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La haute ville prochainement rénovée

Une réunion a été organisée avant-hier, réunissant les principaux opérateurs de la restauration du bâtiment de l’ancien tribunal de Béjaïa.

C’est dans la Bibliothèque de la Casbah que la rencontre s’est déroulée. Le président de l’Association pour la Sauvegarde du Patrimoine de Béjaïa, organisateur de l’événement, a ouvert la séance en annonçant l’ordre du jour. Il s’est adressé aux deux animateurs, celui du Bureau d’Etudes Technique, et celui de l’Entreprise de réalisation des travaux, les invitant à présenter à l’assistance, le projet dans son ensemble et de faire le point sur l’état d’avancement de ces travaux. Le public a été nombreux et la salle de bibliothèque a vite été débordée par le nombre de participants, dont une partie est restée debout. A titre de rappel, le bâtiment qui abritait autrefois le tribunal de la ville de Béjaïa est une construction coloniale. Elle fait partie des repères architecturaux de la ville, de par la beauté de sa façade extérieure. Les Bougiotes le considèrent, à juste titre d’ailleurs, comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Dès les années soixante-dix, des fissures ont commencé à apparaître dans ses murs. Mais durant les années 2000, ces fissures ont commencé à s’aggraver. Les employés dudit tribunal entendent de plus en plus souvent des craquements inquiétants et le nombre de fissures allait en augmentant, ce qui a poussé les autorités à prendre la décision de l’évacuer. Plusieurs administrations ont alors voulu récupérer l’édifice, chacune y allant de son projet : musée, bibliothèque,… C’est finalement le ministère de la Défense qui l’a obtenu, sans toutefois l’occuper. Quelques temps plus tard, les autorités militaires ont restitué les clés qui ont été récupérées par le ministère de la Culture qui a décidé de le transformer en annexe de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts d’Alger. Le nombre d’étudiants de cette école, qui sont originaires de la région de Béjaïa, a convaincu les responsables de ce ministère d’ouvrir cette annexe. Des travaux de confortement ont par la suite été ordonnés, mais il semblerait qu’il y ait eu quelques erreurs d’évaluation dans la réalisation des travaux. Ce qui aurait provoqué l’effondrement de l’aile droite du bâtiment. Selon monsieur Djermoune, archéologue de métier, directeur de la circonscription archéologique de Béjaïa à l’époque, et qui en a fait l’expertise : «Il y a eu des problèmes dans la construction du bâtiment dès l’origine». Ainsi, il aurait trouvé une mauvaise qualité de ciment et de liant, qui auraient été mélangés avec de l’argile. Tout comme il aurait également trouvé des défauts dans la réalisation de la structure elle-même. Karim Khima, président de l’Association «Ardh» a aussi dénoncé la décision «irresponsable» de déraciner le Ficus, l’arbre qui servait à stabiliser l’édifice. Son abattage aurait contribué à causer les dégâts que l’on sait, ainsi que l’utilisation – ce fut le huit Mars 2011- de gros engins de chantiers, inadéquats dans les opérations aussi délicates, qui demandent d’intervenir avec beaucoup de précautions et de douceur. Après cela, la Direction de la Culture a pris la décision de désigner un nouveau bureau qui a refait les études et les a approfondies. Suite à quoi une entreprise a été sélectionnée pour mener à bien les travaux de restauration. Ce fut l’entreprise Ait El Djoudi, dont le premier responsable est archéologue de formation. Dans un premier temps, monsieur Yaya, directeur du Bureau d’Etudes Techniques, a présenté les données relatives au processus de réfection du bâtiment en question. Certains détails techniques ont été présentés à l’assistance pour expliquer un certain nombre d’actions qui sont menées par l’entreprise de réalisation, sous la direction de son BET. Ainsi dira-t-il, avant leur intervention, il y a avait déjà une quarantaine de pieux qui devaient servir à stabiliser l’édifice. Une quinzaine seront ajoutés, pour s’assurer du résultat. Le sol, dira monsieur Yaya, est très instable. Il est constitué de remblais sur une distance allant jusqu’à dix-sept ou dix-huit mètres. Seuls les pieux peuvent assurer la stabilité du bâtiment. Il existe, bien entendu, d’autres solutions, mais elles sont plus coûteuses. Après étude, son BET a pris la décision de démolir toute la partie du bâtiment qui avait été endommagée, en prenant soin de l’isoler de l’autre partie qui est restée saine. L’entreprise de réalisation aura alors pour mission de reconstruire à l’identique, afin de respecter la cohérence générale de l’édifice. Il est prévu également le drainage des eaux qui coulent au-dessous du bâtiment. De plus, la nouvelle structure répondra entièrement aux exigences des normes parasismiques. Les études réalisées par le BET de monsieur Yaya ont été approuvées par le Contrôle Technique de la Construction, le CTC qui a donné son accord pour la méthode choisie. Toutes les exigences réglementaires ont ainsi été respectées, selon ce responsable. Mais aussi bien lui, qui est architecte de formation et son ingénieur qui a pris la parole, ont tenu à rappeler que le risque zéro n’existe pas. Acceptant ainsi l’idée que le bâtiment risquerait quand même d’être à nouveau endommagé même si toutes les précautions ont été prises pour que cela n’arrive pas.  Reprenant la parole, le président de l’Association pour la sauvegarde et la promotion du patrimoine culturel de la ville de Béjaïa, a déclaré que la reconstruction de ce bâtiment n’est qu’une opération pilote. Dans les prochains mois, a-t-il dit, Béjaïa va devenir un immense chantier, puisque les travaux de rénovation et de restauration de la haute ville vont démarrer. Des quartiers comme «Houma Karamane», «BabEllouz», et «La Rue du Villard» vont subir de grands travaux. Et le chantier de l’ancien tribunal permettra certainement de tester le savoir-faire des entreprises locales. La rencontre a duré plus de deux heures. Nombreux ont été les spécialistes, tant en hydraulique, qu’en restauration de bâtiments anciens qui sont intervenus, soit pour poser des questions, soit apporter leur contribution au débat serein qui a été instauré. De simples citoyens sont également intervenus, pour exprimer leurs inquiétudes quant au devenir de ce bâtiment qui participait amplement à la beauté de la ville de Béjaïa. Enfin, Les organisateurs de cette rencontre ont promis de faire le point de façon régulière sur l’état d’avancement des travaux. L’Association organisatrice de l’événement, entend ainsi maintenir une certaine pression sur les acteurs de ce chantier, afin de s’assurer que les travaux soient réalisés dans les meilleures conditions.

N. Si Yani

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