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La récolte des figues fraîches compromise

La canicule qui sévit, depuis plus d’un mois avec des pics oscillant entre 44 et 46°, aura des répercussions négatives sur la récolte des figues fraîches, qui arriveront à maturité dans moins d'une semaine.

Cette coutumière hausse des températures en cette saison, dénommée «idhabakhen n’doukar» et «smayem» par les agriculteurs selon le calendrier agricole berbère, a durement affecté cette année, la récolte des figues fraîches.

Cela, à cause de la hausse assez importante du taux d’humidité. Car la région Est de Bouira et plus particulièrement celle de M’Chedallah est prise, depuis 05 ans, en sandwich dans un microclimat à l’origine de ce considérable changement climatique qui, lui-même, est provoqué par la mise à eau de 2 importants barrages, à savoir ceux de Tilesdit et Tichy Haf.

Au troisième jour de cette canicule exceptionnelle de la semaine écoulée, la première série des figues fraîches, «assarthou en Kabyle», non encore arrivée à maturité commençait à montrer des signes de déshydratation et d’assèchement avec une couleur qui vire au jaune clair. Les fruits se détachent de la branche et forment un tapis uni au-dessous des figuiers sans pour autant, que ces figues immatures, dénommées «Amjah», ne soient complètement perdues pour tout le monde.

Sa composante est un aliment nutritif très apprécié par le cheptel ovin et caprin. Les éleveurs propriétaires de figueraies les ramassent et les emmagasinent en guise de provisions d’aliment de bétail, en prévision des journées de disettes de l’hiver. Pour les figueraies irriguées, cette première série de la récolte perdue est vite remplacée par la suivante dont une grande partie arriverait à point ou à maturité. Celles qui ne bénéficient pas de l’irrigation, par contre, commenceront à perdre même leurs feuilles avant l’automne.

De celles-là il n’y aurait rien à tirer. Fort heureusement, à M’Chedallah, la figue fraîche, qui est entourée de tout un mythe, est toujours considérée comme un don des forces divines, par conséquent, sacrée, et que les nantis partagent à titre gracieux avec toute la communauté.

Aussi, ce qui serait épargné par ces bouleversements climatiques exceptionnels profiterait à tout le monde, nul alors n’aurait le courage de refuser à son entourage le partage de ce fruit de saison légendaire et millénaire, l’un des tous premiers avec la figue de barbarie et l’olive cultivés par nos ancêtres qui étaient beaucoup plus généreux et solidaires

La récolte des figues de barbarie tire profit de la canicule…

A l’inverse des figuiers, les plantes des figues de barbarie ou le cactus «akermous» composés de plus de 80 % d’eau en tireraient un grand profit de cette canicule. Avec une production record déjà forte apparente, sur laquelle s’est produite une véritable ruée depuis la fin du ramadhan. Un phénomène bien connu des paysans qui y voient une compensation de la perte de la récolte de figues fraîches.

Toujours dans la région de M’Chedallah, ce deuxième fruit exotique s’offre et se partage gracieusement et comme il est, lui aussi, très prisé et qu’il arriverait à maturité au même temps que les figues fraîches, les moins nantis auront quand même de quoi garnir leurs tables malgré la vertigineuse flambée des prix des autres fruits au niveau des étals, d’autant plus que cette année avec une nette amélioration du climat sécuritaire, les campagnards auront tout le loisir d’aller cueillir ce fruit dans les régions qui en produisent à profusion.

Un fruit délaissé depuis de longues années à cause des hordes sanguinaires, qui les ont transformées en zones interdites. Les plus avisés de nos braves campagnards commencent déjà à confectionner une sorte de gaule munie à l’extrémité de 3 crochets servant à cueillir les figues de barbarie. Ces gaules sont au fait, des branches de laurier rose, «ilili en kabyle», qu’on trouve au bord des nombreux ravins de la région. Ces branches, une fois découpées et débarrassées de leur écorce, sont exposées au soleil durant au moins 2 semaines pour leur permettre de durcir.

On obtient ainsi, une canne qu’on prolonge d’un long et solide roseau pour atteindre les fruits du sommet de la plante sans se faire piquer par les dangereuses épines sous forme de duvet, qui recouvre tout le fuit. Notons enfin, un phénomène observé sur ce fruit: une fois débarrassée de sa peau et exposée durant 10 minutes au soleil, la figue de barbarie devient…glacée.

Oulaid Soualah

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