Nadir Benseba, avec qui nous avons eu l’honneur de travailler alors que nous faisions notre entrée initiatique dans le monde de la presse, était un baume au cœur. Qui aurait pu croire qu’il nous quitterait avec l’art de l’élégante discrétion qui est le sien, sans même nous dire adieu. L’épreuve dans sa brutalité est cruelle, et qui parmi nous peut se résoudre ainsi à une telle fatalité dans sa douleur indicible ? Dans l’affliction, les larmes abondantes ont ruisselé sur les joues des plus endurcis de ses proches et fidèles amis de la presse, consternés par le sort. Seule l’élévation de l’âme par la foi et la résignation en la volonté divine nous a éclairés dans la rationalité qui nous rappelle que les êtres chers et les hommes de valeur possèdent le don de dignement s’éclipser de ce bas monde et de s’en aller sans faire de bruit. C’est la seule consolation qui nous reste pour nous remémorer Nadir, tel qu’il a toujours été. Un homme qui, de par ses qualités humaines et sa sociabilité remplissait tous les espaces sans jamais les encombrer. Natif de la ville d’Akbou, Nadir a été l’ami de tous ceux qui, nombreux, l’ont connu dans la trajectoire de sa vie. Ils garderont le souvenir inaltérable de la rectitude, de l’affabilité et de l’abnégation du journaliste qu’il était, à travers son apport à une corporation installée dans une sorte de scepticisme lucide. Sans jamais céder un pouce des principes qui ont scandé son parcours, il laissait le soin aux mastodontes incultes d’envahir les périmètres vitaux, quand l’air venait à manquer ou devenait irrespirable. Il était trop modeste pour la grosse tête, trop intelligent pour pavoiser devant si peu. Si personne dans son entourage n’a vraiment sondé ses ambitions intimes, tout le monde savait qu’il était capable d’aller au bout. Les ressources, Nadir en avait parce qu’il savait toujours où en puiser. Il n’est pas né avec une cuillère dorée à la bouche et il est assez intelligent pour savoir que les plus beaux parcours empruntent les sentiers de l’adversité. Et il s’y est installé la détermination ne chassant pas vraiment le doute, mais la générosité dans l’effort compensait largement quelques sporadiques essoufflements. Le voilà rejoindre à son tour des êtres qu’il a aussi pleurés et qui l’ont précédé dans l’abîme d’une mort foudroyante. Nadir sera, certes, un grand absent, mais affectivement présent pour l’éternité dans la mémoire et la pensée de tous ceux qui, très nombreux, l’ont connu et aimé.
Nacer Maouche