L'entreprise au cœur du débat

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Le remaniement gouvernemental intervenu jeudi dernier a fait introduire dans le cabinet de Abdelmalek Sellal une dizaine de "nouveaux visages&quot,; mais dont certains ne sont pas des inconnus du public et de l'opinion.

Ainsi, en est-il de Abderrahmane Benkhelfa à qui est revenu le stratégique poste de ministre des Finances. Ce grand département vient d’être renforcé d’un ministère chargé du Budget et de la Prospective qu’occupe Hadji Baba Ammi. Il faut dire qu’avec la prospective, l’Algérie a frayé pendant quelques mois, mais sans grand bruit, puisqu’elle n’a pas été appelée à la rescousse. Ainsi, les structures administratives relatives à ce créneau de la connaissance et de la prévision économiques, mises en place sous le gouvernement Ouyahia- à l’image du Commissariat général à la Planification et à la Prospective, dirigé par le grand économiste Sid Ali Boukrami, et du Secrétariat d’État aux Statistiques et à la Prospective, dirigé par Bachir Messaitfa -, on en a fait…l’économie! Elles ont été démantelées presque aussitôt installées. Il est vrai que le pétrole caracolait au-dessus de 120 dollars le baril, et que le prospective avait une perspective déformée par cette embellie qui nous a joué bien des tours. Le nouveau ministre des Finances prend son poste dans un moment crucial de la gestion du budget de l’État. Il trouve la loi de finances 2015 déjà entamée dans son exploitation, dans ses deux rubriques: « recettes » et surtout « dépenses ». Le baril peine à reprendre le souffle sur les marchés mondiaux; il se « stabilise » ces derniers jours entre 59 et 62 dollars le baril. Le grand argentier du pays est appelé à élaborer la loi de finances complémentaire, pour laquelle on attend des signes de détente du marché pétrolier. Du moins, c’était l’attitude du gouvernement jusqu’à la semaine passée. Le gouvernement Sellal, même s’il a initié des mesures de rationalisation des dépenses (licences d’importation, annulations de certains projets jugés « non indispensables »), trouve mille difficultés à se lancer dans la vraie diversification économique, qui suppose des investissements tous azimuts, y compris dans certains produits pétroliers, via l’industrie pétrochimique. Le tourisme, l’agriculture, l’agro-industrie, l’artisanat, attendent des plans de relance qui ne peuvent être mis en branle qu’avec des entreprises algériennes solides, publiques et privées, et des entreprises étrangères dans le cadre du partenariat. Le climat des affaires demeure morose. Toute une littérature a porté sur le climat d’investissement depuis au moins les trois dernières années. Les tripartites, les organisations patronales et les experts se sont largement exprimés sur le sujet, sans que le mouvement s’enclenche de façon décisive. Le nouveau code des investissements n’est pas encore adopté bien que ses grandes idées remontent au temps de Cherif Rahmani, puis de Amara Benyounès lorsqu’ils occupèrent, entre 2012 et 2013, le poste de l’Industrie. Abdessalem Bouchouareb, reconduit dans le nouveau cabinet Sellal, est sur tous les fronts pour asseoir des partenariats et attirer les investisseurs. Y réussira-t-il? L’épreuve du crédit du gouvernement passe imparablement par ce bond attendu dans la levée de la dépendance du pays vis-à-vis des hydrocarbures. L’incitation à l’exportation de produits hors pétrole a aussi fait l’objet de journées d’études et de vulgarisation. Néanmoins, il faut souligner que, au centre de toute la stratégie de la relance économique et d’ « autonomisation » de l’économie par rapport aux recettes en hydrocarbures, se trouve l’entreprise. Oui, l’Algérie doit passer par l’ « école de l’entreprise ». Fonder une entreprise, la faire prospérer, la rentabiliser, est une science que l’on a tendance à oublier en Algérie. Pourtant, les écoles de management et de marketing commencent à s’étendre dans le pays. Si on oublie un seul instant que l’entreprise, avec ses environnements interne et externe, est au cœur de l’économie, on aura tout raté. Le management des entreprises algériennes demeure encore insuffisant. La gestion des ressources humaines, également. La formation, telle qu’elle est assurée à l’université est largement lacunaire. Le nouveau ministre des Finances, Abderrahmane Benkhelfa, dont nous avons rapporté dans notre journal beaucoup de critiques et d’analyses qu’il formulait en sa qualité d’ancien délégué général de l’Association des banques et établissements financiers (ABEF), parlait, par exemple, du rôle de la connaissance des langues étrangères dans les entreprises, en ces termes: « La dimension linguistique est un élément de compétence dans ce milieu [entreprise] (…) L’usage des langues universellement utilisées, notamment l’anglais, dans ce secteur [bancaire], nous impose de prendre des cours au niveau de nos établissements. Les cours de langues étrangères, mais surtout l’anglais, sont considérés aussi importants que les cours sur les techniques bancaires(…). Pour mener à bien sa carrière et aller loin dans sa vie professionnelle, il faut avoir au minimum, un Smig linguistique ».  Quelle perspective va s’ouvrir sur le monde de l’économie et de l’entreprise avec le nouveau staff gouvernemental?

Amar Naït Messaoud

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