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«J’essaie d’imposer ma touche»

Rencontré en marge de l’hommage rendu à Farid Ferragui à la Maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, le chanteur Brahim Tayeb livre ses impressions sur l’évolution de la chanson kabyle et parle de son propre apport.

Pouvez-vous nous donner un petit aperçu de la chanson kabyle actuelle ?

Le bilan est mitigé : des gens disent que la chanson ne se porte pas bien et qu’il y a des manques, ceci cela… Mais non, ce n’est pas la chanson qui ne se porte pas bien, parce qu’il y a bien des gens qui travaillent dans l’ombre même si on ne voit faire des choses. Le problème est strictement communicatif. Les médias n’ont rien fait pour propulser ces vrais artistes au devant de la scène et les faire connaitre. Je ne sais pas si c’est un problème de négligence ou d’un manque de professionnalisme chez nous en Kabylie. Et pourtant, la langue Tamazight est nationale et officielle. Il reste quand même un travail à faire, pas du côté artistique, parce que si on ne met pas les projecteurs la dessus, personne ne le verra, il restera dans l’ombre. Maintenant, dans l’art il y a de tout, en fonction du goût. Il y a des gens qui veulent s’amuser avec des musiques rythmiques, des légèretés de sons… Il y a ceux qui cherchent un peu plus dans le romantique, dans le sentimental… Il y a de la place pour tout le monde. Je ne vois pas pourquoi on cherche à exclure des catégories par rapport à d’autres. On peut se remettre en question de temps à autre, ok, mais pas plus.

Vous faites appel à des logiciels pour vous faciliter la transcription de vos musiques. Peut-on avoir plus de détails ?

Je tiens à vous signaler que je ne compose pas avec des logiciels. On met en place nos compositions avec des logiciels, parce que c’est la technologie d’aujourd’hui avec ses professionnels et autres ingénieurs qui contrôlent tout avec un ordinateur. Avant, il y avait des studios. Des machines physiques, des tables de mixage. Aujourd’hui, c’est une autre procédure de mettre en place la musique. Au lieu de contrôler le volume avec des boutons et des tables de 5m dans la salle d’enregistrement, aujourd’hui, tu le contrôles avec l’ordinateur, c’est tout. Donc la composition n’a rien à voir avec la mise en place de la musique. On crée la musique, on compose la musique et quand on l’enregistre, on utilise l’ordinateur. Ce dernier reste un lieu virtuel où on met les sons pour pouvoir les contrôler par la suite.

Vous maîtrisez plusieurs instruments de musique, guitare, luth&hellip,; est-ce que vous avez une préférence ? Et comment vous faites pour le choix de l’instrument ?

La musique est censée être neutre. C’est le seul espace dans lequel il n’y a pas de ségrégation : il n’y ni racisme ni race. C’est le seul endroit où tu peux imaginer autant de choses à l’infini. Pour le choix, je n’ai pas vraiment de préférence, cela dépend du contexte et de la situation.

Des projets à court terme ?

Je ne peux pas préciser à court ou à long terme, l’artiste travaille en permanence. Il est souvent en quête de nouvelles idées, d’écriture et de la musique. Maintenant que le monde est devenu un village, il est très difficile d’atteindre une véritable satisfaction. Il y a tellement de choses qui se font autour de nous, on est en contact avec toutes les créations de par le monde, avec ce qui se produit un peu partout. On essaie d’imposer notre touche et personnaliser notre création, ce qui n’est pas évident et aisé bien sûr. C’est difficile d’arriver à une satisfaction. Mais, ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de belles choses, la question que je me pose, c’est quand ?

Entretien réalisé par Hocine Moula

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