«On a effectué 21 109 interventions»

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À travers cet entretien, le colonel Brahim Mohamadi, directeur de la protection civile à Tizi-Ouzou, dresse le bilan annuel de l’institution qu’il dirige.

La Dépêche de Kabylie : Pourriez-vous nous parler de la structure et de la couverture opérationnelle de la protection civile au niveau de la wilaya de Tizi-Ouzou ?

Colonel Brahim Mohamadi : Avant tout, j’aimerais rappeler que la mission de la protection civile est la protection et la préservation des biens et des personnes. Pour accomplir notre mission, on se base sur l’esprit de solidarité inter-wilaya et inter-unités. Dans toutes nos actions, nous pouvons compter sur des renforts extérieurs, à savoir la protection civile de Boumerdès pour l’inter-wilayas et celle d’Azazga pour l’inter-unités. On a aussi des structures au niveau des daïras. Nous sommes à un taux de couverture de 80%. On compte 16 unités à travers la wilaya de Tizi-Ouzou, une unité marine à Tigzirt, des plongeurs qui s’occupent de la côte et des noyades de manière générale et une équipe de grimpeurs pour les endroits difficiles.

L’an dernier, notre wilaya a été renforcée de trois unités. Plus on a d’unités, plus on est proche des citoyens. Je vous donne l’exemple de Béni Douala. Avant, en cas de besoin, on intervenait à partir de l’unité de Tizi-Ouzou. Ce n’est plis le cas. Nous sommes présents dans 16 daïras sur 21. Malheureusement, on a été touchés par le gel de quelques projets. Une quinzaine. Sinon, on aurait pu arriver à une couverture de 100%.

Le gel est dû à quoi selon vous ?

Il est dû aux procédures. Celles-ci ont fait que le lancement des projets tarde. Les projets ont été inscrits en 2014, le gel est venu en 2015, ce qui veut dire que les études ont été faites mais la réalisation n’a pas été lancée. La restriction budgétaire fait que ces projets ne seront peut-être pas réalisés.

Si on parlait de votre mission ?

Elle se fait sur trois volets. La prévention, la prévision et l’intervention qui vient en dernier. L’intervention, c’est la mise en place des moyens. La prévention, c’est tout un travail que les gens ne connaissent pas. Pour tous les grands projets de la wilaya, la protection civile intervient pour mettre en place un dispositif sécuritaire (mesures de sécurité issues de secours, portes coupe-feux, stationnements…). Pour cela, on a une équipe d’architectes qui sont chargés de ces études. Par exemple, pour le nouveau stade en construction à Boukhalfa, on fait un grand travail de prévention pour préserver les vies humaines. Pour tout établissement classé industriel ou public, le dossier passe par la Protection civile pour étude. Dans le cadre de la loi 08/15 portant sur la régularisation des constructions, on a reçu des milliers de dossiers. Une mauvaise prévention implique une mauvaise prise en charge. Entre les deux volets, on trouve la prévision. C’est-à-dire avoir les moyens nécessaires pour la prévention. On le prévoit par une prescription et une étude des risques.

Justement, quels sont vos moyens au niveau de la wilaya ?

Je précise que les 16 unités sont dotées de matériel utile à nos opérations. Notre parc compte plus de 150 engins, tous véhicules confondus, ambulances, camions d’incendies…

Qu’en est-il des moyens humains ?

On a un effectif de 1 200 personnes plus exactement, réparties à travers toutes les unités. Ce sont des agents permanents. En été par exemple, ils sont appuyés par les colombes mobiles (unités d’intervention rapide) avec leurs véhicules. C’est une section de 60 hommes de Tizi-Ouzou et de Boumerdès qui renforce ceux qui se chargent de la lutte contre les feux de forêt.

Récemment, vous avez fait une démonstration en hélicoptère… La wilaya dispose-t-elle réellement de ce matériel d’intervention ?

Négatif. Au niveau de la direction générale à Alger, on dispose de 6 appareils multifonctions. Néanmoins, pour le moment, il y a toute une procédure pour la mise en service de ces appareils. Rien que la formation des pilotes nécessite 3 ans. Pour le moment, ils ne sont pas prêts pour faire des interventions. Ce sont des appareils qui seront répartis par régions et non par wilayas.

Pourriez-vous nous dresser un bilan de vos activités pour l’année en cours, la saison estivale notamment ?

Donc, le nombre d’interventions pour l’année 2015 était de 24 687. Pour cette année, au 30 septembre dernier, on en a enregistré 21 109 entre évacuations, différents incendies, accidents de circulation et diverses opérations. Pour l’année 2016, on a eu 10 725 évacuations parmi lesquelles 1876 blessés, 9 133 malades et 90 décès. Pour les accidents de circulation, on en a eu 1642 dont 1 704 blessés et 41décès. Pour la même période de l’année passée, nous sommes intervenus dans 1 614 accidents dont 1 806 blessés et 30 décès.

Selon vous, quelles seraient les causes de ces accidents ?

Avant, sur la Nationale 12 par exemple, on avait une seule voie ce qui expliquait un peu ces accidents. Elle a été transformée en double voie, mais les accidents sont toujours en hausse. 70% des accidents de la circulation se sont produits sur cette route. La principale raison est l’être humain, notamment l’imprudence des jeunes car la moyenne d’âge des impliqués dans les accidents est de 20 à 30 ans. Pas loin que le 2 octobre écoulé on a eu 4 décès d’un coup à Boghni.

Que faites-vous pour la sensibilisation des jeunes ?

Avec les autres institutions et associations, nous essayons de faire un travail de senssibilisation. Nous organisons, d’ailleurs, des formations pour les taxieurs. Pour la licence d’exploitation d’un taxi, la direction de transport exige une formation de secourisme et c’est une bonne chose. On compte élargir la formation pour tous les transporteurs, et pourquoi pas le large public. On essaye aussi d’introduire le secourisme à l’école. D’ailleurs, cette année, dans les livres de 2ème génération, on trouve un passage à ce sujet. Il y a aussi le programme secourisme de masse initié par la direction générale.

Revenons au bilan. Les feux de forêts ?

Concernant les feux de forêt, en 2015, le nombre s’élevait à 153, pour l’année en cours, au 30 septembre dernier, on a enregistré 213 feux de forêt. 1 144 hectares de superficie végétale ont été ravagés cette année. Nous avons cette année aussi 245 hectares de forêt partis en fumée, ainsi que 240 hectares de maquis et 2 240 bottes de foin. Pour les arbres fruitiers, principalement les oliviers, on a enregistré 11 891 unités brûlées. Voyez donc ce que la négligence humaine peut engendrer comme dégâts.

Donc, le facteur humain en est la raison ?

Oui, la cause est humaine, la science parle d’autres raisons mais le pourcentage dans ces cas est très minime. La principale cause est humaine comme l’imprudence, la négligence et autres.

Quelles sont les régions les plus touchées ?

Les régions les plus touchées cette année, c’est surtout le nord de la wilaya, à savoir Aït Chafaâ, Tigzirt, Azeffoun, Tizi-Gheniff… Mais on a enregistré des incendies à travers toute la wilaya.

Et pour les plages ?

Comme il y a la campagne de lutte contre les feux de forêts, il y a parallèlement la campagne de surveillance des plages. L’été on travaille sur deux fronts. Chaque année on a 120 postes ouverts pour les maîtres-nageurs pour les 8 plages autorisées de la wilaya. Nous avons recruté une moyenne de 95 maîtres-nageurs avec une trentaine de professionnels permanents dans leurs postes. Heureusement, cette année, on n’a pas eu de noyés. Un seul dans une plage non surveillée entre Dellys et Tigzirt. Cette année, on a enregistré 3 millions huit cent mille personnes ayant fréquenté les plages où le nombre d’interventions a atteint les 1 065. Le nombre des sauvés de danger réel est de 273. Les soignés sur place, eux, sont au nombre de 658, et les évacués sont de 133.

Quels sont les manques ou les problèmes qui entravent l’accomplissement de votre mission ?

Dans les années 90, la situation financière était très bonne. On en a profité pour nous équiper de tous les moyens nécessaires. On a bénéficié d’un grand programme. Plus d’une vingtaine d’ambulances rien que pour les trois dernières années. Une vingtaine de véhicules. On a bénéficié de dix postes avancés. On allait arriver à 35 unités dans la wilaya. Nos projets en réalisation sont en progression. Makouda à 90%, Boghni à 40%, Tizi-Gheniff achevé Mekla gelé à cause de l’entreprise défaillante. Si on réalise le programme établi, on sera au dessus de nos besoins, c’est largement suffisant. La Kabylie à un relief spécial, très accidenté. Donc, au lieu d’une unité au niveau de la daïra, on préfère avoir des postes avancés au niveau des communes. C’est ce qui a été fait à Maâtkas par exemple. L’autre difficulté réside dans l’implantation des habitations au milieu des massifs forestiers et c’est un risque, un réel danger. La circulation aussi est un problème.

Quels sont vos plans de secours ?

On a un plan d’intervention typique pour chaque établissement, c’est obligatoire. Au niveau de la wilaya, il y a le plan ORSEC wilaya. C’est un dispositif au niveau de la wilaya présidé par le wali lui-même. On est le module secours et sauvetage de ce plan. Il est composé de 14 modules. Il est établi chaque année en coordination avec les chefs de chaque module. Chaque commune est censée avoir un plan ORSEC communal, s’il demande renfort, c’est intercommunales, s’ils sont dépassés, dans ce cas on arrive au plan de wilaya.

Votre dernier mot…

Je remercie la Dépêche de Kabylie de nous avoir donné l’occasion de nous exprimer, et merci pour ce que vous faites pour la Kabylie, je vous encourage. Le citoyen doit être attentif aux mesures de sécurité que préconise la protection civile. On lui demande de les respecter car on œuvre pour la sécurité des citoyens.

Entretien réalisé par Kamela Haddoum.

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