Le troc légumes – figues sèches entamé précocément

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La haute vallée de la Soummam, dans la wilaya de Béjaïa, est une région très riche aux yeux des habitants des wilayas limitrophes, telles que M’sila, Bordj Bou-Arreridj et Sétif, pour ne citer que ces trois. Cette année, les marchands venant de ces wilayas qui échangent les légumes frais contre les figues sèches sont arrivés plus tôt que d’habitude. En effet, avant, ils attendent la fin de la campagne de cueillette des figues pour venir commercer. Mais cette année, la campagne de cueillette des figues n’a fait que commencer et voilà qu’ils sont déjà là à sillonner les routes des villages en criant : « batata, tomatiche, ifelfel esrthazarth». Da Mohand arrive de bon matin de ses champs avec un panier plein de figues fraîches et un bidon plein de figue à sécher qu’il a ramassé. « Si vous voulez prendre quelques figues fraîches pour les manger, tenez ! Pour les figues sèches vous perdez votre temps, car vous allez rentrer bredouille du fait que nous venons juste d’entamer le ramassage. Il nous faudra une bonne dizaine de jours pour les laisser sécher et les trier par la suite. N’espérez pas que les gens vont vous donner le premier choix destiné à leur consommation ou vendu au prix de 600 dinars le kg », leurs a déclaré le fellah. Les Sétifiens et les Bordjiens font de bonnes affaires dans les villages kabyles. Ce qui est certains, chacun trouve son compte dans ce marché de troc devenu légende. Les kabyles trient leurs productions en extrayant la bonne qualité qu’ils stockent pour la consommer le reste de l’année ou la vendre à des prix forts, alors que la mauvaise qualité est échangée contre des légumes. Les femmes optent surtout pour les poivrons et piments rouges qu’elles coupent en petits morceaux qu’elles laissent sécher au soleil avant de le moudre pour faire ressortir du poivron et piment moulus employés dans des sauces. Pour les Bordjiens et Sétifiens, les figues collectées, selon l’un d’eux, sont vendues à une usine de conditionnement de Ain Oulmane. Ce qui nous a été confirmé par un villageois. « Cela s’est passé dans un super marché de la ville de Béjaïa. En sillonnant les stands, je suis tombé sur une boite de figues sèches biens présentées dans un emballage où je m’attendais à lire : made in Espagne ou France. Et j’étais vraiment étonné de voir que l’usine se trouve à Ain Oulmane, dans la wilaya de Sétif. Immédiatement, j’ai pensé à ces marchands qui font le troc de légumes frais contre des figues sèches. C’est nos figues qui sont conditionnés dans ces emballages », a expliqué le villageois. Nos voisins de l’Est semblent trouver chez les kabyles un créneau porteur. Ils ont même appris certains mots kabyles qui leurs permettent de communiquer avec les vieilles femmes, lesquelles constituent pour eux, leurs clientèles. Seulement, gare aux arnaques ! En lingerie surtout ! Des fois, il vous propose un produit de tapisserie à 10.000 dinars et après négociations, il baisse le prix jusqu’à 2000 dinars. Aussi, ils s’investissent dans les collectes des produits ferreux et en plastic. Ils sont faciles à reconnaître. Ils mettent à l’avant et à l’arrière de leurs véhicules une caisse en plastic, un soulier usé en caoutchouc ou un objet en fer, précisant ce qu’ils collectent. Et c’est grâce à eux que la vallée de la Soummam est bien nettoyée dans ces domaines. « Avant, j’avais des objets en plastic et en fer qui me prenaient de la place à la maison ou dans mon jardin. Depuis que des marchands se présentent pour acheter ces objets, j’ai tout vendu. Le résultat, j’ai de la place chez moi et de l’argent », a fait savoir notre interlocuteur. Donc, la Kabylie est devenue par la force des choses une région ou rien ne se perd et tout se vend tant la clientèle arrive aux portes. Pourvu que ça dur ! Nos Voisins sont aussi de bons ouvriers qui ne demandent pas cher. Certains s’investissent dans les travaux divers car, la main d’œuvre se raréfie dans les villages kabyles. Ils creusent aussi des puits qu’ils prennent à la tâche ou à la journée.

L. Beddar

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