Bien évidemment, le combat pour la liberté de la presse continue tous les jours, quand bien même des acquis ont été arrachés par le martyre de beaucoup de nos confrères. Bien évidemment, c’est fondamentalement la liberté de la presse qui est garante d’une démocratie réelle. Bien évidemment, il est du devoir de tout un chacun, notamment des professionnels de la presse, de s’opposer aux muselières… Toutes ces vérités sont indiscutables et sont, sans aucun doute, partagées par toutes les bonnes fois. Mais c’est dans cet esprit de conquête de plus de libertés que les correspondants de presse de Bouira, par le biais du SNJ local, ont décidé de saisir l’occasion de la journée du 03 Mai pour dénoncer les conditions dans lesquelles ils travaillent. Le mot d’ordre de l’action était «Pour la dignité du correspondant de presse. Pour la liberté de la presse. En hommage aux martyrs de la profession». Dans le document du SNJ-Bouira appelant à la marche il est souligné : «Nous sommes, ces centaines, ces milliers de correspondants de la presse écrite qui travaillent dans l’ombre, ces soutiers de la presse qui font le journal à hauteur de 70% mais qui sont les moins payés, les moins considérés». Plus loin dans le même document et encore plus explicitement : «Non à la marginalisation. Non à l’exploitation du correspondant et du pigiste de la presse. Oui à une équité salariale. Oui pour une déclaration à la sécurité sociale pour tous». On ne peut être plus clair ! Tous les correspondants de Bouira ont salué cette initiative, même si, de peur de représailles, beaucoup de correspondants n’ont pas marché. L’ensemble de mes collègues de la Dépêche de Kabylie, dont cinq sont affiliés au SNJ, ont répondu à l’appel. La matinée du 03 mai, nous étions au rendez-vous des préparatifs. Etaient aussi au rendez-vous des invités venus d’Alger dont un président de la ligue des droits de l’homme et un jeune activiste. Ceci ne nous posait aucun problème, tant que ce beau monde marchait derrière l’esprit de l’appel du SNJ-Bouira. Nous craignions, à vrai dire, le détournement médiatique au détriment du correspondant de presse qui pour une fois avait une tribune, sa tribune, pour hurler son ras-le-bol. Une petite polémique a eu lieu à propos du slogan retenu sur une pancarte. Tout de suite, mon jeune collègue avait réagi, s’ensuivra ma réaction et celle d’autres correspondants de presse travaillant pour d’autres quotidiens. L’incident sera tout de suite clos au profit de l’esprit de l’action. Au terme de la marche, après lecture de la déclaration dans les trois langues, et contre toute attente, la parole est prise par les invités. Et plouf ! La voix du «soutier» de la presse est encore étouffée par les détecteurs de bonnes vagues à surfer. Ce que nous craignions arriva. Le lendemain, nos «confrères», puisant dans leur éthique et leur professionnalisme, nous servent du : «Ce comportement des journalistes de La Dépêche de Kabylie s’explique par un excès de zèle qui donne une très mauvaise image à ce noble métier de journaliste», «A signaler que certains correspondants d’un journal proche du pouvoir se sont opposés au déploiement de quelques pancartes sur lesquelles on pouvait lire «Il ne peut y avoir de liberté de presse dans un Etat non démocratique». Et bien entendu on nous a sorti du «M. Benyounès», du «Ministre de la pub» et autres leitmotivs ringards qui font le bonheur médiatique et éphémère de leurs auteurs à travers la «minute Facebook». Ce sont là les faits, tels qu’ils se sont passés la journée du 03 Mai. Le reste relève de la pathologie médiatique. Un proverbe du terroir dit : «si je te connaissais pas mon&hellip,; je te prendrais pour un canon». Vous avez dit journal proche du pouvoir ? Votre serviteur et ses collègues sont fiers de travailler pour La Dépêche de Kabylie.
Tahar Ould Amar
