Les citoyens et le comité du village d’Ath Sidi Ahmed, relevant de la commune de Aïn El-Hammam, sis à 10 km, côté Sud Est, viennent d’organiser, vendredi dernier, une journée commémorative, des massacres du 14 mai 1957 et ce pour que nul n’oublie les atrocités de la guerre perpétrées par l’armée coloniale. C’est un des villages les plus martyrisés de la région et du pays et qui a inscrit son nom dans l’histoire de la guerre de libération nationale. Etant conscients de l’importance et de l’impact de cette journée qui a marqué à jamais ce village et ses nombreux citoyens, les organisateurs ont concocté un riche programme spécialement à cet effet. Pour l’ouverture, dépôt de gerbe de fleurs et lecture de la Fatiha au niveau de Thakhamth Izem, lieu où sont tombés les martyrs. S’ensuivirent des témoignages des nombreux moudjahidine qui connaissent le village en question. Pour rappel, Ath Sidi Ahmed est l’un des premiers villages de la Kabylie à avoir été bombardé au napalm et à avoir subi, en l’espace de deux ans, trois (03) bombardements. Le premier, en mai 1957, le second en février (06) et le dernier bombardement, le 26 septembre 1958. Ces bombardements ont fait 57 victimes. Toujours, suivant la politique de la terre brûlée, mais aussi, vouloir faiblir la révolution, l’armée française avait usé toutes ses forces et actes possibles et imaginables. Les témoignages troublants rapportés par les moudjahidine ont montré la férocité de l’armée française pour mater et apeurer la population. D’emblée, et dès les premières heures du déclenchement de la guerre, ce village a répondu présent et a fait office de refuge des moudjahidine. Les blessés y trouvent repos, soins, nourritures durant des nombreux jours. Toujours dans cet élan de commémoration, les témoignages pleuvent de partout. Chacun, se souvient encore de cette date fatidique (du 14 mai, 1957), 17 martyrs sont tombés au champ d’honneur sous les bombardements de l’armée française, appuyée par l’aviation. Dès 08 h 00 du matin, de ce 14 mai, les bombes pleuvaient de partout, dira Aït Ou M’hand El Hocine, seul rescapé de cette fameuse bataille où a péri un capitaine de l’armée française. Cet ancien condamné à mort, moudjahid de la première heure, raconte avec émotion, les événements de cette longue journée. Il affirme que la raison de ce massacre est le sabotage de l’axe menant vers l’hôpital de Aïn El-Hammam (ex-Michelet). «Une mission que nous avons accomplie avec un groupe de 18 moudjahidine, entre minuit et 3h 00 du matin. Nous avons rebroussé chemin pour nous replier dans notre village, à savoir Ath Sid Ahmed. Et vers 8h00 du matin, les bombardements ont commencé appuyés par l’aviation. Aucune chance de s’en sortir, car nous étions encerclés de tous côtés. Voyant tous mes frères morts, j’essayais de riposter. Première balle, j’ai tué le capitaine français. Ces derniers avaient aussitôt riposté avec des pilonnages plus nourris. Je me suis trouvé sous des débris. Je suis fait prisonnier à la prison de Barberousse et condamné à mort.», raconte-t-il. A la fin de la guerre, il a été libéré. Un habitant s’approche de nous, larmes aux yeux et nous dit : «Nous devons parler de chaque martyr et de chaque bataille pour qu’on n’oublie pas que c’est grâce au sang des chouhada que l’Algérie est libre. C’est notre devoir !» Et d’ajouter, gorge serrée : «Je me souviens très bien de cette journée du 14 mai 1957. Elle est gravée dans ma mémoire à jamais. Je devais avoir 10 ou 12 ans, quand après la fin des bombardements, l’armée nous a rassemblés à la place du village. Soudain, ils amènent mon cousin, pour le torturer devant nous mais il n’a soufflé mot sur son père et son frère, activement recherchés, malgré les sévices infligés. A la fin, de cette longue journée, l’armée l’avait brûlé vif, devant tous les villageois. Comment voulez vous oublier cette journée ou ces événements. Il faut que nous leur rendions un vibrant hommage digne de ce nom.»
Y.Z