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La sardine hors de prix

Le commerce de la sardine est caractérisé par deux constantes majeures et, pour ainsi dire, quasi immuables. La première est relative à la mercuriale. Celle-ci joue au yoyo avec, cependant, une tendance inflationniste qui semble s’inscrire dans la durée.

L’autre constante est liée aux conditions de vente déplorable de ce poisson pélagique. Inutile de s’appesantir sur l’indispensable chaine de froid qui, on le sait, est passée depuis belle lurette à la trappe. Pis encore, les règles d’hygiène les plus basiques sont royalement foulées au pied. Le marché hebdomadaire d’Ighzer Amokrane, dans la commune d’Ouzellaguen (qui est loin d’être un cas isolé), fournit la preuve par quatre. Alors que ce produit carné est parmi les plus fragiles et périssables, il est exposé aux rayons ardents du soleil, aux insectes et à toutes les formes d’impureté et de pollution. Les étals, du reste achalandés, font bon ménage avec des flaques d’eau stagnantes, aux relents putrides. Pour donner à une cargaison fleurant bon l’ammoniac, une fallacieuse impression de fraicheur, le marchand veille au grain : il l’asperge d’eau régulièrement. Avec une mauvaise foi proche de l’escroquerie, il tente d’appâter le chaland, en jurant par tous les saints que sa marchandise est ce qu’il y a de plus frais. Des boniments qui font souvent mouche. Alléché le consommateur tombe comme un fruit mûr dans ce traquenard. Les plus avertis refusent de jouer à ce marché de dupes. Ils tentent vainement d’humer une odeur fraiche rappelant celle des marées, avant de se résoudre à détaler. Paradoxalement, l’abondance de la marchandise et la multiplication du nombre des vendeurs n’ont aucune incidence sur les prix, lesquels restent figés autour de 600 DA le kilo. Des marchands interrogés sur les raisons de ces prix prohibitifs, se défendent mordicus de vouloir s’enrichir sur le dos du consommateur. Ils invoquent le sempiternel principe de l’offre et de la demande. «Sincèrement, les prix qui grimpent n’arrangent nullement nos affaires, bien au contraire. Mais on ne peut naturellement pas baisser les prix, à moins de rogner sur nos marges ou carrément vendre à perte», soutient un marchand. D’aucuns imputent la responsabilité de cette envolée des prix au renchérissement du coût de la production, tandis que d’autres pointent à l’index les mareyeurs qui, selon eux, régentent le marché à leur guise, en imposant des prix de façon unilatérale et arbitraire. «Il y a au moins une certitude : l’Etat a failli dans sa mission de régulation de ce marché sensible», tranche un citoyen du village Selouana, en appelant les autorités à user de leur pouvoir régalien pour mettre un terme à ces prix qui donnent le vertige, en éradiquant du même coup, certaines pratiques qui donnent… la nausée !

N. Maouche

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