Décidément, la crise du lait en sachet n’est pas prête de connaître son épilogue. Les épiceries sont toujours prises d’assaut par des citoyens qui guettent avec anxiété l’arrivée du livreur.
Les commerçants de la région n’ont trouvé d’autres moyens que de rationner sa distribution en se limitant à deux sachets par foyer afin de permettre à l’ensemble des familles d’en bénéficier. Néanmoins, certaines personnes qui ne sont pas à court d’idées trouvent la parade de tromper la vigilance des épiciers, et ce, en embarquant avec eux leurs progénitures dans l’espoir d’acheter un maximum de sachets. Un réflexe atavique qu’on a cru disparaître de l’esprit du consommateur algérien, habitué dans les années 80 à ce genre de comportement, fruit d’une économie dirigée. Face à cette crise, bon nombre de famille se rabat sur le lait de vache comme produit de substitution en dépit du coût élevé de ce dernier. Même si le lait en poudre est disponible sur les étals, la cherté de ce produit n’attire guère l’intérêt du consommateur lambda. Communément appelé « Lahda », ce lait en poudre ne draine pas les foules en raison de son prix exorbitantqui dépasse les 300 dinars. « Je préfère acheter le lait de vache, au moins c’est un produit de qualité plutôt que de se procurer le lait en poudre qui coûte les yeux de la tête », nous avoue un père de famille. Le vieux dicton, « le malheur des uns fait le bonheur des autres » est plus que jamais au menu. Cette situation de crise remplit d’allégresse les éleveurs de la race bovine qui voit leurs chiffres d’affaires du jour au lendemain doublés, voire triplés. Le litre de lait de vache est cédé à 45 dinars, voire 50 dinars. Étant donné que la rareté du lait en sachet perdure, les premières victimes sont les petits enfants qui ne peuvent s’en passer de ce produit vivrier. Les files d’attente devant les épiciers font, désormais, partie du décor quotidien, où les discussions tournent autour du fameux lait en sachet devenu un produit de luxe. Tôt le matin, nous assistons à un rush de clients amassés devant les épiceries ou supérettes, patientant sur le trottoir l’arrivée du camion délivrant ce produit de large consommation. Une demande croissante qui ne risque pas de fléchir. Le lait pasteurisé étant indisponible depuis des mois, l’arrivée du mois de Ramadhan risque d’amplifier davantage la crise, compte tenu de l’augmentation de la consommation dudit produit par les ménages. Les algériens restent de loin de gros consommateurs de lait, dont la moyenne atteint les 200 litres/habitant. Une quantité jugée excessive comparativement à d’autres pays de standard élevé. La facture d’importation de cette denrée pèse lourdement sur la balance commerciale, car elle n’a cessé de connaître une courbe ascendante atteignant les 30 milliards de dinars en 2013. Cette lourde facture devrait faire réfléchir les pouvoirs publics afin d’alléger la facture d’importation en encourageant la production nationale en lait cru. Les professionnels de la filière imputent cette hausse à la régression de la production mondiale de lait sous l’effet de la sécheresse enregistrée dans certains pays producteurs comme les USA, l’Australie, la Nouvelle-Zélande… et cette crise s’est répercutée sur le cours mondial à la tonne de la poudre de lait qui frôle la barre des 5 200 dollars.
Bachir Djaider