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La Tunisie s’embrase

La Tunisie, qui a célébré il y a à peine quelques jours, le deuxième anniversaire de la Révolution du Jasmin, s’est encore une fois embrasée. Hier, la rue tunisienne a renoué en effet, avec les manifestations, parfois musclées, suite à l’assassinat d’un des figures de proue de l’opposition Tunisienne.  Il s’agit du secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unifiés, Chokri Belaïd. Celui-ci a été assassiné hier matin, prés de chez lui à Tunis. Il a été atteint par des balles tirées à bout portant par un homme vêtu en « qachabia », selon le Premier ministre Hamadi Jebali. Le ministre de l’Intérieur, Ali Larayedh, a indiqué en citant le chauffeur de la victime, qu’un complice attendait le tueur pour prendre la fuite à moto.  « Chokri Belaïd a été touché par quatre balles au niveau de la tête, le cœur, la nuque et l’épaule », a affirmé de son coté Mohamed Jmour, président du comité central du Parti des patriotes démocrates unifiés, cité par l’agence de presse tunisienne (TAP). « Il a été abattu par des tireurs professionnels », a-t-il ajouté. Pour sa part, la femme de la victime a indiqué que son défunt mari a été touché par deux balles. Cette dernière accuse, néanmoins, les Islamistes d’Ennahda du meurtre. «  J’accuse Ennahda et Ghannouchi du meurtre de mon mari », a-t-elle déclaré sur la chaine France 24, ajoutant qu’elle porterait plainte. Même son de cloche chez le frère du défunt, Abdelmadjid Belaïd. «J’accuse Ghannouchi d’avoir fait assassiner mon frère », a t-il déclaré. De son coté Ennahda a renié ses accusation et dénonce « un crime odieux visant à déstabiliser le pays », et son chef, Rachid Ghannouchi, a estimé que les auteurs « veulent un bain de sang » dans le pays. Le Premier ministre tunisien Hamadi Jebali, membre d’Ennahda, a également dénoncé un « acte de terrorisme » contre toute la Tunisie. « C’est un acte criminel, un acte de terrorisme, pas seulement contre Belaïd, mais contre toute la Tunisie », a-t-il dit à la radio Mosaïque FM, promettant de tout faire pour que le tueur soit arrêté rapidement. « Le peuple tunisien n’est pas habitué à ce genre de choses, c’est un tournant grave. Notre devoir à tous, en tant que gouvernement, en tant que peuple, c’est de faire preuve de sagesse et de ne pas tomber dans le piège du criminel qui vise à plonger le pays dans le désordre », a-t-il déclaré. Le président Moncef Marzouki, qui était en visite en France, a annulé sa participation au sommet islamique du Caire pour rentrer d’urgence à Tunis. Il faut dire que le pays a pris un sérieux coup. Il s’agit, en fait, du premier assassinat politique depuis la révolution qui a emporté Ben Ali. La Tunisie a renoué avec les manifestations juste après ce meurtre. Devant l’hôpital du quartier Ennasr de Tunis, où la dépouille de la victime se trouvait, des centaines de personnes ont manifesté dans la matinée en criant : « le peuple veut une nouvelle révolution ». « Ghannouchi sale chien », criait le père de la victime, en larmes, rapporte l’AFP. Parallèlement, une foule sans cesse grandissante se réunissait devant le ministère de l’Intérieur, sur l’avenue Habib Bourguiba, dans la capitale. A la mi-journée, ils étaient environ 4.000, rapporte l’AFP. Ailleurs dans le pays, à Mezzouna, près de Sidi Bouzid, et à Gafsa, (centre), des manifestants ont incendié et saccagé les locaux d’Ennahda, toujours selon l’AFP. A Sidi Bouzid, Kasserine, Béja et Bizerte, des foules ont également manifesté leur colère. La police a dû user des bombes lacrymogènes pour disperser les foules, notamment à Tunis, plus précisément à l’avenue Habib Bourguiba. Les affrontements entre policiers et manifestants ont duré plusieurs heures.  Par ailleurs, l’opposition Tunisienne a appelé en fin d’après-midi, à une grève générale le jour de l’enterrement de la victime, et annonce la suspension de sa participation à l’Assemblée constituante.  Chokri Belaïd était secrétaire général du Parti des patriotes démocrates, un parti opposé au gouvernement islamiste d’Ennahda. Il était âgé de 48 ans. Il faisait partie de la coalition des partis de gauche, le Front populaire, qui se pose en alternative aux islamistes au pouvoir. Son assassinat intervient au moment où la Tunisie est secouée par une grave crise politique. L’alliance gouvernementale, constituée autour d’Ennahda, s’est disloquée. Les deux partis alliés d’Ennahda, Etakatoul et le Congrès pour la République réclament un remaniement gouvernemental.

M.O.B 

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