Aït Menguellet régale

Partager

Deux heures de concert seulement avec Aït Menguellet, de 22h à minuit, en cette soirée de samedi dernier, à la maison de la culture Rachid Mimouni.

Mais ce fut, comme prévu, un moment de pur bonheur. Un temps passé comme l’éclair sur l’esplanade de cette structure, qui ne pouvait, hélas, contenir la foule de personnes des deux sexes, ayant afflué vers cet endroit juste après la rupture du jeûne. Portant sa flûte à ses lèvres, le virtuose Djaffar entama comme à l’accoutumée le gala en exécutant des morceaux musicaux de Lounis, son père, avant de céder la place à celui-ci. L’artiste monta sur scène et salua l’assistance qui l’accueillit avec des youyous et des applaudissements.

Très ému, Aït Menguellet commencera avec sa chanson sur les montagnes de la Kabylie « Thamourthiw dhi zourar ghef idhourar ». C’est l’expression de l’amour, de l’attachement profond à cette terre natale, «akal ianediskrene», dira-t-il. Le poète entonnera ensuite un hymne sur les jeunes de l’Algérie, louant leur vivacité et leur bon sens, surtout en période de crise. Puis, Lounis ne put, ce soir-là non plus, éluder le thème de l’amour. L’artiste gratifiera l’assistance de sa chanson ‘’ourighas thabrat neslam our sbirghara, taa wadhagh dhi tekhmam our ksanara’’. Jeunes et moins jeunes reprenaient les couplets de cette chanson en chœur.

Après l’avoir transportée jusqu’aux monts de la Kabylie, Aït Menguellet emporta l’assistance, comme dans une machine à remonter le temps, vers le début des années soixante-dix, lorsque Thayri, ce sentiment qui ravage les cœurs, ou les revivifie, s’exprimait par lettres, exigeant une introduction, un développement, puis une conclusion.

«Voulez-vous encore quelques-unes de mes anciennes chansons ?», demanda le sage aux présents. Et ces derniers de lui répondre à l’unanimité par l’affirmative. Ce furent alors de mémorables morceaux intitulés « sabra aouliw », puis « Misligh iw taxi », relatant avec tristesse, mais dignité le mariage forcé de la femme aimée, et ensuite « Achou mi chfigh », résumant quant à lui son expérience personnelle. Redoublant d’ardeur, face à ces jeunes femmes et jeunes hommes qui se déhanchaient, dans tous les coins de cette esplanade, il leur chanta « af JSK », « awthad afous an rouh », avant de céder la place momentanément à son fils Djaffar. De retour sur scène, après un quart d’heure, il interprétera l’inoubliable chanson « Atess atess, mazel lhall », qui prenait en dérision, au début des années quatre-vingts, le régime opposé alors à la liberté d’expression dans un pays livré aux multiples invasions culturelles provenant du moyen orient. Malgré l’amour qu’on lui vouera éternellement, l’Algérie poussait, alors, ses nombreux enfants à émigrer sous d’autres cieux. L’artiste terminera son tour de chant de cette époustouflante soirée, avec ‘’Ketchini rouh nek adekimagh, rouh dhi lamane outsedoughara’’.

En l’absence du wali, Aït Menguellet sera honoré par le directeur de la culture qui l’a habillé d’un burnous blanc et lui a offert une attestation de reconnaissance ainsi qu’un portrait de l’ex-Rocher -noir. Puis, toute l’assistance s’est levée pour rendre hommage à l’artiste qui l’a subjuguée.

Salim Haddou

Partager