Comment améliorer la qualité des soins

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Le week-end dernier, le Forum de Cardiologie de Béjaïa, en partenariat avec la Faculté de Médecine de l'Université, a tenu au campus d'Aboudaou le troisième congrès de cardiologie de Béjaïa.

Il s’agit d’un congrès régional qui a vu la participation de nombreux médecins venus d’autres wilayas. Entre médecins, étudiants et professionnels de la santé, il y avait environ trois cents personnes à l’auditorium du campus d’Aboudaou. En parallèle avec les communications scientifiques, une exposition de produits pharmaceutiques a été organisée avec la présence d’une douzaine de laboratoires. «Les problèmes cardiovasculaires ont la réputation d’être la première cause de mortalité dans le monde et en Algérie», a annoncé le Dr Douadi, cardiologue libéral à Alger. «L’infarctus du myocarde est la première cause de mortalité dans les maladies cardiovasculaires», ajoute-t-il. Se posant la question sur les bonnes stratégies à adopter en Algérie pour une bonne prise en charge du syndrome coronarien aigu, et plus précisément de celle relative à l’infarctus du myocarde. Il répondra qu’il y a deux techniques qui sont actuellement utilisées: l’angioplastie et la thrombolyse. Seuls les médecins et les malades concernés sont habitués à ce langage réservé aux initiés, mais tout le monde devrait savoir qu’il y a urgence à prendre en charge un malade victime d’un infarctus du myocarde dans les deux heures suivant son attaque. Ce délai respecté, les médecins obtiennent souvent une baisse significative du taux de mortalité. Pour bien prendre en charge les victimes d’infarctus, il y a nécessité de disposer de salles de coronarographies. Cependant, il y en a peu en Algérie, soit environ vingt sept, dont la moitié se trouve dans les cliniques et hôpitaux privés.

L’indispensable salle de coronarographie !

En plus des problèmes d’absence de moyens de toutes sortes dont souffre le service de cardiologie de Béjaïa, le Dr Douadi déclare que la wilaya ne dispose pas de salle de coronarographie. C’est une technique d’imagerie médicale qui permet au médecin de visualiser les artères coronaires. Elle utilise la technique de radiographie aux rayons X et l’injection d’un produit iodé. C’est un moyen peu coûteux, au regard des investissements colossaux que consent l’Etat, mais qui pourtant fait défaut. Dans le secteur public en général, seule une douzaine de salles existent. C’est dire qu’il y a urgence à en installer un peu partout dans le pays, du moins dans les grandes villes dans une première étape. Les salles de coronarographie les plus proches de Béjaïa se trouvent à Sétif et à Alger, et les salles privées ne sont pas prises en charge par la CNAS. Ce qui rend leur utilisation par le public très coûteuse. En plus des éléments techniques développés par le communicant, il a insisté sur la nécessité de développer des réseaux régionaux d’éducation et de la sensibilisation de la population sur les risques cardiovasculaires, et la formation d’équipes médicales capables de faire face aux situations d’urgence. «La réduction de la mortalité passe par une meilleure prise en charge, notamment en mettant les moyens nécessaires à la disposition des médecins et en améliorant l’organisation» a-t-il conclu son intervention. Le Professeur Ait Mokhtar du CHU de Tizi-Ouzou a, quant à lui, insisté sur la nécessité d’améliorer l’environnement pharmacologique. Il a précisé que les malades âgés de plus de soixante-quinze ans étaient plus délicats à traiter à cause des risques hémorragiques éventuels. Le Dr Bennour, chef du service de cardiologie du CHU de Béjaïa et co-organisateur de l’événement, a insisté, quant à lui, sur la maladie coronaire stable et le nombre élevé dans le monde des malades directement concernés par les maladies cardiovasculaires, faisant référence à des études poussées menées par des équipes médicales spécialisées dans le monde. Le professeur Kichou du CHU de Tizi-Ouzou a parlé de la prévention de la mort subite d’origine cardiaque. «C’est un événement imprévu survenant chez un sujet apparemment en bonne santé», a-t-il dit.

Près de 50% des morts subites interviennent chez des personnes non diagnostiquées

Parmi les causes qui provoquent cette mort subite, figure, notamment chez les jeunes, la consommation de drogues. Il y a environ 50% de morts subites qui interviennent chez des personnes non diagnostiquées, d’où la nécessité de procéder à des dépistages familiaux. Après les conférences, les modérateurs ont organisé des débats entre les médecins présents et les communicants pour essayer de répondre aux questions qui se posent dans de telles circonstances. Il faut dire que la discipline médicale de cardiologie est en constante évolution, d’où la nécessité de faire le point sur l’état de l’art en la matière et de partager les expériences et découvertes des uns et des autres. Les débats ont été riches malgré le temps relativement court, imparti à chaque communiquant. Il est à signaler que chacun d’eux à présenté sa communication en s’appuyant sur les données les plus récentes, disponibles dans la littérature médicale. Ce troisième congrès de cardiologie de Béjaïa vient après un autre événement, organisé en mai dernier, relatif à l’hypertension artérielle. Ce qui donne une indication sur le dynamisme de ce forum constitué de plusieurs médecins activant dans la région. Ce troisième congrès été présidé par le Dr Mouhoub Bezghiche, cardiologue au CHU de Béjaia, secondé par le Dr Salem Benmimoun, cardiologue libéral et le Dr Farid Bennour, Maître Assistant et chef du service de cardiologie du CHU de Béjaïa. A retenir que ce troisième congrès s’est penché sur des thèmes sensibles tels la coronaropathie, l’hypertension artérielle, les embolies, le cholestérol, la grossesse, la transplantation… Au deuxième jour, et pour approfondir les connaissances des participants et leur permettre un meilleur contact et partager leurs expériences, quatre ateliers ont été organisés sur des questions pointues autour des thèmes de l’écho doppler vasculaire veineux superficiel des membres inférieurs, de l’hypertension artérielle, des sténoses coronaires et des urgences cardiaques .

Quelles retombées pour l’événement sur Béjaïa ?

Reste à se demander quel sera l’impact de ce genre d’événements sur la qualité des soins à Béjaïa. «Le problème ne réside pas essentiellement chez les médecins eux-mêmes, qui font l’effort de constamment mettre à jour leurs connaissances, mais dans une volonté politique des pouvoirs publics qui doivent mettre les moyens nécessaires pour assurer la qualité des soins», déclare un médecin membre du comité d’organisation de ce troisième congrès de cardiologie. Il semblerait que cette décision dépend directement de la stratégie nationale de développement de la couverture sanitaire. Béjaïa attend depuis des années la construction de son CHU, et l’échéance ne cesse d’être repoussée, invoquant «des raisons farfelues» pour ne pas tenir les promesses faites à une population lassée de devoir faire des centaines de kilomètres pour une analyse médicale ou une radio qui auraient dû être disponibles localement depuis le temps.

N Si Yani.

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