Kaci Tizi-Ouzou n’est plus

Partager

C’est triste, plus triste encore qu’une bougie éteinte, qu’un ciel sans étoiles, un monde sans rire, lorsque disparaît un artiste on sort l’armada des superlatifs, de la rhétorique au ton d’oraison, de l’emphase et de gueule de circonstance au lieu de le pleurer en silence ou carrément se taire.

D’ailleurs, cette dernière alternative serait la plus sage. Oublié durant son agonie, osons l’oublier après sa mort. N’a-t-il pas dit lors de l’hommage qui lui a été rendu le 29 mars 2013 par le théâtre régional Kateb Yacine de Tizi Ouzou que « ce magnifique geste, parlant vient combler, quelque peu, ma frustration liée au fait que sur les 6000 émissions radiophoniques que j’ai enregistrées en 30 ans de carrière artistique, à la Radio nationale, aucune n’a été archivée » ; affront intolérable à la générosité intarissable d’un artiste. « L’ingratitude, poursuit-il, est dans la nature humaine. Je ne me fais pas beaucoup d’illusions pour qu’on reconnaisse mes sacrifices d’artiste. Mais j’espère que le Tout Puissant n’oubliera pas ses créatures », a-t-il conclu désenchanté. Nous connaissons la sensibilité de l’artiste, mais pas ses péripéties existentielles, son parcours du combattant, ses hauts et ses bas, ses douleurs au demeurant fécondes. S’il nous faisait rire c’est qu’il a beaucoup pleuré. Se sont ses larmes qui ont irrigué son champ de production. Kaci Tizi-Ouzou selon le président du Conseil national des arts et des lettres, Abdelkader Bendaméche, est «cet artiste racé qui prend ce pseudonyme en 1968 et formera avec Krikèche, plus tard, un duo qui a marqué l’histoire du théâtre comique de notre pays. Il fera une autre expérience avec Hassen El Hassani plus tard également. Découvert par Mahieddine Bachetarzi dès la fin des années 50, il ajoutera son nom à la pléiade d’étoiles dans ce genre artistique, que sont Mohamed Touri, Hassen El Hassani, Sid Ali Fernandel, Belkhiter Benchaa, Papa Ali et autres plus récents, à l’image d’Ahmed Bennaceur, Ali El Kahlaoui, etc. Kaci Tizi ouzou a toujours exprimé sa solidarité avec son pays en lutte contre le colonialisme français. Militant pour la cause nationale, il n’a jamais fléchi même lorsqu’il a été emprisonné ou assigné à résidence. Avec sa longue moustache, sa tenue de campagnard et son langage populaire, il a touché l’ensemble de la population algérienne». Hamid Lourari, de son vrai nom, est né en 1931 à Béni Ourtilane (Sétif), Il était surtout connu pour son humour corrosif et son accent kabyle prononcé dans les sketches satiriques (à la radio ou sur les planches du théâtre), avec son alter ego, Ahmed Kadri, alias «Krikeche» et quelquefois avec Hassan El Hassani dit Boubagra. Il meurt après une lutte, pied à pied contre la faucheuse qui a eu enfin le dernier mot le 19 du mois courant à l’hôpital de Bitraria, à Alger. Kaci Tizi-Ouzou reste pour les Algériens un théâtre à lui tout seul, un théâtre au sens plein du terme, avec ses tragédies, ses drames et ses comédies qu’il a vécus sur et en dehors de la scène.

Sadek A.H

Partager