Sans gaz à plus de 1 400 mètres d’altitude

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La commune Aït Zekki, issue du dernier découpage de 1984, est située à 60 km au sud-est de la wilaya de Tizi-Ouzou, 15 km de la commune de Bouzeguène.

Elle compte aujourd’hui environ 3800 habitants repartis sur neuf villages qui sont Iguer Amrane, Boukhiar, Mansoura, Berkis, Thaourirth Bouar, Amekrez, Ath Ayed et Iguer Mehdi représentant le chef-lieu de la commune qui culmine à 1400 mètres d’altitude.

Ait Zikki, qui signifie les gens de jadis, étaient parmi les premiers à habiter la région de Bouzeguene. Cette dénomination veut dire aussi que les coutumes et les traditions sont perpétuées.

Néanmoins, la région est connue pour son isolement du monde notamment durant l’hiver marquée par de fortes chutes de neige qui dépassent parfois le 1m 30 d’épaisseur. Aucun foyer n’est alimenté en gaz naturel, commodité qui devait s’effectuer depuis 2014 ; ainsi les gens pour faire face aux affres de la saison du froid se procurent du bois dans la forêt avoisinante en procédant à une coupe anarchique des arbres.

La commune ne dispose d’aucune infrastructure sportive ni de loisir ni de projets qui permettraient de créer des postes d’emploi. «Il est plus facile de vous dire ce qu’on a que ce qui nous manque car la liste sera longue à énumérer. Nous vivons dans l’angoisse, notre quotidien n’est pas reluisant. Les autres communes nous dépassent de siècles en matière de développement. Il est pénible de voir d’autres localités se développer et nous stagner. On ne choisit pas sa terre natale et pour nous c’est dur de vivre sans aucune lueur d’espoir, on dirait qu’on ne fait pas partie de l’Algérie.» s’indigne un citoyen.

Durant notre virée aux villages, nous avons remarqué que les jeunes d’Ait Zikki sont très désespérés. Les citoyens n’ont que deux cafés où ils retrouvent en masse, sinon les dizaines de jeunes n’ont que les murs des bâtisses du chef-lieu pour tuer le temps. Sur leurs visages se lisent l’ennui et le désespoir mais surtout l’envie de s’exprimer.

Effectivement le chômage est très élevé par rapport aux autres communes dans cette contrée qui n’attire aucun investisseur vu le manque de moyens. Les dures conditions climatiques qui caractérisent la région et l’absence d’axes routiers font fuir les gens capables de créer des emplois. L’intervention de l’état pour mettre une stratégie de développent s’avère urgente selon les habitants. Un jeune, I.D., nous confie : «Je suis à l’instar de la majorité des habitants d’Ait ZikKi sans travail. J’ai postulé à maintes reprises pour un poste d’agent de sécurité à l’APC mais en vain. Les jours se suivent et se ressemblent, chaque jour, je descends à Bouzeguene avec l’argent que ma mère me donne pour couvrir les frais du transport. J’y reste jusqu’à midi et je rentre pour m’adosser au mur en compagnie de mes amis. On s’accroche pour ne pas crever. Depuis que j’ai raté mon bac, je ne vois pas d’issue. Si au moins, on avait des centres de loisirs… Je suis las de voir mon père au chômage qui peine à me nourrir et à me loger à mon âge».

«Les jeunes plongent dans le désespoir, notamment ceux qui ont fait des études supérieures et qui ont souffert pour décrocher un diplôme qui allait leur ouvrir les portes de la vie active. Ils se retrouvent vers la fin à la maison parce que un job dans le cadre du filet social est déjà difficile à trouver. Ceux qui ont les moyens sont déjà partis à l’étranger à contre cœur dans la recherche d’un avenir meilleur.» ajoute un étudiant en droit.

Le bois pour se chauffer

Cela étant dit, le plus gros problème auquel font les habitants de cette commune est relatif au gaz. Les habitants d’Ait Zikki qui vivent dans la précarité attendent toujours de passer les rudes hier au chaud chose qui devait se faire depuis déjà une année malheureusement quelques citoyens d’autres villages se sont opposés chose qui a suscité la colère des citoyens .«Nous sommes prioritaires, le président de la république avait donné instruction de commencer le raccordement par les plus hautes montagnes. On a une montagne qui dépasse les 17OO mètres et le plus haut village qui est Agueni Ifilken est à 1400 m. Tous les foyers de la daïra bénéficient de ce combustible et nous, on attend toujours que les promesses se concrétisent. Ceux qui nous font des embuches par rapport au gaz sont alimentés en eau par Ait Zikki.» Pour soulager la population, les travaux ont commencé à partir de Tabouda, selon le P/APC.

La plupart des familles ont des revenus très faibles ou inexistants et même les nantis sont affaiblis financièrement par la cherté de la vie en particulier durant l’hiver. «La benne de bois est cédée à 9000 DA et pour ceux qui s’en procure de la foret, la coupe et le tracteur qui le transporte reviennent tout aussi cher. Ceux qui utilisent des poêles à mazout se plaignent aussi surtout en période de pénurie.» raconte un maçon.

«Je perçois une pension mensuelle de 15000 DA, j’ai six enfants et quatre petit enfants et leur mère à charge parce que le père des petit est en chômage. J’ai un fils âgé de 40 ans, victime de troubles psychologiques suite à un accident qu’il a eu lors de son service militaire. Il ne touche comme indemnité que 4000DA le mois et ses médicaments reviennent à 13 millions de centimes par an. Je vous jure que je ne mange la viande qu’une fois par an ! On ne peut se permettre des fruits et les autres produits laitiers. Où sont nos responsables ? On est oublié dans cette région qui a sacrifié ses meilleurs enfants pour la libération de ce pays.» regrette un retraité. Dans un autre registre, la région compte deux dispensaires : un à Akhendouk n’ Tizi et l’autre à Iguer Amrane rénovée récemment. Un médecin assure des consultations et uniquement les dimanches et encore soit le matin soit l’après-midi pour une ou deux heures de travail du moment qu’il ausculte le même jour à la polyclinique de Louda. Les patients sont obligés d’aller jusqu’à la Polyclinique de Louda pour le moindre soin et quand c’est grave, ils doivent se rendre à l’hôpital d’Azazga. «J’ai loué un fourgon pour emmener ma femme à la polyclinique, il fallait une heure pour y arriver et là on l’a transférée en urgence à Azazga.» s’indigne un citoyen. Il faut le dire que le manque du tyransport se fait également ressentir dans cette commune. Pour arriver à la mairie qui se trouve à d’Ait Zikki qui compte 24 fourgons, il faut patienter 75 minutes dans le fourgon à attendre jusqu’à ce que toutes les places soient occupées pour passer encore quarante 40 minutes dans le trajet. «Je suis venu acheter des médicaments pour mon fils qu’il doit normalement prendre avant midi. Il est 14 H 00 et le fourgon bouge toujours pas. Elle est où la loi qui dit que le fourgon a le droit de stationner 15 minutes, sinon il quitte les lieux ? On paie 35 DA et c’est comme si on nous rendait service, et ils se permettent de nous dire sans scrupules : «Les routes sont impraticables ! Qu’est ce que je fais avec vos 35 DA si j’endommage une pièce.» s’indigne un père de famille.

Les écoles fermées durant un mois !

Durant les dernières intempéries, les enseignants du primaire qui n’ont pas pu rejoindre les établissements à cause de la neige ou du verglas n’ont pas donné de cours pendant à peu prés trente jours. «La majorité des enseignants viennent d’autres communes ce qui fait que même pendant les jours ensoleillés, ils arrivent en retard, une heure et des fois plus pour le début des cours.» raconte une citoyenne.

Le CEM qui a été construit en pré- fabriqué a été fermé puis démolie de crainte de maladies dues à l’amiante, ce qui fait qu’excepté les élèves de Mansoura et Boukhar qui étudient à Houra, les autres sont contraints de se déplacer vers d’autres CEM plus éloignés en attendant que le CEM qui est en cours de construction soit prêt. Heureusement que le transport est assuré par l’APC. Cette une instabilité a eu des conséquences chez ces enfants de cette localité qui enregistre un taux d’échec scolaire alarmant. Sinon pour le lycée, c’est à Bouzeguene et à Loudha que les jeunes sont admis bénéficiant pour certains d’internat au lycée des frères Hanouti. Concernant l’environnement, Tous les villages d’Ait Zikki disposent de décharges ce qui fait qu’ils ont où jeter leurs déchets mais d’une manière sauvage et anarchique à l’image de Thaourirth Bouar qui a atteint une situation qui inquiète le P/APC qui envisage de mettre à la disposition des citoyens une décharge communale et des centres de tri. En outre, le retard en raccordement au gaz naturel traîne et les citoyens pour se chauffer s’adonnent à une coupe de bois qui dévaste sérieusement la forêt.

Un trésor touristique

La commune d’Ait Zikki compte plusieurs sites touristiques uniques au monde qui attirent de plus en plus de visiteurs à l’image d’Azrou Thankrith où on compte réaliser un lac artificiel Aswel qui peut concurrencer Tikdjda, la grotte du lion, le col de Cherea. M. Moussaoui Boualem P / APC a voulu construire dans cet endroit une pompe à essence dans le but de sauver des vies qui durant les tempêtes de neige Chose que les gens même les étrangers ont découvert lors du festival préparé il y a quelques temps. «Avec une aide de l’état et la contribution des citoyens, le tourisme pourrait apporter un plus à la région d’Ait Ziki qui sera un paradis terrestre notamment en été», souhaite le maire de la commune.

Fatima Ameziane

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