Après un xuxuc qui a duré près d’un demi-siècle, les parlementaires ont enfin allumé leurs pneus. Dans ce conglomérat contre-nature d’émeutiers en trois pièces cravate, fourche rouge et barbe soft, se singularise un député glamour, un révolté baba-cool. En signe de protestation contre la loi, qui semble-t-il aurait des incidences graves sur nos estomacs, ce nostalgique du «make love not war» effleura du bout des lèvres la joue d’une députée restée baba. L’on se demande pourquoi La Besace a zappé le seul instant de tendresse de notre Histoire jonchée de traîtrise et de haine. Elle devait sûrement être concentrée sur les échanges d’amabilités entre l’Instrument à percussion et la prophétesse rouge. Alors que ça chauffe de partout et pour…rien, Da Militant, lui, décide de rendre visite en solo au génie made in Iboudraren. Paris, avril 86, quelque part dans le 9ème arrondissement. Muhya est en pleine discussion avec d’autres animateurs de l’atelier traduction-adaptation qu’ils venaient de lancer. Il était le seul à porter un béret. Da Militant pense reconnaître la sublime future Mucat. C’était bien elle. Elle et ses amis prennent congé de Mohia qui se rabat sur la lecture un document
– Azul Muhya !
– Azul kabytchou ! Où es-tu ? Je ne te vois pas.
Kaci l’angoisse lui explique qui ils sont, de quand et d’où ils viennent.
– Vous voyagez dans le temps ! ? Les Brobros ont donc évolué ! Dis, la culture kabyle est au top. Les kabytchous de 2015 ont, je suppose, leur Samuel Beckett, leur Berthold Brecht, leur Lu Xu, leur Molière…
– Non ! Mais par contre nous avons le HCA, le CNPLET, les DLCA, la télévision, facebook…
– Arrête, ça je le sais ! Je veux que tu me parles de la littérature, du roman kabyle goncourable, du cinéma, du théâtre….
– Euh…y a des livres, j’en ai beaucoup vu sur facebook. Cinéma aussi, nous avons produit…euh… «Da Méziane» …euh… «Hrirouche»… enfin, il y a du cinéma.
– Le livre que t’as vu parle de quoi ?
– Je ne l’ai pas lu, mais son auteur me l’a résumé. Il a une belle couverture : l’image d’un grand cœur brisé. Il s’agit d’un jeune homme qui voulait épouser…
… une belle jeune fille. Ses parents ne veulent pas d’elle, le jeune homme s’est alors saoulé dans un bar clandestin …etc…etc. Décidément vous n’avez pas changé ! Dis-moi, vous arborez toujours le trident ?
– C’est quoi ça ?
– «Zed» imazighen.
– Oui, bien sûr ! Le «Zed» est sacré ! D’ailleurs nous l’avons dessiné sur un drapeau que nous exhibons le 20 avril et yennayer. Sur ce plan, soyez tranquille. Et puis, il y a maintenant facebook. Il regorge d’Imazighen qui jurent «ulac smah, ulac» et qui sont prêts à donner leur sang pour…
– Leur sang !? Pourquoi c’est la guerre ?
– Non, c’est une façon de parler.
– Est-ce qu’ils donnent de leurs dinars et de leur temps ? Tu te tais ! Je vois. Continuez comme ça, vous allez nous inventer thaoura taqafiya en kabyle, vous allez finir par avoir vos anciens moudjahidine de tamazight et les attestations communales qui vont avec. Ahya les Kabytchous !!
T.O.A [email protected]
«Je ne suis pas dans la mouvance de ceux qui voudraient réduire la culture kabyle à ce symbole en forme de deux tridents accolés qui trône partout aujourd’hui, et que les jeunes brandissent comme arme à la moindre manifestation. Je fulmine rien qu’en entendant ces jeunes se considérer comme «Berbères authentiques» ou ces formules creuses auxquelles se cramponnent certains pour afficher leur identité culturelle telle qu’ils la voient dans le rétroviseur de la mythologie amazighiste. Je ne crois pas à ce «renouveau culturel» imaginaire auquel bon nombre de Kabyles croient et dans lequel ils se complaisent, plutôt que de reconnaître leur pitoyable réalité» Mohia