Les habitants de la ville de Béjaïa et tous ceux qui la visitent sont unanimes à déclarer qu’elle est sale.
Des tas d’immondices à travers ses rues démontrent l’incapacité de gérer correctement cette ville, connue jadis pour sa propreté irréprochable qui lui a valu d’ailleurs, en 1985, le prix de la plus belle ville d’Algérie. Ces quelques dernières années, Bejaïa s’est transformée en véritable poubelle. Tous les quartiers offrent un décor de désolation. Ces dernières années, le territoire de la capitale des Hammadites est assailli par des ordures. La ville est devenue le théâtre de dépôts sauvages d’ordures ménagères et autres déchets à tel point qu’elle ressemble plutôt à une immense poubelle à ciel ouvert. Pratiquement, tous les quartiers et ilots de la ville ne sont pas épargnés par l’invasion des ordures où l’on peut à chaque deux ou trois mètres enjambés apercevoir un tas d’immondices. Juste à l’entrée de cette commune, à Bir Esselem, nous pouvons apprécier un effrayant tas d’ordures que le visiteur lambda est interpellé à plus d’un titre. Le constat est encore plus édifiant à certains quartiers comme Tala Markha, Roussel, Dar Djebel…Le simple quidam, amené à déambuler le long des différentes localités de la wilaya de Bgayet, est frappé par l’insalubrité régnant en maître de céans. À certains endroits, on se croirait dans une porcherie, sinistre lieu qui offre un spectacle désolant avec ces chiens des quartiers qui remuent les immondices de fond en comble à la recherche d’éventuels restes de nourritures pouvant constituer leur repas. Même les rares espaces publics de détente, conçus pour être des havres de paix, des petits coins de paradis en milieu urbain, se sont transformés, au fil du temps, en de véritables décharges d’ordures.
Il était une fois la place Gueydon…
La place Gueydon, un des lieux incontournables de la ville de Yemma Gouraya, s’est transformée en un vaste dépôt d’ordures où on trouve de tout, sachets et bouteilles en plastique, emballages de chips, etc. Ce belvédère qui eût dû être une vitrine d’attraction pour les touristes par excellence, devrait susciter l’intérêt des autorités locales qui, craindrait-on, ne tiennent pas compte de tout ce potentiel endormi. Les citoyens infligent une claque déroutante à Dame Nature, agressée à tous les niveaux et sans concession. Pratiquement, aucune localité n’est épargnée par l’invasion des déchets de tout genre, notamment les canettes de bières et autres bouteilles en plastique. Les abords des routes nationales et communales sont submergés par ce type de déchets qui n’en finit pas de faire parler de lui. Rien que pour la ville de Bgayet, les routes débouchant au centre-ville témoignent d’un incivisme criant. L’approche de la saison des crues pourra mettre à nu l’amateurisme et le laisser des autorités locales qui ne mettent pas les bouchées doubles pour éradiquer ces détritus. La politique de bidonnage affichée par des élus locaux semble être dépassée par les événements, car le citoyen attend davantage la prise en charge de son cadre de vie et de facto, ce dernier doit mettre aussi la main à la patte afin d’embellir un tant soit peu son environnement qui ne cesse de se dégrader au fil du temps. Sinon, comment expliquer la dégradation tous azimuts de l’environnement dans cette partie de l’Algérie ? L’amélioration du niveau de vie des ménages conjuguée avec le développement technologique induit forcément à l’augmentation des ordures ménagères. Malheureusement, ces immondices envahissent chaque coin de rue, les cours d’eau, les maquis, les quartiers… Tout cela est dû à leur mauvaise gestion qui, par la force des choses, s’accumulent et s’entassent en fur et à mesure, menaçant sérieusement l’écosystème et la santé des riverains. Le chef-lieu de la wilaya n’est pas épargné par cette invasion d’immondices entreposées pêle-mêle qui gisent à même le sol près du siège de la wilaya et d’autres directions. Lesdits responsables locaux et directeurs régionaux passent et repassent quotidiennement devant un fouillis de sachets éventrés, exhalant des miasmes pestilentiels et délétères.
Raz de marée de déchets en tous genres…
Les ordures ménagères ne sont pas les seules à ternir l’image de nos villes et de nos bourgades, car d’autres, plus consistantes, sont en prolifération. Des déchets inertes (gravats) provenant des secteurs du bâtiment et des travaux publics sont déversés, faute d’un site approprié le long des routes, des cours d’eau ou tout simplement dans des décharges improvisées pour le compte des ordures domestiques. Ce type de déchets solides est la résultante du boom que connaît le secteur du bâtiment. Des monticules de gravats envahissent tout espace pouvant faire office de décharge. Cette situation n’est pas sans conséquences sur Dame Nature. Cette prolifération de matières toxiques dans le sol pollue les nappes phréatiques tout en défigurant les paysages féeriques caractérisant la Kabylie. Ce raz-de-marée de déchets offre un visage hideux des villes et des campagnes. Nul besoin d’être un esthète raffiné pour se rendre compte de la déliquescence agressant notre environnement de toute part. Aussi bizarre que cela puisse paraître, suivre aujourd’hui le cours d’eau d’une rivière nous renseignera amplement sur le mode vie de nos concitoyens. Canettes de bière, bouteilles en plastique, pneus usés, sachets, boîtes en carton, carcasses de véhicules… sont autant de déchets qui s’amoncellent pour former des montagnes de détritus, où s’invitent des meutes de chiens, de chats et de rats. Au rythme où vont les choses, les villes et les villages sont devenus des dépotoirs à ciel ouvert, et ce, au su et au vu de tout un chacun. Les écologistes ont, à maintes reprises, tiré la sonnette d’alarme sur le danger qui guette notre environnement. Ils interpellent les autorités compétentes afin de mettre le holà à cette menace écologique. Des centres d’enfouissement technique ont été «invoqués» par les pouvoirs publics en grande pompe, mais pour l’instant rien de concret. «Il est inadmissible que nos villages soient un refuge pour tout genre de déchets», réplique, tout de go, un jeune universitaire. Le tri des ordures est l’une des solutions afin de récupérer le maximum d’emballage à des fins de recyclage. De surcroît, en s’orientant vers ce type d’industrie, on crée des postes d’emploi. L’absence de décharge communale ne fait qu’empirer les choses. Les citoyens déversent leurs ordures pêle-mêle sans se soucier des conséquences désastreuses que cela cause à l’environnement. Pratiquement, tout le long des routes, des ordures de tout genre jonchent le sol : canettes de bière et autres boissons alcoolisées, sachets en plastique ainsi que d’autres emballages perdus. L’insouciance et la frivolité de cette frange de population hypothèquent sérieusement l’avenir de l’écosystème et plus dangereusement, la santé des habitants.
Urgence !
Les crues hivernales drainent des chapelets de déchets de toutes sortes, se déversant directement dans le lit de la Soummam, pour ensuite s’acheminer vers la mer. L’exubérante faune et flore peuplant l’écosystème se meurt lentement et sûrement. Il y va de l’avenir de toute une région et de la santé de la population locale. Un véritable plan Marshall doit être mis en œuvre afin de redorer l’image reluisante qui faisait le charme de la Kabylie, et de surcroît, assainir l’environnement et le quotidien de la population. Les personnes esthètes sont unanimes sur le fait que la ville de Bgayet est l’une des villes les plus insalubres, nonobstant les qualités intrinsèques qui lui permettent de se hisser au rang d’une ville propre par excellence. On ne peut prétendre à un avenir meilleur et promouvoir le tourisme sous toutes ses formes sans une réelle volonté politique, conjuguée avec l’adhésion de tout un chacun dans la préservation de notre écosystème. De même, une meilleure gestion de nos déchets passe inéluctablement par leur traitement, en ayant au bout de la chaîne une valorisation desdits déchets qui peut être par ricochet, une source d’argent. Tels sont les défis que devront relever les autorités compétentes, et préserver de facto l’avenir des générations futures.
Bachir Djaider

