Le comité du village Iguersafène dans la commune d’Idjeur, relevant de la daïra de Bouzeguène, a commémoré hier les événements du 4 décembre 1957, lorsque le village avait été incendié et toute sa population évacuée.
La cérémonie a eu lieu à l’école primaire chahid Kessouar Mohand Ourabah, en présence de wali, M. Bouderbali, ainsi que d’une forte délégation composée d’élus, d’éléments de la sûreté de daïra, de la gendarmerie et de la Protection civile, du chef de daïra, du fils du colonel Mohand Oulhadj, de Nordine Aït Hamouda, de moudjahidine.
Pour commencer les festivités, une gerbe de fleurs a été déposée à la place des martyrs, suivie de la levée du drapeau national au cimetière des Chouhada. Par la suite, les invités ont visité le musée du chahid. Après une minute de silence à la mémoire des martyrs, le président du comité de village, M. Messaoudène, a pris le soin de présenter le village Iguersafène aux invités, tout en rendant hommage au défunt écologiste, Messaoudène Mohand Oussalah, décédé récemment en plein randonnée.
La parole fut donnée par la suite au wali Bouderbali qui dira : «C’est un grand honneur pour moi d’être parmi vous pour commémorer cette date historique, l’une des étapes importantes qu’a vécues la révolution. Le village Iguersafène a donné 99 chahid et c’est une fierté pour vous mais aussi pour toute l’Algérie. C’est donc un devoir d’être là parmi vous. Votre village renait de ses cendres aujourd’hui. L’État a mis les moyens nécessaires pour que le gaz arrive aux foyers et facilite la vie des citoyens.
Dans cette wilaya, j’apprends chaque jour. Je vois l’organisation des villageois, la résistance et les efforts qu’ils fournissent pour se prendre en charge. Je comprends à présent pourquoi l’armée française a souffert dans la wilaya III historique et pourquoi elle a multiplié ses forces pour combattre la bravoure et le courage de ses habitants à qui je rends hommage morts ou vivants». De son côté, le P/APW, M. Klalèche, a parlé de l’expérience du village au concours Aïssat Rabah.
«Le village a échoué en 2013 mais la volonté de ses enfants de se distinguer et de prouver qu’ils perpétuent la tradition de la préservation de l’environnement a fait que Iguersafène soit classé le village le plus propre en 2014. Hier, c’était un combat révolutionnaire, aujourd’hui c’est un combat environnemental», soulignera-t-il.
En visitant le village des 99 martyrs, on découvre que les enfants ont un manège où jouer, un foyer de jeunes, un musée, un stade… Mme Larfi Ourida, native du village élue à l’APW, a, en poèmes, su rendre hommage aux martyrs mais surtout aux femmes, notamment les sœurs Malika et Ouardia Amrani qui ont quitté la France pour venir au secours des maquisards en Kabylie, surtout qu’elles sont instruites.
Plusieurs personnalités historiques ont aussi intervenu, à l’image des coordinateurs de la kasma ONM d’Idjeur et de Bouzeguène. «Je me souviens quand le colonialisme a été informé de la présence de moudjahidine au village, et ce dernier fut envahi par des chasseurs alpins, harkis… Tous les moyens de guerre ont été utilisés, mais surtout le feu qu’ils ont mis pour n’épargner ni enfant, ni femme.
Toute la population a été évacuée après avoir failli être brûlée vive en amont du village et 85 prisonniers furent dirigés vers Berrouaghia. Aujourd’hui, on est là pour donner aux jeunes la vraie histoire de l’Algérie. Notre région a donné des leçons aux forces coloniales grâce à l’union, la fraternité et l’implication importante des femmes.
C’étaient elles qui nous ont informés de ce qui s’est passé au village ce jour-là. Car après l’opération jumelle, les hommes qui restaient ont été dépourvus de force, alors c’étaient les femmes qui assuraient la liaison», raconte Mhand Zerioul, ancien lieutenant de l’ALN et témoin des événements.
Comme lui, Magoula Ali a raconté ce qui s’est passé ce jour-là à Iguersafène, Ouardia Amrani qui est rentré au pays pour soigner les maquisards, a parlé aussi de leur glorieuse participation, elle et sa sœur, durant la révolution. Le président de la fondation Amirouche a parlé d’Iguersafène, village où est passé plusieurs fois son père en compagnie du colonel Mohand Oulhadj. D’ailleurs, il a promis «d’enrichir le musée en documents qui traitent de la révolution et du village des 99 martyrs».
Des prix ont été remis à 18 femmes de la famille révolutionnaire
Le président du comité de village a profité de l’occasion pour lancer un appel aux autorités pour la réalisation d’une salle de lecture et d’une bibliothèque. Par la suite, les présents ont été invités à un déjeuner à la cantine de l’école primaire. Pour l’après-midi, les femmes du village ont assuré l’animation culturelle avec des chants révolutionnaires.
Une conférence, intitulée «L’évacuation du village Iguersafène le 4/12/1957 et le devenu de la population en général», a été également animée, dans l’après-midi, par Bourai Zahia, fille du moudjahid Ali Magoula, écrivaine et chercheuse en histoire de la révolution de la wilaya III historique, en plus d’un historique sur la forêt d’Akfadou, et ce, au foyer de jeunes du village. Pour clôturer cette commémoration, les villageois et leurs invités se sont recueillis sur la stèle Keniche.
Fatima Ameziane.