Il était une fois le cinéma

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Parmi les infrastructures de loisirs les plus désirées par les habitants de Seddouk, notamment la frange juvénile, le cinéma, appelé aussi le 7ème art, avait sa place dans la ville de Seddouk au temps de la colonisation.

Comme il a vu aussi de beaux jours après l’indépendance. La première salle de cinéma a été créée au centre social, une cité du centre ville. Composée de baraques en préfabriqué dont l’une d’elles a été aménagée en salle de cinéma fonctionnant avec un appareil de projection de type super8. La baraque est devenue le siège d’un parti politique actuellement. Le cinéma rassemblait les citadins de la ville et les ruraux qui dévalaient des villages du douar d’Amdoun n’Seddouk, de celui de M’cisna et de Takaâts situé à quelques trois kilomètres de la ville. Les films sont projetés le soir et exceptionnellement dans la journée, le jour du marché hebdomadaire. Et les plus usuels étaient les westerns et indous. Quand un bon film est annoncé la nouvelle se répandait comme une trainée de poudre dans les villages où les jeunes s’organisaient en groupe pour aller, à pied, par des sentiers battus et revenir par le même itinéraire. La rue, où se trouvait le cinéma, grouillait de monde dès la tombée de la nuit, du fait que les places étaient limitées et il fallait faire la chaine pour acheter un ticket d’entrée, que vendait le sympathique Mohand Saïd qui était, en même temps, l’opérateur de projection. Une fois l’heure de la projection arrivée, les feux s’éteignent et un silence religieux plane dans la salle. Les yeux des spectateurs sont rivés sur l’écran. De temps en temps, on entend un balbutiement de quelqu’un mais vite rappelé à l’ordre en le sommant de se taire. À l’entracte qui dure quelques minutes, certains spectateurs sortaient dehors pour acheter des casse-croutes, d’autres restaient sur place attendant le passage des vendeurs de limonades et de cacahouètes. S’il restait encore des places, une fois le film lancé l’opérateur ouvrait la porte pour laisser entrer des gens sans sous qui attendaient dehors le signal d’accès. Parfois les places sont toutes occupées et des spectateurs restaient debout dans le couloir. Pourrait-on espérer voir, un jour, ce bon vieux temps revenir à la ville de Seddouk. Cependant, quand on passe par la rue des sept martyrs, la plus ancienne des rues de Seddouk et la plus animée dans le temps, nostalgie oblige, on ne s’empêchera jamais de regarder du côté du cinéma de Da Lakhdar en souvenir des jours heureux passés dans cet endroit qui était un lieu de convergence des citoyens, leur seul lieu de loisirs. Même s’il a disparu, depuis belle lurette, il en reste pour les nostalgiques cet écriteau sur le fronton, vieux comme le temps : «ciné royal». La ville de Seddouk possède pourtant des salles de cinéma, aujourd’hui. La commune a réalisé une, dans l’enceinte du siège de l’APC, et la maison de jeunes possède aussi une grande salle de cinéma. Elles sont ouvertes, pour les meetings, discours politiques, conférences et activités culturelles mais ne sont jamais utilisées pour leur vocation première, qui est la projection de films. Le cinéma est mort, depuis des décennies, à la ville de Seddouk comme il est mort un peu partout en Algérie. Au ministère de la Culture, on annonce la reprise pour bientôt de l’activité des salles de cinéma. Et ce, pour favoriser et encourager la production cinématographique. Si ces promesses sont fondées, on pourrait, donc, oser espérer voir la réanimation des écrans de cinéma, forcés à demeurer noir durant des décennies. Il faut dire aussi que, depuis l’avènement de la parabole permettant de capter chez soi des films qui ne sont pas soumis à la censure comme ceux projetés dans le cinéma ou à la télévision publique, suivi de celui de l’Internet qui offre une multitude de services, les gens ont commencé à se désintéresser des films passés dans le cinéma. Ailleurs, le cinéma n’est pas fréquenté uniquement pour voir un film, mais c’est le moyen de sortir de la maison et d’aller à la rencontre d’autres gens. D’autant que les jeunes aiment imiter les acteurs de films dans les habillements, les objets qu’ils portent, se donnant leurs noms, etc. Ce qui augure un futur prometteur pour le 7ème art, c’est cette nouvelle du ministère de la Culture qui a créé une commission chargée de la relance du cinéma algérien à travers l’étude des infrastructures, du financement et des lois le régissant, une information donnée par le ministre de la Culture lors de sa visite à Djelfa. Elle se penchera également, selon lui, sur les questions des salles des cinémas. Comme elle s’intéressera aux textes traitant de la production et de la formation cinématographiques, a-t-il ajouté. Ces efforts seront consentis dans l’optique de donner un nouveau souffle au cinéma algérien. D’autres actions sont prévues également dans le futur afin que le cinéma retrouve sa place d’antan dans notre pays.

L. Beddar

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