“La victime, avant de mourir, a pointé son doigt sur l’accusé”

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Alors que l’accusé soutient qu’il attendait son tour de se faire soigner dans la salle d’attente du centre de santé, lorsque la victime, l’infirmier du centre, l’a maculé de son sang qui giclait de sa blessure en sortant de la salle de soins, la plupart des témoins, dont L.A., présent sur les lieux du crime, affirment au contraire que l’infirmier, en sortant du centre de santé, tenait d’une main sa poitrine ensanglantée et de l’autre, désignait l’accusé en articulant “houa, houa…” C’est cette énigme que la cour criminelle de Béjaïa a eu à élucider avant-hier pour la deuxième fois. L’affaire a en effet été déjà tranchée lors du 1er procès en date du 1er avril 2003 et l’accusé a été condamné à une peine de 10 ans de réclusion criminelle. Mais l’accusation qui avait requis alors la prison à perpétuité, n’étant pas satisfaire du verdict, fait appel.Les faits remontent à la journée du 20 juin 2002 lorsque l’accusé, B. H., âgé de 65 ans, fellah, ancien émigré, père de 7 enfants, s’est rendu vers 10 heures 30 mn au centre de santé de Senadla dans la commune de Draâ El Gaïd pour, a-t-il déclaré à l’audience, se faire enlever une épine à la main. Il attendrait tranquillement son tour dans la salle d’attente lorsque l’irréparable fut commis.Pour l’accusation et la partie civile, les faits sont tout autre : l’accusé, qui a planifié son coup, a au contraire, à un moment où il n’y avait personne au centre de santé, pour porter 7 coups de couteau dans le corps de la victime, M.S., un infirmier âgé de 32 ans au moment des faits, marié et père de deux enfants en bas âge.Le mobile de ce crime crapuleux, même s’il n’a reçu aucun éclairage particulier au cours de l’audience, se rapporterait selon certaines indiscrétions, à une affaire de mœurs, en ce sens que l’accusé soupçonnait l’infirmier d’abuser de sa bru quand celle-ci se rendait au centre de santé pour des soins. Et le fait que la victime fermait la porte de la salle des soins même pour une simple injection renforcait bien l’accusé dans ses convictions.Pour la partie civile, “les preuves accablantes de ce crime crapuleux sont irréfutables”. “A cause, souligne maître Benouraet, du fait qu’en fermant la porte de la salle de soins pour soigner ses blessés, l’infirmier n’a fait que respecter les règles en usage dans la pratique du métier”. Il ajoute que l’accusé croyait avoir bien préparé son coup en garant sa voiture à quelques 300 m du centre de santé, pour ne pas se faire remarquer quand il prendrait la fuite après son forfait. Le procureur qui a requis la peine de la réclusion criminelle à perpétuité, a axé l’essentiel de son intervention sur les contradictions relevées dans les déclarations de l’accusé qui aurait, toujours selon l’accusation créé dans son imaginaire, un meurtrier qui se serait, après le crime, sauvé avec une R19 tantôt blanche, tantôt bleue. Et l’accusé aurait poursuivi le meurtrier jusqu’à Aïn Roua dans la wilaya de Sétif en empruntant une route secondaire et déserte, où il n’aurait rencontré personne. Pour la défense, assurée par maître Boudina, l’accusé n’a pas de chance puisqu’il perd son meilleur témoin en la personne de la victime. L’avocat souligne aussi un fait, pas de déclarations contradictoires mais l’accusé souffrirait, selon lui, de perte de mémoire étant donné sa détention prolongée et son âge avancé. Et la justice, conclut-il, ne doit pas condamner une personne pour perte de mémoire.Après délibérations, le président de la cour donne lecture du verdict qui sera de 15 ans de réclusion criminelle, soit une aggravation de peine de 5 ans par rapport au 1er procès.

B. Mouhoub

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