L’école est obligatoire de 6 à 16 ans et le tamazight est intégrée dans le système éducatif national, mais cette matière reste toujours le maillon faible. Logiquement, celle-ci devrait être obligatoire au même titre que les autres matières et pourtant rien de tel. Introduite dans le système éducatif en 1995, des suites de la grève du cartable qui a paralysé durant toute une année scolaire, l’ensemble des établissements de la Kabylie, Tamazight patine. Certes, de la cinquantaine d’enseignants qui exerçaient à ses débuts au niveau de certaines écoles de la wilaya de Béjaïa, le nombre a augmenté pour passer à près de 500 et de même pour les apprenants. Aujourd’hui, elle est enseignée dans la quasi-totalité des écoles primaires et dans de nombreux collèges et lycées. Notre tentative d’avoir des chiffres au niveau de l’académie a buté sur l’omerta des responsables de cette institution. En compagnie d’un membre de la Cellule de communication de la Direction de l’éducation, nous avons sillonné les bureaux des services de la formation, du personnel et de l’organisation pédagogique de l’académie mais sans résultat. Rejetés d’un bureau à l’autre, aucun responsable n’a daigné nous donner l’information. Nous ne pouvons, par conséquent, donner le nombre exact d’enseignants ni celui des élèves, encore moins celui des établissements où elle est enseignée. Toutefois, joint par téléphone, Tahar Aissi, enseignant de Tamazight et doctorant en sciences de l’éducation à Paris 8 (France), dira que « tamazight est enseignée dans 95% des écoles primaires et presque le même pourcentage est à attribuer aux collèges et lycées mais, hélas, pas d’une manière sérieuse du moment que le volume horaire hebdomadaire est fixé à 3 heures de cours ». Il fera remarquer qu’au primaire, tous les enseignants de cette matière donnent des cours dans deux établissements, au minimum, pour pouvoir atteindre le nombre d’horaires à dispenser par semaine. D’ailleurs, tamazight n’est enseignée qu’à partir de la 4e année du primaire alors que l’arabe l’est à partir de la 1e année et le français à partir de la 3e année. En outre, il dénoncera le comportement de certains directeurs qui ne respectent pas les circulaires ministérielles. Il étayera ses propos en disant que, non seulement, les emplois du temps ne répondent aucunement aux exigences pédagogiques (tamazight est souvent reléguée aux dernières heures de la journée) mais aussi, elle n’est, souvent, pas enseignée en classes d’examens, ce qui fait qu’au BAC, seuls quelques élèves, qui ont pu faire tout le cursus, affrontent l’épreuve de Tamazight. Sollicité pour donner son avis sur l’évolution de son enseignement, notre interlocuteur rétorquera que si, sur le pan effectif, il y a une progression, ce n’est pas le cas sur le plan de la qualité de l’enseignement dispensé. En effet, pour ce dernier, le fait qu’elle soit enseignée à titre facultatif et absentes des examens, en plus du fait qu’elle ne soit pas enseignée dans les écoles éloignées, confirme sa mise à l’écart. Il n’y a aucune prise institutionnelle sérieuse de la matière et, d’ailleurs, rajoutera-t-il, « aucun coefficient stimulateur ne lui est attribué ». Pour ce qui est des enseignants de Tamazight, il confirmera la bonne qualification de ceux formés par l’association de formation des enseignants qui avait fait un excellent travail, il y a quelques années de cela, en collaboration avec le ministère et le HCA. C’était un travail basé sur une nouvelle approche dite pédagogie de projet. Ainsi donc, contrairement aux autres matières qui sont obligatoires, le caractère facultatif endossé à Tamazight la rabaisse aux yeux des élèves qui ne s’y intéressent plus.
A. Gana