Les assiettes foncières sont si rares à Larbaâ Nath Irathen, que le moindre projet et le moindre aménagement tardent à voir le jour dans la daïra. Autrement dit, c’est à chaque fois un vrai chalenge pour les services concernés et les autorités locales de trouver le moindre petit terrain. Il faut user de beaucoup de diplomatie et s’armer de patience pour pouvoir réaliser le moindre projet. Chaque parcelle, aussi infime soit-elle, est une propriété privée, et personne ne veut la céder. Pourtant, plusieurs projets sont en souffrance dans la région : eau, gaz, électricité pistes agricoles, décharge publique et autres. Leur utilité publique est reconnue, mais aucun propriétaire ne pense à l’intérêt général. Plusieurs daïras en le même problème, ce qui fait que les milliards débloqués par l’Etat, dans le but d’améliorer le quotidien des citoyens, dorment dans les caisses. Et ce sont les citoyens qui en paient les conséquences. Les oppositions au passage du réseau de gaz de ville sur leurs propriétés font que les propriétaires terriens empêchent leurs concitoyens d’accéder à cette commodité. Plusieurs villages sont toujours réduits à se chauffer et à cuisiner avec du bois. Le projet est pourtant censé être réalisé depuis des lustres. Donc, réaliser le moindre projet prend des années de négociations et de propositions. Un autre problème contribue également à ce blocage. Beaucoup de terrains ne pas encore répartis entre leurs différents héritiers. Des frères, sœurs, cousins et gendres sont autant de gens à convaincre et à qui il faut expliquer et réexpliquer l’intérêt de ces projets. Chaque bout de terre grignoté est une bataille remportée. « La terre a une valeur et une importance capitales que nulle somme d’argent ne peut remplacer. C’est le seul lien que nous avons avec nos aïeux », nous dira un vieux. Il poursuivra : « la céder ou la vendre signifie la perte de sa dignité même si l’on est dans le besoin. Nos aïeux ont connu la famine et la pauvreté surtout au temps de la colonisation, mais ils n’ont jamais voulu s’en séparer. Et maintenant que tout est à portée de main, on oserait le faire ? De nos jours, il faut juste retrousser ses manches et ne pas céder à la fainéantise. C’est pour cette raison que personne ne veut céder le moindre bout de terrain ». Ainsi donc, l’intérêt public ou général ne peut rien faire contre le poids des coutumes et des convictions ancestrales. Tant que la terre sera synonyme de dignité et d’honneur, aucun projet ne sortira de terre. En attendant un éventuel changement des mentalités, le commun des citoyens continuera à souffrir.
Youcef ziad
