Défis contre velléités

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Le premier Conseil des ministres de l’année 2006, qui a vu le retour du président Bouteflika à la gestion directe des affaires publiques après sa maladie, a été majoritairement consacré au programme de développement du Sud. L’intérêt accordé à cette partie du territoire national, laquelle représente environ 80% du territoire et qui produit la première et presque unique richesse d’Algérie, n’a jamais été à la hauteur des ressources qui y sont produites ni des potentialités avérées mais restées en friche et que recèle le Sahara algérien. Depuis la réalisation de la transsaharienne dans les années 1970, aucune infrastructure de taille n’est venue faciliter la vie des populations du Sud ou renforcer la mobilisation des facteurs de développement et de production. Sans aller jusqu’à établir des comparaisons saugrenues avec la Californie, un pays désertique domestiqué et humanisé depuis le 19e siècle, il est quand même affligeant de constater que l’une des communes les plus riches d’Algérie, qui nous fournit les moyens de nos importations, soit ravalée au statut d’enclave qui n’a même pas l’heur de servir, comme jadis, de défouloir au désir d’exotisme des touristes occidentaux. Nous pensons bien sûr ici à Bordj Omar Driss (ex-Fort Flatters) dont le territoire comprend les champs pétroliers de TFT (Tinfouyé-Tabenkort). Elle n’est pas la seule à vivre la situation de misère et de chômage au milieu de richesse sonnante et trébuchante assurée par l’or noir.Des velléités de rendre justice à la région et de démultiplier les capacités d’exploitation de ses potentialités ont été nonchalamment exprimées par les pouvoirs publics au cours des dernières années. Mais, ce n’est qu’avec le Conseil des ministres d’avant-hier que des mesures concrètes et judicieuses ont été prises pour orienter les efforts de développement dans ces vastes territoires qui pourront constituer l’Algérie de demain pour des populations trop concentrées dans 13% du territoire du Nord (côtes et monts du Tell). Ainsi des mégaprojets, relevant naguère du mythe, vont trouver des possibilités réelles de réalisation : exploitation des eaux souterraines de In Salah et leur adduction sur Tamanrasset ; installation d’une raffinerie à Adrar, introduction du rail par le prolongement de la ligne de Touggourt jusqu’à Bechar en passant par Hassi Messaoud, Ouargla et Adrar ; construction de la Nouvelle-ville de Hassi Messaoud,…etc. En tout, ce sont pas moins de 377 milliards de dinars en programme complémentaire que le gouvernement va injecter dans le développement du Sud à partir de cette année. Pour ‘’relever le défi des distances et asseoir une judicieuse politique d’aménagement du territoire’’ (dixit Bouteflika), les pouvoirs publics ont inscrit le développement du Sud, touchant dix wilayas, en continuité naturelle du programme Hauts Plateaux dont les détails sont prévus dans quelques mois par M. Medelci, ministre des Finances. Ce dernier, au cours du journal télévisé d’avant-hier, a aussi expliqué les modalités pratiques de l’incitation à l’investissement dans ces régions désertiques : exemption fiscale sur dix ans et bonification des taux d’intérêt créditeurs pour les entreprises de réalisation. Mieux vaut tard que jamais, clameront tous ceux- populations, nouveaux investisseurs agricoles, prestataires de services en transport, agents voyagistes…- pour qui les écueils liés à la nature du terrain et à la rudesse du climat constituent des facteurs insurmontables sans l’intervention de la collectivité nationale. De plus, sur le plan de la stratégie économique, la mise en valeur des territoires du sud constitue, à n’en pas douter, une voie de pénétration vers les marchés du continent africain. La transsaharienne était supposée relier la Méditerranée au Golfe de Guinée. Alger-Lagos ou Alger-Abidjan, est-ce un rêve farfelu ?

Amar Naït Messaoud

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