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La logistique urbaine suivra-t-elle ?

Depuis quelques années, le théâtre de Béjaïa organise un festival de théâtre, dans lequel se produisent de nombreuses troupes venues de pays divers, entre autres, européens, africains et arabes.

Ce qui donne à cet événement une stature internationale et relève l’image de la ville et du pays auprès de nombreux amateurs de cet art. A cette occasion, les moyens logistiques du théâtre régional de Béjaïa, ainsi que ceux de la Maison de la culture, entre autres, sont mobilisés pour donner au festival un maximum de moyens pour sa réussite. Seulement, l’expérience de ces dernières années montre que ledit festival a tendance à négliger l’élément principal du festival, à savoir le spectateur. Ainsi, avons-nous remarqué la prise en compte de la nécessité de toucher un maximum de spectateurs ne semble pas faire partie des préoccupations majeures des organisateurs. Le problème des heures de programmation des pièces n’est pas des moindres. La plupart d’entre elles se jouent en fin de journée, jusque tard dans la nuit. Ce timing ne correspond absolument pas au rythme de vie de la ville, qui n’a presque pas de vie nocturne. Les magasins sont fermés et les transports publics à l’arrêt dès vingt heures. Ajouter à cela, le manque d’informations et les nombreuses déprogrammations pendant le festival. Les amateurs de théâtre sont souvent déçus des conditions dans lesquelles se jouent les pièces. Il n’y a pas d’actions spécifiques en direction des familles, et les collégiens et autres lycéens n’y trouvent pas leur compte. De plus, les résidences universitaires, véritable terreau de futurs talents et vocations, ne semblent même pas concernées par l’événement. C’est du moins ce que nous avions remarqué lors des précédentes éditions. Il faudrait vite remédier à ces problèmes. D’abord, en programmant les pièces à des heures accessibles par le grand public. C’est-à-dire, vers dix-sept heures, à la sortie des écoles et des bureaux. Ce qui permettrait déjà aux jeunes de regarder aux moins quelques pièces et prendre goût à cet art qui reste inconnu de la majorité d’entre eux. Ensuite, prévoir un service de transport de nuit, assurant des navettes vers les quartiers populaires, Mangin, Sidi Ahmed, l’ancienne ville, Iheddaden, Ighil Ouazoug, etc. Il existe une entreprise publique de transport urbain dans la ville. Il conviendrait juste de la mobiliser à l’occasion de ce festival, pour donner une chance à ceux qui habitent loin de pouvoir regarder les pièces théâtrales qui se jouent en soirées. Concernant les villes avoisinantes, il conviendrait de mobiliser, sous une forme adéquate, au moins un transporteur par ligne, permettant, en fin de soirée, d’assurer le transport aux spectateurs venus de loin sans être obligés de faire appel à des taxis clandestins, dont les tarifs sont souvent prohibitifs. Qu’est-ce que cela coûterait aux organisateurs de demander aux transporteurs privés d’assurer quelques navettes de nuit, vers Souk El Tenine, par exemple, Barbacha, Sidi Aïch et Toudja ? Cet effort devra être fait, dans un souci d’équité pour que ledit festival ne soit pas réservé aux élites urbaines. Il devra descendre vers les populations les plus larges. D’un autre côté un arrêté communal pourrait bien, après avoir fait un effort de sensibilisation, venir obliger les cafés et restaurants à ouvrir la nuit, pendant toute la durée du festival. Il est honteux de ne pas trouver des lieux de restauration la nuit dans une ville comme Béjaia, ville de la lumière et de la culture. Les nombreux invités n’ont plus que les bars, cabarets et hôtels de luxe à leur disposition. Est- bien normal que le citoyen lambda ne trouve même pas un café ouvert la nuit ? Comment alors créer du partage et de la convivialité ? La vie nocturne, même si elle ne concerne pas tout le monde, a, quand même, son public qu’il convient de respecter. De plus, l’organisation d’événements comme celui d’un festival international, est une occasion en or, d’élever le standard de vie de la ville de Béjaia, pour l’aligner sur celui de ses paires méditerranéennes. Imagine-ton Barcelone, Marseille, Gênes ou Thessalonique fermant boutique dès la tombée de la nuit ! Or, Bougie est une ville trois fois millénaire. Il est temps qu’elle se réveille de son sommeil et qu’elle utilise sa bougie, non pas pour s’éclairer elle-même, mais pour apporter quelque lumière aux autres.

N. Si Yani

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