Le marché est l’espace-temps du petit peuple. L’endroit où activent tous ceux qui n’ont pas de salaire de rente régulière. Les petits commerçants de toutes les branches, les paysans, les artisans, les éleveurs, les marginaux dans toute leur variété s’y retrouvent.“Le souk, c’est ma vie. Mon monde à moi avec ses couleurs et ses parfums. Je m’imagine mal dans un bureau, à travailler dans la paperasse durant huit heures par jour, dans le même décor, les mêmes meubles, sous les ordres de la même hiérarchie ! J’étoufferai à coup sûr. Le marché, ce n’est pas confortable, c’est même parfois dangereux, mais la satisfaction que procure le contact, L‘échange, la variété des citoyens et des lieux par tous les temps est un bien être introuvable dans l’administration malgré son confort apparent” affirme Abdenour, un détaillant d‘oursons en peluche résumant la personnalité hors normes de ces marchands ambulants marquée par le besoin de grand air et de liberté.La gadoue des dernières semaines a séché. Des milliers de chaussures la pilent, la triturent et la soulèvent en légère poussière que le petit vent de ce mercredi 16 mars éparpille pour la coller aux vêtements, et la déposer en fine pellicule mordorée sur les carrosseries des centaines de voitures stationnées dans le parc Assam séparé du chemin de fer par une imposante haie de cactus et une piste qui attend un revêtement depuis l’ouverture de ce marché au milieu des années 80.La sortie du parking constitue l’accès sud de l’immense marché de Tazmalt qui se tient les mercredis et les jeudis des 52 semaines de l’année. Par superstitution ou tout simplement par peur intériorisée, nous évitons l’entrée nord-est, définitivement marquée par l’explosion d‘une bombe posée par des terroristes le mercredi 15 mai 2002, et qui avait alors endeuillée la région avec quatre morts et de nombreux blessés.
Entre les étalages d’électroménager, de la hifi et de l’informatique, trône, originale la boutique de l’herboriste avec ses fioles ses planches, ses potions magiques et le grésillement de son haut parleur. Non loin de là, au bout de l’allée, des tisserands évoquent avec leurs coupons fleuris la douceur et la beauté féminines.
La première perpendiculaire est l’allée des chausseurs avec ses milliers de cartons déchirés, des boites, des sachets de plastique jetés à terre sans retenue. Elle jouxte, le grand espace du bois. Des centaines de portes, de fenêtres, portails et vasistas, adossés à la clôture de fer forgé forment à côté des meubles neufs de toutes formes, un camaïeu jaune, dérangé dans son uniformité par les grumeaux multicolores que constituent les camions garés dans un ordre approximatif. Ebénistes et menuisiers donnent du dos à l’abattoir d’où émanent des odeurs de mort, de tripes, de sang frais de bouse, de bestiaux rendant le dernier râle. Les bruits du marché sont pluriels : cris gutturaux incompréhensibles, appels répétés, klaxons, bêlements et mugissements sourds, chants forts, grésillement de porte-voix tremblotants entrecoupés de messages et de réclames.
Herboristes ou charlatans ?Nous prenons sur notre gauche, empruntant le réduit laissé aux passants par la charrette d’un gargotier, l’état d’un bonnetier et les longues tables d’un vendeur de dattes. Les entrés sont des endroits stratégiques que se disputent les marchands. A défaut d’emplacement fixe, c’est le plus matinal qui dicte ses règles et tous s’en accommodent. A droite c’est le marché des viandes, un espace sombre, couvert que les paysans n’aiment pas beaucoup. Le métier de boucher n’a pas une bonne réputation dans l’échelle des valeurs de la culture kabyle. Il a toujours été considéré comme le refuge des déclassés sociaux, et de tous ceux qui ont une dette envers la société. Cette vision est demeurée dans l’imaginaire populaire, comme la cause de craintes que le consommateur développe face au boucher.Entre les étalages d’électroménager, de la hifi et de l’informatique, trône, originale la boutique de l’herboriste avec ses fioles ses planches, ses potions magiques et le grésillement de son haut parleur. Non loin de là, au bout de l’allée, des tisserands évoquent avec leurs coupons fleuris la douceur et la beauté féminines. Les brocanteurs lancent, dans un désordre curieusement harmonieux, leur marchandise faite de bric et de broc et l’horloger ambulant étale sur deux tables de plastique, nonchalamment, son joyeux bric à brac.Aedes ou charlatans, les vendeurs d’herbes médicinales sont de redoutables orateurs. Maîtrisant la symbolique populaire, faisant appel aux valeurs du machisme ancestral, ils jouent, persuasifs, sur les craintes, les angoisses et les rêves qui hantent la plébe, les esprits irrationnels des classes populaires. Flatter, valoriser, requinquer un auditoire en mal de considération parler, parler encore, pour endormir la vigilance des badauds et vendre quelques fioles de placebos inoffensifs. Prétendre redonner de la vigueur à un nouveau marié, frappé d’une soudaine impuissance, raffermir les jambes d’un poly arthritique, remettre debout un vieux grabataire, rendre inopérants et dissoudre tous les maléfices qu’une rivale, jalouse, a réussi à faire au plus bel homme du quartier, combattre avec efficacité le mauvais œil en délivrant sur place des amulettes personnalisées; Voilà entre autres, quelques miracles accomplis par l’herboriste médecin.“Pourquoi donc le prophète Mohamed (QSSSL), nous a interdit la consommation de viande de porc ?” questionne le redoutable herboriste qui se fait appeler leqbayli n’attendant visiblement de réponse de personne.Maître des techniques de communication empiriques apprises au contact du petit peuple, l’herboriste ne répond jamais à ses propres provocations. Il ravive les tabous, fait renaître tous les totems gravés dans la mémoire et la culture de la région. il fait appel, aux mausolée “O sidi El Moufaq, ô sidi Yahia El Aïdli, j’en appelle à votre protection. Le citoyen a mal. Tous mes actes ne sont que des tentatives, il vous appartient, ô sidi Hand-Goudris, d’intercéder auprès du tout puissant”.Ainsi leqbayli, à l’aise dans sa gandoura blanche et sa toque turque, peut rejeter toute responsabilité d’un échec annoncé sur les saints et les mausolées de la région. il vend des panachés à tous les maux. “Si vous souffrez d’asthme, de la toux grasse, si vous crachez de la rouille de vos poumons douloureux, si vous avez le vertige chaque fois vous vous levez, leqbayli est là pour vous guérir. une cuillère à soupe à jeun et deux le soir. C‘est un médicament que j’ai préparé moi même avec les sept plantes bénies par le prophète. Je vais vous les nommer, ceux qui savent lire peuvent les découvrir dans le livre que voilà, kessar lehdjar, (l’arénaria), errefraf (la capillaire), akhlendj (la bruyère), le halba (le fenugrec), tasselgha (le glabulaire), qelilou (la petite centaurée), et sanoudj (la nigelle) conseillée par le prophète (SSL) pour tous ses bienfaits : ce sont des plantes de chez nous, que je cueillie en montagne dans notre cher et protecteur Djurdjura”.
Trucs, trocs, trafics en tous genresLes issues du marché sont comme de coutumes, encombrées. Les marchands de broutilles, les nombreux étalages des petits vendeurs de cigarettes et les receleurs spécialisés dans le téléphone portable cohabitent le temps d’une dernière journée dans une promiscuité calculée pour allécher le client et faire les poches aux distraits.Les chansons de Rai, diffusées à force décibels, par la chaîne stéréo du marchand de cassettes couvrent souvent le grésillement du mégaphone de l’herboriste; Ce dernier ne s’en plaint pas. Il ferme son micro et raconte à voix basse des histoires salées, prenant la précaution d’ouvrir par la formule passe partout “la hya fi din” (pas de honte à évoque le sexe), la foule de badauds en redemande, les fioles du médecin ambulant s’arrachent dans la précipitation.Le marché de Tazmalt grouille de monde. C’est le retour des beaux jours. Les températures montent de nouveau L’activité commerciale gelée par deux mois de froits exceptionnel, reprend. Les besoins des paysans sont grands. Les manques cumulés durant les épisodes d’intempéries successifs doivent être comblés, une aubaine pour les commerçants.Tous se vend et tout s’achète. Il suffit d’un petit espace pour improviser un étalage. Des chineurs fouillent dans des tas de pièces détachées toutes rouillées, des outils d’un autre âge et des produits de l’artisanat local. Ils scrutent, négocient longuement avec délectation, pour finalement savourer vaincus “c’est trop cher et puis ce n’est exactement ce que je cherche” conclut l’un de ces méticuleux maniaques à propos d’un ressort de métal chromé.Une interminable allée est spécialisée dans l’électroménager et la literie.Les appareils de chauffage, les grosses couettes, les couvertures épaisses, se vendent comme des petits pains. La crainte du froid est vivace. Il faut dire que Djurdjura gardera encore longtemps son lourd manteau blanc.
Tous se vend et tout s’achète. Il suffit d’un petit espace pour improviser un étalage. Des chineurs fouillent dans des tas de pièces détachées toutes rouillées, des outils d’un autre âge et des produits de l’artisanat local. Ils scrutent, négocient longuement avec délectation, pour finalement savourer vaincus “c’est trop cher et puis ce n’est exactement ce que je cherche” conclut l’un de ces méticuleux maniaques à propos d’un ressort de métal chromé.
A l’entrée de chaque allée de l’immense marché 20 h. Des jeunes vendent des jeans, des chaussettes et des parapluies, avec dextérité et grands cris. C’est le temps des petits métiers. De nombreux taxis bus, arrivant du versant sud du Djurdjura déversent des flopées de montagnards venus réaliser la bonne affaire. Il est vrai que les prix défient toute concurrence : 20 à 50% moins cher que dans les boutiques.Cela vaut bien le déplacement de Haizar à l’est de Bouira, de Slatna et Zriba des hameaux des confins monstrueux de M’sila, du bout de Bordj Bou Arrefidj, de village d’Illilténe, haut perchés dans la wilaya de Tizi Ouzou, ou encore des At -Ababs à l’extrême sud ouest de Béjaïa.Les commercants roublards ne se privent pas d’abuser de la crédulité paysanne, cette naïveté car caractéristique des montagnards. On relève les prix, par ci, par là, on se trompe dans l’addition au détriment du client, on arrondit et on oublie de rendre la monnaie. Tous les artifices de l’épicier malhonnête sont essayés. “Ces tartuffes arborent tous la barbe et le kamis, mais ils volent et mentent comme ils respirent”, affirme un paysan échaudé, méfiant, malgré son air lourdaud.l’herboriste rameute les badauds par des paroles de choc, empruntant au lexique du mécanicien “Celui qui a du retard dans le delco, celui que la pompe d’injection a trahi, celui qui a des ratés nocturnes, n’a qu’a venir me voir, je ferais de lui un étalon de 20 ans” interpellant un badaud enjoué, dont la mine exprime l’intérêt et la confiance, il dit “prends une cuiller de mon produit et va faire un tour si dans une heure tu en ressens pas la vie te revenir je ne m’appelle pas leqbayli le magicien”.Une odeur de forêt émane de l’étalage de l’herboriste une tente ouverte entourée de quatre parasols. Des racines de jujubier (azegwar), des fleurs de cactus séchées, des feuilles de bigaradier (narendj) de la sabline rouge. (arénaria) réputée purifier les reins et dégager les voies biliaires, des feuilles d’aubépine (idmim) de l’armoise blanche (échih) à forte odeur, de la lavande sauvage (amezir), des feuille de laurier (arend) de l’ivette (channgoura) et des dizaines d’herbes réputées soigner les douleurs du corps, les maux de l’âme emplissent les bacs du médecin traditionnel. A quelques stands de là, au bout de la ligne des chausseurs et des bonnetier, le marchand d’insecticides crie régulièrement dans son mégaphone “roch mea y mout mena” vantant un tue-mouche radical contre les moustiques, les puces, les tuques et les cafards, “surtout les cafards” insiste le vieux Aissa constant dans toutes les places commerciales de la vallée depuis plus de 40 ans.
Le fourgon, la fripe et le portableLes étals de fripe sont remués par des milliers de mains à la recherche du vêtement sur mesure. Les petites boutiques de lingerie féminine, de mercerie, de literie, les stands de cosmétiques et de parfums sont fréquentés par la gent féminin. De fait, tous les frustrés, tous les dragueurs, déambulent nonchalamment d’un étalage à l’autre créant des goulots d’étranglement en se collant aux femmes pour sentir leurs parfums et leur peau. Maintes rixes éclatent souvent à la suite de paroles ordurières de gestes obscènes ou d’agressions physiques. Les cannes sont vite brandies. On ne badine pas avec l’honneur.A l’autre bout du marché, il y a d’autre odeurs. C’est laire aux bestiaux, avec ses émanations d’ammoniac, ses miasmes de fumier, de crôte et les pestilences chalés par les animaux divers, bovins, ovins, caprins et autre équidés (chevaux, mulets, ânes). Entourée des carreaux des artisans locaux, forgerons, selliers, maroquiniers et autres bourreliers avec leurs produits d’un autre âge, L’aire aux bestiaux est très visitée.Loin des fêtes de mariage et du sacrifice de l’aid, c’est la relance de l’élevage qui est de mettre des transaction. Les prix flambent. 2 millions de centimes un agneau d’un an. 10 millions un veau de même âge ! Les maquignons dans leurs amples caches poussière noires dominent le marché. ils résultent les prix et décident du niveau et volume des ventes.Ils sont reconnaissables à leur allure bédouine. ils sont capables en vérifiant la dentition de l’animal de dire son âge à quelque mois près !“Ce sont ces types là, qui ont alimenté le marché d’El Harrach de viande d’âne durant le Ramadhan d’il y a deux ans”, accuse un éleveur local qui tient en main quatre brebis et leur petits. “Ce n’est pas le moment de vendre des femelles, mais j’ai besoin d’argent” nous dit-il avec une certaine gène. Les odeurs de chèvre, d’alfa, de cuir, prennent à la gorge les citadins et les fonctionnaires allergiques que le confinement a fragilisé, venus prendre les couleurs et les saveurs du pays profond.(erriha t’mourth). Des réminiscences d’un passé lointain, ravivées par les images du présent, provoquent des sensations fortes, évoquant une jeunesse passée derrière les troupeaux de moutons, et à porter l’eau à dos d’âne sur les sentiers étroits et pentus des coquets villages d’autrefois ! Cinq allées de carreaux de fruits et légumes ferment sur la droite l’aire à bestiaux. Un simple muret de parpaing sépare les deux surfaces d’activités. les fortes odeurs des agrumes, celles douces et suaves de la banane et de la pomme flottent dans l’air souvent mélangées à l’odeur pénétrante de fritures de boudjemaa el batata, le gargotier ambulant à qui une dizaine de restos mobiles, fait concurrence proposant viandes grillées poissons, frites, et diverses boissons rafraîchissantes. Un fumet de graisse brûlée traverse l’air ambiant donnant des envies et ouvrant l’appétit des nombreux fripiers dont l’activité est florissante en pareil la période. “Avec nous, les travailleurs aux petites bourses et tous ceux qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts trouvent leurs comptes. Nous avons bien travaillé durant l’hiver, les habits chauds et les gros souliers ont bien marché” affirme m’hemed, un jeune homme de M’sila habitué des marché de la Soummam.Les produits phytosanitaires fortement toxiques, sont exposés à côté des barquettes de dattes et des cageots de sardines ! Le haut parleur de l’herboriste débite toujours son flot de contradictions louant tantôt la science, le savoir, discréditant juste après la médecine, les hôpitaux et le corps médicale. “Si vous êtes fatigués des injections, des files d’attente devant les hôpitaux et les dispensaires, des rendez-vous reportés parce que vous n’êtes pas pistonnés, vous n’avez pas d”épaules larges et le bras longs, si vous laissez de plus en plus les blouses blanches qui vous demandent des millions pour un mal imaginaire, venez voir leqbayli et les décrets du bon dieu devront s’accomplir, je suis sur la route de votre destin, dieu est Maître de miracles !”, assène l’herboriste dans son mégaphone, écrasant dans la main une herbe à forte senteur de térébenthine. De belles pommes de cèdre de Azrou N’tha, des grenades séchées de Gueldamane, des gousses de caroube d’Ath Maouche, brillent dans des casiers d’osier à côtés d’une antilope embaumée, une tête de fennec et quelques planches d’anatomie humaine apportant le crédit de la science qui manque tant à l’herboriste aux allures charlatanes.
Le souk lieu de l’honneurLes quatre joueurs de bonneteau (Rey Rey) travaillent normalement. Ils sont connus pour être évités, mais la cupidité est mauvaise conseillère. Les rabatteurs de cette clique d’Akbou arrivent toujours à capter un pigeon pour le plumer.Les étalages des parfumeurs sont bien distincts, non loin des quincailleries, des marchands de droguerie à l’opposé de l’aire à bestiaux, loin des fruits et légume. Des fragrances rares, des arômes agréables émanent de stands fréquentés par les femmes et les jeunes couples. De nombreuses clientes bardent avec l’un des vendeurs, un initié sans doute, reconnaissable à son allure générale, faussement efféminée, à ses gestes lents et à son lexique citadin ! Il arrive rapidement à convaincre un groupe de revendeuses de Sidi Aich reconnaissables à leur accent et leur façon de marchander. “Des commerçantes fines et dures” reconnaît Abdelmadjid le parfumeur ! Des jeunes filles de Bgayet s’essaient alors au marchandage “elles savent ce quelles veulent et en reculent devant aucun moyen de persuasion, mimique, gentillesse, sourire, yeux doux ! il faut être solide pour résister à cette fougue, cette jeunesse bien en chair “ dit parfumeur lissant sa moustache. Il noie alors sa clientèle de considérations esthétiques, développant la composition chimique d’un nouvel arôme pénétrant, extrait d’un ancien parfum gras mixé à une essence hyper volatille.“Le retour aux parfums d’origine végétale, vanille, iris, jasmin, œillet, origan, santal, est une nouvelle tendance. C’est la dernière mode” devant la béatitude des clientes, il vaporise un subtil extrait de roses. “Celui là est trop cher, je ne crois pas qu’il faille vous le vendre” dit le malicieux marchand de senteurs; deux montagnardes habillées de la fouta des Ouadhias succombent au charme de la délicate et suave odeur. Elles dénouent leurs bourses avant que le parfumeur n’ait indiqué le prix. “Mon neveu Chaavane qui revient de l’armée, se mariera l’été prochain il mérite bien ce bon parfum”, affirme l’une des deux montagnardes, provocant le sourire amusé du groupe de citadines et du parfumeur satisfait. Un véhicule coincé dans la foule fait un horrible tintamarre de ses klaxons ininterrompus. “Encore un arabe égaré, quelle idée d’entrer avec une voiture dans ce magma humain”, remarque un marchand de chaussettes contraint de déplacer sa petite table pour libérer le véhicule immobilisé “quatre paires pour 100 DA et une gratuite” crie-t-il, emportant son étal vers un coin libre. Soudain un groupe de voleurs à la tire provoque une grosse bousculade.Un désordre indescriptible s’en suit. Un vieux paysan brandit sa canne et frappe.“Il n’est pas né ce fils de p… qui osera me voler, le souk de Tazmalt est toujours un lieu de l’honneur”. Un jeune sort son couteau, plusieurs coups de baton s’abattent sur son bras. Il est vite immobilisé, mis à terre et affreusement ensanglanté. On retire plusieurs portefeuilles de ses poches “emmenez-le chez les gendarmes” dit un vieux marchand “ça ne sert à rien, ils vont le relacher” fulmine un homme avec barbe et gandoura. “Il faut avoir le courage de porter plainte, comme ça ils sont obligé de l’arrêter”! La voleur amoché est relaché. Le marchand d’insecticides lance un appel dans son mégaphone “que ceux qui ont perdu leurs portefeuilles viennent les récupérer chez moi, des bienfaiteurs les ont retrouvés”. Le marché ne femera qu’à la tombée de la nuit pour reprendre avec plus d’énergie demain jeudi.
Rachid Oulebsir
