Des femmes de cœur, de Nina Koriz, présent au SILA

Partager

Le roman est  puissant, dramatique, donnant le frisson. Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître.  Ce fruit de quatre années d’insomnie et d’attente,  révèle un esprit déterminé à souffler sur la poussière couvrant l’Histoire, pour connaître la petite histoire. Grâce à quelques fils qui se sont tendus à travers les époques, nous accédons à l’intime conviction que la bataille,  sans concessions, que cette jeune fille livre à l’oubli devrait faire un cas d’école pour les chercheurs de la vérité. A un âge où le père Noël existait encore, elle griffonne des pensées pour arriver aujourd’hui à nous convaincre qu’en déterrant le passé fait de larmes et de sang, elle finira par  comprendre qui elle est. La quête du père, synonyme de la patrie, lui fera découvrir le lourd tribut payé par les femmes, qu’elles soient musulmanes, juives, ou chrétiennes, sur le sol algérien ou en France durant cette guerre sanglante dont les séquelles sont encore visibles. Mais il ne lui a pas suffi de le décider, car pour faire parler les femmes, il lui fallait une sacrée dose de persuasion afin que ses interlocutrices transcendent cet écueil fait de doute. « Pour écrire ce livre, j’ai choisi de rencontrer des femmes qui n’ont pas l’habitude de parler. Celles qui ne se sont jamais racontées mais qui ont accepté de le faire quand elles ont su que leur témoignage allait servir à l’écriture d’un roman et non à celle d’une interview de journaliste », a confié Nina Koriz. Et c’est parti pour une longue expédition faite d’espoir, mais souvent rattrapée par le sentiment qu’il est vain de continuer à chercher sans boussole. Il aura fallu être téméraire et briser les tabous pour être présente aujourd’hui au Salon International du Livre pour signer des dédicace à tous ceux venus nombreux lui dire merci d’avoir pensé aux oubliées de l’Histoire. Quant au roman,  il se lit d’un trait. Une seule nuit suffit pour comprendre la dure réalité subie par nos aînées face à la quatrième puissance mondiale et être convaincus qu’une quête n’est jamais vaine. Au tout début des années 90, Ambre faisait du cinéma dans cette ville lumière qu’est Paris. Elle est née d’une mère ‘’pied-noir’’, Sylvia Pier Angeli, et d’un père inconnu.  Et c’est ce morceau qui manquait à son puzzle qui a été le catalyseur pour accepter un rôle capital dans un film dont le tournage devait se faire à Alger. Saisie au vol, cette opportunité la mènera là où elle pourra enfin savoir qui elle est.  Il y a quelques jours, elle était à  Biskra en pèlerinage  pour rendre visite à son père… ‘’Des femmes de cœur’’, 372 pages, est sorti aux éditions Zyriab, Alger 2013.

Qui est Nina Koriz ?

Ancienne élève du cours Simon, Nina Koriz tourne, en 1992, un film politique «Automne, Octobre à Alger » qui sera le déclencheur de sa prise de conscience et de son engagement auprès des personnes en souffrance du fait de leur exclusion sociale, raciale ou relative à leur sexe. Ses rencontres et ses échanges avec des femmes de toutes générations la font réfléchir aux répercussions douloureuses que génèrent les évènements politiques sur la destinée des femmes des pays du Sud. De retour en France, elle décide de se former au métier de psychothérapeute et fonde en parallèle une école où elle accompagne des femmes de toutes origines vers leur insertion sociale et professionnelle. Invisibles, et cependant tellement destructrices, les blessures intérieures et le cheminement qui permet de les dépasser sont à la base de son travail de thérapeute, de formatrice et constituent son thème de prédilection pour l’écriture romanesque.

Ferhat Zafane

Partager