Les robes noires débrayent

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«Nous avons trop supporté et aujourd’hui, nous avons décidé d’observer un arrêt de travail de trois jours dans l’espoir d’être, enfin, écoutés» dira, de prime abord, Maître Mohand Saïd Djennadi, bâtonnier de Bejaïa, lors de sa prise de parole, hier matin, devant ses confrères qui observaient un piquet de grève à la cour de Bejaïa. Au même moment, des rassemblements sont organisés au niveau de tous les tribunaux de la wilaya de Bejaïa en plus d’une heure d’arrêt de travail qu’observeront tous les avocats, au niveau national, en guise de solidarité avec la corporation de Bejaïa. Lors de l’assemblée générale des avocats de la région de Bejaïa, tenue le 14 du mois courant, il a été décidé d’un arrêt de travail de 3 jours, du 23 au 25 février, en contestation de la situation professionnelle des avocats. Dans son communiqué l’ordre régional des avocats de Bejaïa dénonce le retard incompréhensible dans le réaménagement des tribunaux saccagés lors des événements de janvier 2011, le manque flagrant de l’encadrement au niveau des juridictions dépendantes de la cour de Bejaïa, la non prise en considération des préoccupations soulevées par la défense et, enfin, l’indifférence des autorités quant à la doléance relative à la mise à disposition d’une parcelle de terrain pour la construction du cercle des avocats. Pour ce dernier point, Me Djennadi, que nous avons rencontré dans son bureau du bâtonnat, peu avant sa prise de parole, dira que toutes les cours du pays ont eu leur parcelle de terrain dont certaines ont achevé le projet alors que la corporation de Bejaïa qui n’a pas cessé de quémander un terrain à l’achat au prix étatique n’a reçu aucune suite. Concernant le réaménagement des tribunaux, le bâtonnier s’offusquera que les travaux soient lents et dont le plus avancé le tribunal de Kherrata en l’occurrence, n’est qu’à 50% de taux d’avancement. Dans cette ville, en l’absence d’un tribunal, les séances se déroulent dans le hangar d’une usine dans lequel tout le monde, y compris les magistrats, doit supporter un temps glacial en hiver et une fournaise en été. Pour l’orateur, les conditions de l’exercice de la fonction d’avocat dans la wilaya de Bejaïa ne sont pas réunies. «On doit être bien servi au niveau des services du greffe et écouté par le juge si, réellement, on est considéré comme des partenaires de la justice à moins que l’on soit, plutôt, considéré comme des intrus» soulignera-t-il. L’histoire du manque de fonctionnaires est toujours avancée comme argument pour les retards engendrés et autres lacunes tels que les dossiers relevant du criminel qui sont parfois incomplets alors que la même copie doit être remise au juge, au procureur et à l’avocat de la défense, fera remarquer notre interlocuteur. Au ministère de recruter d’autant plus que plusieurs diplômés universitaires sont au chômage. Les droits de l’homme sont bafoués par manque de personnel, soulignera Me Djennadi, qui enchaînera en dénonçant l’absence d’interprètes pour les clients qui ne maîtrisent pas la langue arabe alors que le droit à la défense est un droit constitutionnel. En conclusion de son intervention, le bâtonnier appellera ses confrères à la vigilance tout en s’engageant, avec la solidarité de tous, de ne reprendre le travail qu’après avoir reçu des promesses concrètes d’amélioration des conditions de travail.

A. Gana

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