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Hommage à Zarouri Rachid

L’association socioculturelle Agraw, relevant de la petite bourgade Takhlidjt, distante de cinq kilomètres du chef-lieu de la commune, a pris l’initiative de rendre un vif hommage au feu Zarouri Rachid. Deux jours durant, du 5 au 6 décembre derniers, un riche programme a été concocté par les soins des membres de ladite association, accoutumée à ce genre d’initiatives, à l’image de l’hommage rendu à l’autre figure du combat identitaire, en l’occurrence Mohamed Haroune. Pour rappel, R. Zarouri est un artiste multidisciplinaire, pétri de talent jusqu’au bout des doigts. Né à Sidi-Hadj-Hseyen en 1961, un patelin perché sur un éperon rocheux culminant à plus de 850 mètres, Rachid cultivait un amour sans faille pour l’art au sens noble. Poète, peintre et sculpteur, anazur uffir (l’artiste caché), comme l’ont si bien cerné ceux qui le connaissent, ne criait pas sur tous les toits pour faire savoir tout l’amour qu’il porte à la culture d’une manière générale. Ses œuvres sont légion, dont bon nombre d’elles ne sont pas connues du grand public. En 2014, cet immense artiste s’éteint à l’âge de 53 ans, laissant derrière lui des œuvres inachevées. Sa vie de bohème, à la fois maussade et passionnée, faisait de lui un personnage atypique, décrit comme misanthrope par quelques-uns, car Rachid ne côtoyait pas beaucoup de monde et reste sur son quant-à-soi. Pour d’autres, il est décrit comme un homme de culture ayant un temps d’avance sur sa génération, préférant de loin se consacrer à sa passion de toujours, l’art avec un grand A. Rachid le rebelle, le réfractaire, le chantre de l’amour et de la liberté…des qualités intrinsèques qui ne sont pas à la portée du premier passant. « Rachid était de tout temps un ciseleur de verbe, de surcroît, en tamazight ou en français, ses vers traduisent son attachement aux valeurs humanitaires et identitaires. Discret, laconique, timide, sobre… des adjectifs qui collent à la vie du grand artiste », témoigne C. Benani, militant de la cause identitaire et ami de Zarouri. Dans la journée du vendredi, les festivités se sont déroulées au village Takhlidjt, où le buste dudit artiste est érigé au lieu-dit Lemsela, à l’entrée de son village natal, Sidi-Hadj-Hseyen. L’effigie ornant ladite placette est l’œuvre d’un autre sculpteur du village Ath-Ouragh, à savoir O. Ouramtane, ayant tenu à contribuer à l’hommage rendu au feu Zarouri. Exposition de photos, de poèmes, de toiles appartenant à l’artiste était au menu de la première journée de l’hommage, ayant lieu au siège de l’association Agraw à Takhlidjt. T. Hadibi (peintre), C. Benani et Da Mohand Oudane (amis de Zarouri) ont témoigné devant l’assistance sur la vie et le combat de Rachid. Ce vibrant témoignage élucide parfaitement les qualités intrinsèques de l’infatigable artiste et militant des causes justes que fut Rachid. La chorale Agraw a subtilement fredonné les poèmes dudit rimeur sur la scène érigée dans la placette publique appelée Ta3wint n’trammant (fontaine du grenadier). Le célèbre chanteur Boudjemâa Agraw, originaire du village Takhlidjt, était présent à cet hommage en tenant à témoigner du grand respect qu’il voue au talentueux artiste, R. Zarouri. Quant au deuxième jour, le samedi 6 décembre, la maison de jeunes de Chemini a abrité cette festivité pour mieux informer et faire connaître ledit artiste par le large public. « C’est un hommage à son âme, mais aussi à sa carrière d’artiste dévoué à son talent, à son esprit et son engagement… il demeure toujours un inspirateur pour nos troupes », peut-on lire dans le prospectus qui nous a été remis. Ce qui a retenu aussi notre attention est le recours de l’association en question à l’affichage en langue tamazight, idem pour les dépliants. « Il faut initier et habituer les gens à lire en tamazight, et en tant qu’association culturelle, il est de notre devoir de promouvoir cette langue par de simples initiatives qui peuvent paraître anodines pour certains », atteste T. Ammim en sa qualité de président de l’association Agraw. Et d’ajouter : « Les œuvres musicales de Rachid sont ressuscitées, enregistrées et éditées dans des boites professionnelles pour donner naissance à un CD de 10 titres puisés pour la plupart dans son répertoire. Pour ce qui est de la poésie, nous sommes en phase du parachèvement d’un recueil de près de 100 poèmes ».

Bachir Djaider

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