Si la palme mondiale du gaspillage existait, sans nul doute l’aurions-nous remportée. En effet, le constat est des plus affligeants. Le pain, un des rares produits alimentaires à être encore subventionnés par l’Etat, finit, très souvent, dans les sacs poubelles. Et c’est le cas dans les cités et quartiers de la ville d’Akbou. Cette manie qu’ont les gens de s’approvisionner en pain au-delà de leurs besoins a pris les allures d’une véritable norme pendant le mois de Ramadhan qui vient de s’achever. Un mois au cours duquel les yeux se font plus gros que le ventre. Pain ordinaire, pain amélioré pain-gâteau, pain brioché en baguette, en couronne ou en ficelle… les poubelles en étaient garnies. « On passe le plus clair de son temps à faire inconsidérément ses emplettes, pour s’apercevoir, une fois la panse pleine, que l’on ne peut tout consommer », fait remarquer un père de famille du quartier Guendouza. Force est de constater néanmoins que ce gaspillage lamentable est par ailleurs profitable au bétail. En effet, avec le renchérissent des prix du son et de l’orge sur le marché bien des éleveurs se rabattent sur le pain rassis, qu’ils peuvent se procurer à moindre coût, souvent gratuitement. « Avec ce genre de comportements irresponsables, peut-on s’étonner que notre pays soit l’un des plus gros importateurs mondiaux de blé et qui plus est, avec des dollars sonnants et trébuchants ?», s’indigne un boulanger d’Akbou, tenant boutique à la vieille ville. D’aucuns estiment que, tout compte fait, cela ne rime à rien de mettre à contribution le budget de l’Etat, donc le contribuable, pour soutenir un produit de large consommation certes, mais qui termine inéluctablement sa course dans les mangeoires des étables ou dans les sacs à ordures. Il est en effet ais de conclure que le consommateur n’aurait plus de pain à jeter, s’il le payait à prix coûtant. A condition, naturellement, que ses revenus soient indexés sur le coût de la vie. Ce qui ne semble pas être à l’ordre du jour.
N. Maouche