La colère du wali

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Il était à peine plus de treize heures, mardi, quand Ould Salah Zitouni est arrivé au campus universitaire d’Amizour. Seules quelques personnes étaient dans la confidence : le recteur de l’université, le maire d’Amizour, le chef de la daïra ainsi que le directeur des équipements publics.

Dès son arrivée sur site, le wali s’est dirigé vers le tableau exposé par le bureau d’études, pour faire le point sur l’évolution des travaux. Les entreprises de réalisation ont toutes été présentes et ont été entendues sur les délais du reste à réaliser. Toutes se sont vues accorder un délai n’excédant pas les huit jours. «Je reviendrais dans huit jours et je verrais. Les entreprises qui n’auront pas terminé leur travail dans ce délai se verront sanctionnées, mises sur la liste noire, et ne pourront plus exercer sur les marchés publics de cette wilaya», a-t-il menacé. Il a également ordonné au DEP «d’engager d’autres entreprises aux côtés de celles qui sont déjà sur le terrain pour les aider à terminer dans les délais. Même s’il le faut, prenez l’initiative vous-mêmes, et c’est moi qui signerai», lui a-t-il ajouté. En quelques minutes, le wali a rétabli son autorité sur le chantier, face à des entrepreneurs perplexes. Au vu de son style et de sa méthode, ces derniers n’ont pas pu placer un mot, et se sont contentés d’acquiescer. Car, comme nous l’avons déjà signalé Ould Salah Zitouni ne supporte pas qu’on discute ses ordres, et interdit à quiconque de le contredire. Après cet arrêt, le wali a commencé à sillonner un certain nombre d’autres endroits, et a relevé des malfaçons et des ratages évidents, et s’est emporté en voyant les insuffisances sur certains détails. Absence de barbacanes à certains endroits, regards mal faits, rigoles non finies, etc. Il a même ordonné l’arrachage d’un certain nombre de plantes et leur remplacement par d’autres plus adéquates et mieux adaptées. Les tentatives d’explication du bureau d’études n’ont pas trouvé de place. «Tu es mon élève, et ici, c’est moi le maître», a répété le wali en direction du chef du bureau d’études, allant même jusqu’à le menacer : «Je n’ai pas envie d’envoyer des bureaux d’études en prison, comme je l’ai fait à Mascara», a-t-il ajouté. Visiblement remonté et en colère, Ould Salah Zitouni a annoncé qu’il avait décidé de lancer un appel d’offres pour engager des auditeurs techniques et financiers. De cette façon, dira-il, «nous saurons où se trouvent les failles». Le wali a alors déploré la qualité des études techniques qui restent insuffisantes et causent des dégâts lors de la réalisation des projets. Au pas de charge, le chef de l’exécutif de wilaya s’est alors dirigé vers la résidence universitaire pour y effectuer également son inspection. Après avoir sermonné ça et là tour à tour le bureau d’études et les entrepreneurs, il a fini sa visite au bout d’une heure. Durant toute sa visite, le wali semblait en colère et parlait de façon virulente. Encore plus qu’à l’accoutumée. Une certaine exaspération semblait transparaître de son langage. Il semblait incapable de se contenir et a usé d’un vocabulaire qui en a laissé surpris plus d’un. Y compris à l’égard du DEP qui a été particulièrement malmené devant tout le monde de façon pas très élégante. Les personnes présentes ont montré quelques réserves face à cette méthode brusque, indélicate et déplaisante. Sa colère a été telle qu’il accusait de façon à peine voilée les bureaux d’études et les entreprises de «Manger entre vous» et qu’il allait leur donner une leçon à ce sujet. Avant de partir, Ould Salah Zitouni, s’adressant aux cadres qui l’entouraient, a laissé entendre que la raison de son pressing était due au fait qu’il attendait «l’ensemble de la Méditerranée qui se retrouvera dans ce campus d’Amizour dans quelques jours», faisant allusion aux Journées méditerranéennes d’Amizour et au colloque méditerranéen sur le développement local qui se tiendront en début novembre dans la commune et sur le campus. La pression ainsi mise sur les entreprises ne serait en fait que le reflet du fardeau que porte le wali, au regard de l’importance de l’événement. Par ailleurs, le wali n’a pas dit un mot sur le conflit qui oppose des enseignants grévistes au rectorat, à propos du transfert de la faculté des sciences exactes à Amizour. Préfère-t-il ne pas se mêler des problèmes internes de l’université et rester à l’écart des conflits qui restent quand même contenus ? L’essentiel pour lui, c’est certainement le fait que les installations pédagogiques sont fonctionnelles, et que les étudiants sont en mesure de recevoir leurs cours dans des conditions adéquates. Dans huit jours donc, le wali fera une nouvelle visite d’inspection dans ce campus, pour s’assurer que ses instructions ont bien été suivies et mises à exécution. D’ici-là l’ensemble des chantiers vont être renforcés et un nombre d’entreprises supplémentaires vont être engagées. Avis à celles qui cherchent un plan de charge immédiat.

N. Si Yani

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