En effet, entre le 1er et le 20 du mois de décembre, des milliers d'Algériens ont quitté le pays pour la France et d'autres pays tels la Turquie, la Tunisie et le Maroc, pour fêter le réveillon de Noël (la nuit du 24 au 25 décembre) et le réveillon de la Saint-Sylvestre (la nuit du 31 décembre).
Par Amar Naït Messaoud
Au moment où des touristes européens commencent à se rendre dans le Sud algérien (Ghardaïa, Timimoun, Tamanrasset,…), pour célébrer les fêtes de fin d’année, et ce, malgré le reflux d’attractivité induit par la situation sécuritaire après le guerre au Mali, les Algériens dont le niveau de vie le permet, se sont déjà envolés vers d’autres cieux pour célébrer des fêtes qui ne sont pas les leurs, mais qu’ils ont fini par adopter et dans lesquelles il se reconnaissent quelque part. En effet, entre le 1er et le 20 du mois de décembre, des milliers d’Algériens ont quitté le pays pour la France et d’autres pays d’Europe, tels la Turquie, la Tunisie et le Maroc, pour fêter le réveillon de Noël (la nuit du 24 au 25 décembre) et le réveillon de la Saint-Sylvestre (la nuit du 31 décembre). Ce sont là les chiffres de la Police de l’air et des frontières rendus publics au début de la semaine en cours. La PAF signale que c’est l’aéroport international Houari Boumediene d’Alger qui a enregistré le plus grand nombre de passagers, avec pour destination première, à raison de 60 %, la France. En deuxième position, vient la Turquie, qui voit son attractivité chez les Algériens augmenter de près de la moitié par rapport à 2012. Il y a lieu de signaler que la compagnie Turkish Airlines a multiplié les formules de promotions en cette fin d’année pour la clientèle algérienne. 15 % des flux de touristes algériens se sont rendus en Espagne pour passer les vacances de fin d’année. D’autres destinations sont également signalées: Émirats Arabes Unis, Qatar et Egypte. Depuis la fin des années 1990, l’engouement des Algériens pour les fêtes de fin d’année est devenu un véritable phénomène de société. Au moment où les visas pour la France étaient distribués avec une extrême parcimonie, il se formait devant le poste frontalier d’Oum Tboul, relevant de la wilaya d’El Tarf, une file immense de voitures et de bus algériens se rendant en Tunisie entre les 24 et le 31 décembre de chaque année. C’était avant la chute du président Benali. Même si la révolution du 17 décembre 2010 a quelque peu provoqué un ralentissement des activités touristiques dans ce pays, les Algériens ont montré un sens élevé de fidélité à la destination Tunisie, faute d’autres issues, sachant que pour la plupart des pays étrangers, un visa est exigé. La tendance qui s’est dessinée au cours de ces trois dernières années, c’est la frénésie de l’achat par des Algériens d’appartements et de maisons individuelles en Espagne. Certains des fêtards de fin d’année, se rendront à Malaga, Barcelone ou Madrid, pour rentrer «chez eux»! C’est un phénomène pour lequel les autorités financières algériennes ont montré une certaine curiosité du fait que le transfert illicite d’argent s’effectue d’une manière sophistiquée via des intermédiaires. Les transactions auxquelles se sont livrés les Algériens ont fait suite à la crise économique en Espagne où des ménages ont été contraints de céder, et même de brader, leurs appartements, d’autant plus que ces ménages ont été incapables de mobiliser le montant des impôts immobiliers grevant leurs logements. Ce qui a refroidi quelque peu les ardeurs des autres postulants à de telles acquisitions, ce sont les révélations sur le payement des impôts sur l’immobilier; des sommes généralement insoutenables. Et puis, il y a eu ces déclarations de l’ambassadeur espagnol à Alger qui coupent court à toute illusion d’avoir des papiers de résidence sur la base de l’achat d’un appartement. À Paris également, les Algériens non résidents, généralement des retraités faisant des allers-retours entre la France et l’Algérie, ont acheté des propriétés parfois prestigieuses, ce qui les positionne, d’après un bilan dressé au début de ce mois de décembre, en première place parmi les acheteurs immobiliers étrangers dans la capitale française. Ces acquisitions immobilières ont indubitablement renforcé la tendance à célébrer les fêtes de fin d’année dans les pays concernés. Ce qui explique le rush de voyageurs enregistré dans un laps de temps très court. En Kabylie, des milliers de jeunes célèbrent à leur façon les fêtes de fin d’année. Ce sont généralement des regroupements entre copains, autour de quelques bouteilles d’alcool, qui se déroulent dans des maisons isolées, ou même dans des hangars où sont stocké habituellement le foin et les bottes de paille. Autour d’un feu de camp qui réchauffe l’atmosphère froide des nuits de décembre, les jeunes qui ne peuvent rêver ni de Madrid, ni de Paris, ni même d’un lieu branché d’Alger, s’enivrent de douces paroles, de chaleureux échanges, de lumineuses visions et d’un peu de pinard. Ils oublient leur dure condition, coincés entre le chômage, le manque de perspectives et l’isolement qu’ils oublient le temps d’une mini kermesse, qui prendra fin par un premier janvier «chômé et payé». Ce n’est que partie remise. Arrivera le 12 janvier. La fête de Yennayer les appellera au bercail, autour d’un dîner familial amélioré rénové aux couleurs et arômes de chez nous. Depuis des années, ils espèrent que les pouvoirs publics déclarent également chômé et payé ce premier jour de l’an berbère. Ils ne désespèrent pas que l’histoire finira par reconnaître les siens.
A.N.M.