Revoilà le baudet !

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Qui a dit que l’âne, que l’on utilise dans les travaux domestiques, a pris sa « retraite »? En tout cas, ceux qui ont « misé » sur ça ont tort, car cet animal de bât est, toujours, utilisé dans les différentes tâches, surtout dans le milieu rural, même si l’on ne fait pas appel à lui plus souvent. Cependant, ces dernières années, nous avons remarqué un retour « tonitruant » de cet animal domestique dans la vie active paysanne notamment. Le dernier jeudi du mois de novembre, nous avons été agréablement surpris, lors de notre virée au marché à bestiaux de Tazmalt, de constater la présence d’une douzaine de baudets qui étaient parqués dans un coin pour être vendus! C’était un décor « inhabituel ». « Oui, il sert encore, l’âne! », affirme, sûr de lui, l’un des vendeurs. Il n’y avait pas grand monde à s’enquérir des prix, lesquels, faut-il le souligner, sont les plus bas dans ce marché où les moutons et les veaux ont « ravi » la vedette à cet animal encore méprisé. L’âne était proposé entre 7 500 et 14 000 DA seulement. Et il ne trouvait pas preneur! Néanmoins, ce n’est que partie remise pour cet asinien, puisque la campagne d’olivaison ne tardera pas à être lancée, ce qui fera revaloriser cet animal aux yeux des ménages. Et comment? L’âne s’avère être d’une importance cruciale dans le transport des récoltes, surtout dans les villages perchés, comme ceux situés dans la commune montagneuse d’Ath Mellikèche, relevant de la daïra de Tazmalt, à l’instar d’Agouni Ougueroiz, Taghalat, Lemsella, Aguacha, Ath Ouaâmer et bien d’autres, où le relief géographique est très accidenté. Les oliveraies y sont très difficiles d’accès. Les cueilleurs doivent se « séparer » de leurs voitures ou engins en bas, afin d’accéder à leur propriétés pas faciles à rejoindre, car étant situées sur des terrains en pente et ravinés! Dans ces cas-là la seule solution pour emporter victuailles et outils d’olivaison reste l’âne qui supporte toutes les charges. Il est de même pour le transport des récoltes d’olives. L’usage de cette bête de somme, « une bonne à tout faire » en fait, induit, dans la foulée, la fabrication de la selle. Celle-ci, même si son travail a beaucoup reculé – ils seraient une poignée de vieux à la fabriquer encore- a été remise au goût du jour, avec un enjolivement aux couleurs multiples. Toutefois, le changement dans la conception de ce siège dénature celui-ci, et lui ôte toute son originalité. Mais bon, l’on sangle avec les baudets pour les enfourcher et aller là où les voitures et autres engins ne peuvent y accéder. Les nouvelles générations témoignent peu d’affection envers l’âne. Il est même méprisé. Son nom est utilisé comme quiproquos pour taquiner les autres, et mettre le doigt là où le bât blesse ! Ce n’est pas, en revanche, l’avis des anciens, qui trouvent que c’est plutôt l’âne qui bâtit les villages de Kabylie. En transportant les matériaux (les pierres, la boiserie, le torchis, la tuile, etc.), l’âne a contribué grandement dans l’édification de centaines de villages. Cela sans évoquer son rôle non-négligeable durant la guerre de libération nationale. Alors, l’âne est-il toujours méprisable ?

Syphax Y.

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