012, articulé autour de la nécessité pour notre pays de sortir de la dépendance pétrolière. Parmi les activités qui ont souffert de cette hégémonie, le tourisme constitue une branche presque en friche lorsqu’on considère ce qu’elle représente dans les économies de certains pays, à l’image de nos voisins de l’est et de l’ouest. En laissant à la marge un tel créneau, l’Algérie ne fait pas que se passer de recettes en espèces sonnantes et trébuchantes, mais elle jette également un épais voile sur des richesses culturelles millénaires constituant l’âme du peuple et censées participer activement au dialogue des cultures et des civilisations. Car, pour le développement de l’industrie touristique dans ses volets de transport, accueil, hébergement, …etc, il y a le substrat ou la  »matière première », celle qui motive toute déplacement et toute dépense touristique. Cette matière est formée du patrimoine matériel et immatériel dispersés aux quatre coins de l’Algérie et dans le tréfonds de la mémoire populaire.  Pour le cas de la Kabylie, les flux de visiteurs européens qui s’y rendaient avant les années 1990- alors que les infrastructures touristiques étaient rudimentaire, voire parfois inexistantes- nous renseignent sur l’importance d’une destination aujourd’hui laissée presque en friche. Combinant plusieurs écosystèmes (côtier, montagneux, continental), le territoire de la Kabylie recèle un large éventail de sites naturels (pics, pelouses, gouffres, grottes, falaises, lacs de montagne,…) et de sites historiques allant des allées romaines d’Aït Rahouna jusqu’au bordj turc de Bouira, en passant par les aqueducs de Toudja. Dans les autres pays du monde, même les maisons des écrivains- à l’image de celle Jean Giono que nous avons eu l’occasion de visiter à Manosque -, constituent des lieux de pèlerinage tout au long de l’année. Chez nous, la maison des Amrouche, à Ighil Ali, a fait couler beaucoup d’encre suite à un malheureux litige. Si elle arrive à se « dépêtrer » de cette situation rocambolesque, et vu la forte revendication qui la soutient, nous pouvons nous enorgueillir de mettre en valeur la première maison d’écrivain(s) en Kabylie et en Algérie. La maison de Fadhma n’Soumeur, à Iferhounène, est déjà classée comme patrimoine à préserver par le ministère de la Culture. Pour la seule wilaya de Tizi Ouzou, 220 sites et monuments sont déjà recensés.  Parallèlement à ce travail de recensement, le gouvernement s’est attelé au cours de ces dernières années au classement des zones d’expansion et de sites touristiques (ZEST), en application de la loi 03-03 du 17 février 2003 qui tend à mettre en œuvre des plans d’aménagement touristiques (PAT). Les modalités d’établissement de ces plans ont été fixées par le décret 07-86 du 11 mars 2007. 

Réhabiliter et promouvoir des destinations déjà établies

Quatre zones sont prévues pour l’aménagement touristique dans la wilaya de Tizi Ouzou. Trois sont situées sur la dorsale même du Djurdjura (Azerou n T’hor, dans la daïra d’Iferhounène, Tala Guilef et Tizi n Djaâboub, dans la daïra de Boghni). Une autre zone esrt choisie dans le massif forestier d’Ath Ghobri; il s’agit de la station de Yakourène, dans la daïra d’Azazga. Depuis longtemps, ces zones sélectionnées par la direction du Tourisme constituent des points de chute de visiteurs, y compris pendant la période d’insécurité pour certains d’entre eux. En effet, les milliers de visiteurs qui affluent pendant trois vendredis successifs de chaque été sur le pic d’Azerou n T’hor, pour assister à la grande fête que lui font trois villages de la région, est un indice révélateur de la destination touristique de cette majestueuse montagne. À son tour, même touchée par les incendies, la forêt de Yakourène, avec sa fabuleuse Fontaine fraîche, n’a jamais manqué de visteurs. Ce sont plutôt les stations de Tala Guilef et Tizi n Djaâboub qui avaient souffert de l’insécurité pendant de longues années. La sécurisation de ces lieux permettra leur réhabilitation sur le plan touristique. Notons que la station de Tala Guilef, avec sa belle cédraie millénaire, a longtemps constitué un point nodal du circuit touristique allant jusqu’à Tikjda et passant par le lac Goulmim. C’est un sentier pédestre que les randonneurs suivaient pendant quatre heures pour aller du versant nord et versant sud du Djurdjura. Pour la wilaya de Bouira, la direction du Tourisme a également sélectionné quatre zones touristiques à aménager. Il s’agit de la station de Tikjda-Toumliline, relevant des communes d’El Asnam et Bechloul, de la forêt récréative suburbaine d’Erriche (commune de Bouira), de la station de Tala Rana (commune de Saharidj) et de la station thermale de Hammam Ksenna (commune d’El Hachimia).  À l’image des zones d’expansion touristiques choisies pour la wilaya de Tizi Ouzou, les quatre zones de Bouira sont celles connues pour leurs itinéraires anciens, où les visiteurs se rendaient déjà avant que l’administration ne vienne avec son programme d’appui, de réhabilitation et d’expansion. Le site de Tikjda a l’avantage d’une renommée qui dépasse les frontières de l’Algérie, puisqu’il fait partie du Parc national du Djurdjura, au même titre d’ailleurs que celui de Tala Guilef. La zone choisie pour l’expansion touristique est légèrement décalée vers le sud (Toumliline) par la direction du Tourisme et surplombe, dans une vision féerique, le plan d’eau du barrage Tilesdit (170 millions de mètres cubes).  Tala Rana est également située sur le flanc du Djurdjura, au pied de Lalla Khedidja. C’est là où commence l’itinéraire qui mène vers ce pic, point culminant du Nord d’Algérie, à 2308 m d’altitude. Le troisième site est une forêt suburbaine, située à la périphérie du périmètre urbain de la ville de Bouira, comportant plusieurs espèces forestières: chêne-liège, chêne zeen, pin d’Alep, pin pignon,…etc. Elle fait actuellement l’objet d’un aménagement pour en faire une forêt récréative. Les travaux ont commencé en 2011. Quant à la station de Hammam Ksenna, il s’agit de réhabiliter et de promouvoir des thermes antiques (berbéro-romains) qui n’ont jamais cessé de drainer des centaines, voire des milliers de visiteurs-curistes venant de toutes les wilayas du centre d’Algérie. Ayant toujours fonctionné avec des équipements rudimentaires, ce site est situé au cœur de la forêt de  Ksenna, faisant partie du massif des Bibans.  Ces huit zones identifiées dans les wilayas de Tizi Ouzou et Bouira constituent déjà des pré-acquis qu’il convient de conforter avec des études de faisabilité et d’exécution. Dans ce cadre, les directions de wilaya du tourisme ont, dans une première étape, lancé des études pour l’identification et la délimitation officielles de ces zones. L’étape suivante consistera à définir la nature et  les types d’équipements que les investisseurs-concessionnaires seront tenus de réaliser sur ces sites. 

Amar Naït Messaoud

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