L’année s’annonçait mal. On la croyait fichue, car la sécheresse qui frappait était sévère. Les services de la météo avaient annoncé, en janvier, un déficit pluviométrique de plus de 100 mm.
C’était d’autant plus inquiétant que le mois de février a débuté mal. Jusqu’au 15 de ce mois (février), rien n’indiquait que la situation allait changer. Et puis, vers la fin, tout a basculé. Le cumul enregistré par la station météorologie de Bouira est de 50 mm pour ce mois. On n’en espérait pas tant ! Mais le mois de mars nous réserve encore d’autres surprises. Dès la première décade, en effet, il a annoncé les couleurs : de la pluie, du vent et…de la neige à 900 et même à 800 m d’altitude. Djurdjura et Dirah ont été ensevelies sous une couche de 30 cm. Du jamais, où, du moins, du rarement vu en ce mois le plus tendre du printemps. La semonce a été prise au sérieux : le froid était là et s’est installé pour longtemps. Jusqu’au 10 mars, notre station météorologique a enregistré 73 mm. Le cumul jusqu’au 15 est de 96 mm. Ce froid était glacial ! On a ressenti ses griffures. On a frissonné sous son vent glacial. Mais en plus du tonus qu’il a donné il a rétabli une situation fort-compromise. Les cinq nappes phréatiques se sont reconstituées dans une proportion satisfaisante, et les barrages se sont presque remplis. Les jours à venir pourront être aussi bénéfiques, puisque la station nous annonce encore une nouvelle perturbation. Du côté de l’hydraulique, on se félicite tout autant de cet événement météorologique. Qu’on en juge. Le taux de remplissage du barrage d’oued Lakhal qui est d’une capacité de 27 millions de m3, est de 70%, soit 18,747 millions de m3. Son taux d’envasement qui est de 10%, selon le responsable du service de l’hydraulique chargé du volet agricole, l’a empêché d’arriver à son niveau le plus élevé. Celui de Tilsdit, dans la daïra de Bechloul est de 94%. Ce barrage d’une capacité de 164,5 millions de m3 et qui est en ce moment à 154,485 millions m3, enregistre un taux d’envasement de 1,5%. Le taux de remplissage du barrage de Koudiet Acerdoune, dans la commune de Maala, est de 80%. Les nouveaux apports pluviaux ont amené son niveau à 518,546 millions de m3. On peut mesurer la différence en soustrayant ce chiffre de la capacité réelle de cet important ouvrage qui est de 640 millions de m3 et dont dépendent en AEP plusieurs wilayas, dont Alger, Tizi-Ouzou, Médéa, Djelfa, etc. À titre d’exemple, le responsable de ce service site deux lâchers d’eau vers le barrage de Kadara qui alimente la capitale en eau potable. Il dira qu’on a pompé précédemment 20 millions de m3 vers le barrage de Kadar, via le barrage de Béni Amrane. Mais comme ce barrage est de faible envergure et que les besoins en eau de la capitale sont astronomiques, le ministère des Ressources en eau a décidé d’un second lâcher estimé à 30 millions de m3. Du début de l’opération jusqu’au 7 mars, il a été pompé 19,17 millions hm3. Avec ce premier lâcher, le barrage de Béni Amrane a réceptionné à l’arrivée 22,6 hm3 amenant le volume du barrage de Kadara, après ce pompage, à 77,05 hm3. Avec le second lâcher qui a commencé le 9 mars, la wilaya a pompé à partir du barrage de Koudiet Acerdoune 19,657 millions de m3, soit plus que le contenu du barrage d’oued Lakhal. À l’arrivée, le barrage de Béni Amrane a réceptionné 23,8 hm3. Ce dernier transfert a permis au barrage de Kadara de parvenir à un niveau estimé à 98 hm3. Comme le lâcher s’est effectué dans l’oued Isser, on se rend compte de l’importance des apports pluviaux et de ce cours d’eau qui traverse la partie Sud-ouest de la wilaya. Pour notre interlocuteur, les réserves hydriques constituées par les cinq nappes, se reconstituent peu à peu grâce aux trois barrages qui couvrent l’essentiel des besoins de la wilaya. Ainsi, le chef-lieu de wilaya ne serait dépendant des forages qu’à 20%. La dépendance reste forte dans les quatre ou cinq communes à l’Est de la wilaya. En vérité il existe trois grandes nappes, selon notre source : celle de Bled El Madjen, située à Haizer, celle de Bouira et enfin celle de Aïn Bessem, moins importante que les deux premières. Les deux autres ne seraient que des nappes alluviales, dépendantes de oued Isser à au Sud-ouest du chef-lieu de wilaya et de oued Sahel. Ce sont des nappes subsurfaces, qualificatif emprunté à la terminologie technique de notre interlocuteur. Selon lui, le problème de la wilaya en matière d’eau potable a longtemps été dû au fait que celle-ci, géographiquement parlant, «s’est trouvée en amont des quatre bassins versants : au Sud-ouest avec l’oued Isser, Au sud avec le Hodna et à l’Est avec la soumam. La construction des trois barrages obéit, donc, à cette logique imposée par la situation géographique de la wilaya de Bouira qui faisait, dans le passé que cette dernière soit mal servie par le réseau des cours d’eau qui la traversent. À l’Est se trouve le barrage de Tilsdit. Au Nord-ouest, c’est le barrage de Koudiet Acerdoune et à l’Ouest, oued Lakhal. Deux barrages encore à l’étude : l’un au Nord-ouest pour retenir les eaux de oued Bouamoud, et l’autre au Sud pour contenir l’oued Zenati, dans la commune de oued Bardi. Ainsi, grâce à ses ressources en eaux, la wilaya pourra non seulement couvrir ses besoins et ceux de ses voisines, mais diversifier ses cultures. Quand on sait que l’on pratique notre agriculture pour se soustraire des aléas climatiques qui pèsent lourdement sur elle, hypothéquant parfois ses chances de développement et recourant ingénument à l’irrigation de ses champs aux moyens de kits, on comprend l’importance qu’elle accorde à la construction de telles infrastructures. Son avenir y étroitement lié.
Aziz Bey