Le marché local de la devise n'est pas resté en marge de la flambée qui s'est emparée du change parallèle à travers les nombreuses places de diverses villes du pays.
En Kabylie, plus précisément à Tizi-Ouzou, une plaque tournante du change parallèle connue quasiment de tous, l’Euro s’est fait pousser des ailes. Cela dure depuis un certain temps et la tendance va toujours de « haut » à « plus haut ». C’est là le langage courant chez les initiés de cette bourse plongée désormais dans l’effervescence. De 150 DA, il n’y a pas si longtemps, l’Euro frôle désormais les 200 DA sur la bourse parallèle de Tizi. «Franchement, personne ne peut prévoir demain, mais tel que c’est parti, je ne pense pas que le Dinar reprendra de sitôt. Il n’y a plus d’Euros sur le marché et forcément sa cote continuera de grimper», commente Farid, appelons-le ainsi. Lui, c’est un intervenant connu sur la place de la ville, du côté du centre. Les banques ne sont pas loin. Parfois, à peine une ruelle à traverser. Celle du coin garde ses portes comme à peine entrouvertes. Il faut dire que le « barreaudage » qui l’enveloppe donne d’elle l’image d’un établissement peu accueillant. Et « peu généreux » se plaignent certains retraités habitués qui déplorent ne pas percevoir leur dû dans les temps et intégralement. «Cela fait plusieurs semaines que les vieux éprouvent des difficultés à retirer leurs pensions en Euros des banques. A chaque fois, y a problème paraît-il. La majorité des banques de la ville, comme ailleurs d’ailleurs, manquent de liquidité en devises. Ce qui fait que les retraités subissent les conséquences. Il y a des fois où on leur accorde des petits retraits et d’autres où il semblerait qu’on leur propose de percevoir leurs pensions en Dinars, s’ils le souhaitaient. Et ça a beaucoup influé sur le cours local de la devise. Car avec cette subite baisse des disponibilités, la demande a, elle, augmenté. Et l’Euro est aujourd’hui à plus de 190 DA», dira encore Farid. Un ami à lui, qui lui tenait compagnie dans cette boutique du prêt-à-porter pour femmes qu’il gère à quelques encablures de ce fameux café va plus dans le détail : «Par le passé quelle que soit la hausse enregistrée, il y avait toujours une baisse qui suivait vers la fin du mois avec l’arrivée des pensions. Il y a quand même un important nombre de retraités qui retiraient leurs argents après chaque 20 du mois. Et cet argent était presque instantanément jeté dans le circuit d’où la disponibilité de l’offre. Mais ces derniers temps, ce n’est plus le cas et le cours continue de grimper». Voilà c’est aussi simple que ça. Farid et son ami n’ont jamais été à l’université encore moins dans une école spécialisée du commerce ou de la monnaie, mais ils semblent assez bien maîtriser ce marché juteux du change parallèle. Le tout est de ne pas prendre trop de risques. «On ne sait pas quelle sera l’évolution de demain. Donc, on préfère vendre aussitôt après avoir acheté et prendre une petite commission. Le marché est imprévisible. Si on avait su que ça allait atteindre ce taux, on aurait tout gardé pour le vendre aujourd’hui…», balancent- ils presque en chœur avec un sourire malicieux pour accompagner cette conclusion à plus d’un sens : «N’allez surtout pas imaginer que nous sommes les maîtres de ce marché. Les vrais maîtres on ne les voit même pas, c’est à peine qu’ils délèguent des intermédiaires qui passent vous voir pour vous dire de leur réunir pour la soirée 5 000 ou 10 000 Euros…».
D. C.

