Beaucoup de chanteuses et de chanteurs kabyles, qui ne sont plus de ce monde, ne sont pas connus de la génération actuelle. Ils ont pourtant participé à hisser haut et fort la chanson kabyle et ils méritent, quand même, d’être cités ne serait que pour dire qu’ils ont existé. Zohra fait parti de ces chanteurs qui ont rendu l’âme, il y a presque deux décennies. Elle était une chanteuse Kabyle qui était destinée à devenir une grande star si le destin n’a pas décidé autrement. La mort l’a happée à la fleur de l’âge alors qu’elle n’avait que 32 ans au moment où elle pouvait encore donner beaucoup à la chanson kabyle qui en avait tant besoin. Née en décembre 1962, à Aguemoun, un village de Larbâa Nath Irathen, dans la wilaya de Tizi Ouzou, Zohra menait une vie pareille à celle de toutes les villageoises kabyles de l’époque. Elle apprit de sa mère tôt les tâches féminines telles que le métier à tisser, le travail des champs, notamment la cueillette des olives, etc. Très jeune, elle était déjà amoureuse de la lecture et adorait la musique qui s’était incrustée dans ses veines. Zohra se maria très jeune, à l’âge de 18, et eut une petite fille, mais divorça au bout de quelques temps. Elle se remaria et eut une deuxième fille puis divorça pour la seconde fois. Ses séparations l’ont forgé à devenir une chanteuse qui cherche un moyen d’extérioriser sa douleur. Elle sortira son premier album, en 1982, qui n’est pas passé inaperçu du fait qu’il a fait un succès retentissant faisant dire aux hommes et femmes qu’elle est la porte-parole de la femme algérienne, particulièrement kabyle, prédestinée, sans conteste, à devenir une étoile de la chanson sentimentale Kabyle. Ses chansons emmènent dans un univers voluptueux où se mêlent avec joie, tendresse, amour et mélancolie. En 1986, elle tenta sa chance en hexagone en allant s’installer en France pour animer des galas. Son large répertoire ne manque pas de chefs d’œuvres tels que : « Yefna-k sber ayoul-iw », « A taleb arou-yi », « Terguemed iyi mebla sebba » ou encore « A yemma Thassa » (un hommage aux mères). Elle mourut tragiquement dans un accident de voiture en janvier 1995 à l’âge de 32 ans, sur la route Paris/ Marseille en revenant d’un gala qu’elle avait donné en région parisienne pour notre communauté émigrée. Pour ceux qui l’ont connue, notamment ses fans, elle restera à jamais l’une des plus belles voix de la chanson kabyle. En15 ans de carrière seulement, elle a fait un riche répertoire de 36 chansons encore d’actualité.
L. Beddar

