Comment faire revivre le paradis montagneux ?

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Par Amar Naït Messaoud

La grande rencontre, hier à Yakourène, des amis et défenseurs de la montagne, de la forêt et de la nature en général, coïncide avec les moments de grandes interrogations sur le devenir du cadre de vie en milieu montagneux. Les 67 communes de la wilaya de Tizi-Ouzou sont classées, sur le plan géomorphologique, comme des communes de montagne. Donc, l’initiative regroupant un média de proximité la radio, avec les actions de volontariat de nettoyage et de plantation, ainsi qu’avec les actions de sensibilisations qu’ont eu à entreprendre la direction de l’environnement, la conservation des forêts, le parc national du Djurdjura et les associations de défense de l’environnement, ne peut qu’avoir un écho favorable dans les communes concernées. Dans le pittoresque hôtel Tamgout, situé entre Azazga et Yakourène, les acteurs et les défenseurs de l’environnement montagneux se sont regroupés autour d’une exposition portant sur cette thématique consacrée par l’initiative, intitulée La Semaine des montagnes, entrant dans le cadre de la célébration de l’année 2013 en tant qu’année de l’environnement et du développement durable. Quel lieu plus éloquent et mieux indiqué que la station de Yakourène pour abriter une telle manifestation en Kabylie? Jusqu’à un passé récent, le silence religieux des lieux et de ses parages incitait à la méditation. Fontaine fraîche, sommet de Tamgout perché à 1278 m d’altitude et dominant Aït Aïssi, Tifrit Aït L’hadj et Alma Guechtoum, forêt luxuriante de chêne-liège, chêne zeen et chêne afarès, ce sont autant de noms et de lieux qui disent pour nous la quiétude, la fraîcheur, l’eau cristalline, la propreté et la Kabylie avec ses valeurs culturelles et morales. C’est à la recherche de toutes ces réalités, menacées par un présent étouffant, que les amoureux de la nature et tous ceux qui tiennent aux valeurs de la montagne sont partis, à travers les passerelles établies avec ce média classique et moderne à la fois qu’est la radio. En effet, les incendies de forêt, les coupes sauvages de bois, les constructions illicites et les décharges anarchiques constituent aujourd’hui la triste actualité la réalité la plus prégnante de ces havres de paix. Par-delà les questions économiques et sociales qui taraudent les populations des régions montagneuses, la vie des populations en Kabylie a reçu ces dernières années des coups de boutoir qui risquent de faire passer cette ancienne niche écologique, si les choses ne sont pas bien prises en main dès maintenant, pour un souvenir d’un paradis perdu. Le comble de l’histoire est que cette chute aux enfers n’est guère la conséquence d’un développement industriel de grande dimension. Une évidence qui s’impose à l’esprit risque d’être sous-estimée ou carrément ignorée : les ressources naturelles sont trop précieuses et l’urgence de leur protection trop pressante pour que la stratégie de leur conservation soient renvoyée à demain. Ce que les pages de la presse quotidienne désignent, dans le jargon du métier, comme des « pages mortes » (décharges sauvages, éboulement de terrain, égouts à ciel ouvert…) constitue imparablement l’actualité la plus substantielle, celle qui fait l’inexorable quotidien des habitants de la montagne et des villages kabyles.  C’est là une matière impérissable, au contenu instructif pour les lecteurs de la région, destinée à réveiller l’esprit de citoyenneté et des valeurs de la « kabylité ». Presse écrite, radios locales et, demain peut-être, chaînes de télévision régionales, sont, de plus, appelés à travailler ensemble avec la société civile et l’administration, pour réhabiliter le cadre de vie sous toutes ses facettes. Il s’agit d’amener les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités en la matière (centre d’enfouissements techniques, décharges contrôlées, lutte contre les incendies, protection des bassins versants contre l’érosion, captage et aménagement des sources d’eau, actions liées à l’attractivité touristique,…), et de jouer à fond la carte de la sensibilisation en direction des citoyens, comme vient d’en prendre l’initiative la direction de la radio nationale. En effet, rares sont les occasions où les différents acteurs de la société en relation avec la problématique de l’environnement, se regroupent autour de la même table, ou sur le terrain dans une forêt ou une source d’eau, entourés de singes magots, de chêne zeen et de vendeurs de poteries, comme c’est le cas sur la RN 12 de Yakourène.

 

A. N. M.

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