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L’universalité au fronton de Tizi-Ouzou

La décision de baptiser, respectivement, la future Maison de la presse de Tizi-Ouzou du nom de Smaïl Yefsah, la Maison de la musique de celui de Mohamed Iguerbouchene et, enfin, la bibliothèque principale de la lecture publique de la ville des genets de celui de Mohamed Arkoun, montre, si besoin est, la volonté des pouvoirs publics de réconcilier la région avec ses enfants féconds. Ces trois personnalités ont été à un moment de leur vécu, des repères qui inspiraient tout un chacun dans le cheminement de sa vie, de sa préservation des chants des sirènes, de l’obscurantisme, de l’intolérance et de l’exclusion, voire de l’excommunion. Ils étaient, aussi, chacun dans son domaine propre, des exemples d’humilité et d’ouverture d’esprit. Ils n’ont pas été ni l’un ni l’autre, des prêcheurs de haine ou des bâtisseurs de « ghettos (qui peuvent être) rassurant mais (qui sont) à l’évidence stérilisant » (dixit Mouloud Mammeri). Smaïl fut un journaliste au tempérament taillé dans le schiste bleu de son village natal, Tala Amara. Il en a hérité la rigueur et la droiture dans l’exercice de son métier. Il a été assassiné sans doute pour ces raisons. Iguerbouchene, pour sa part, a non seulement sorti la musique kabyle de son no man’s land des cafés d’émigrés, pour la propulser à travers ses rapsodies sublimes vers l’universalité mais a aussi composé des symphonies, des musiques de films, notamment celle de Pépé le Moko de Philippe Duvivier, et pour des chanteurs maghrébins tel que Farid Ali, Salim Lahlali, Fadhila Dziriya… Le maestro s’était distingué par son talent hors du commun, et pas seulement dans le domaine musical. Polyglotte parlant plus de sept langues et touche-à-tout toujours inspiré il a réalisé des ballets tels que «La danse devant la mort». Mais ce qui mérite le plus d’attention dans la vie de ce musicien magistral c’est son esprit perméable aux courants de tous bords et de toutes contrées. Quant à Mohamed Arkoun, islamologue, philosophe et historien, toute son œuvre portait en elle la générosité intellectuelle d’un homme pont qui tenait à replacer et repenser l’Islam avec les outils de la modernité et les éclairages des lumières et de la modernité. L’initiative de baptiser de ces prestigieux noms des établissements d’envergure, tels que la Maison de la presse, celle de la musique et l’annexe de la Bibliothèque Nationale, est salutaire à plus d’un titre. D’une part, ces dénominations au fronton de ces bâtiments permettront aux jeunes de mieux connaître ces intellectuels, et d’autre part, de s’imprégner de leurs œuvres universelles pour en tirer le maximum de profit.

Sadek A. H.

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