De produit en produit, le jeune chanteur Nacer Khelif se confirme sur la scène artistique. En effet, avec ce troisième album de six chansons, intitulé Aya nekini, c'est une percée remarquable au regard du nombre de disques qu'il a vendus. Dans cet entretien, il confie que la disparition de la petite Nihal Si Mohand l'a tellement touché qu'il lui a consacré un hommage.
La Dépêche de Kabylie: Tout d’abord, qui est Nacer Khelif ?
Nacer Khelif: C’est un jeune chanteur qui est à son troisième album. Comme tous mes aînés, c’est dès mon jeune âge que j’ai espéré qu’un jour je monterai sur scène, je chanterai et je séduirai le public. Je ne vous cache pas qu’à mes débuts, je n’avais aucun instrument de musique. C’est sur une guitare de fortune faite d’une planche, d’un bidon d’huile et de quelques fils que j’ai commencé à apprendre quelques notes. Peu à peu, j’imitais certaines de mes idoles, à l’exemple de Hamidouche (Que Dieu ait son âme), Kamel Rayah et bien d’autres. Au furet à mesure, je m’habituais et avec mes amis, nous passions des nuits entières à chanter en dehors du village.
À quand remonte votre premier produit ?
Bon, après de longs mois de réflexion, j’ai mis sur le marché mon premier CD en 2012, intitulé « Amahvus n’tayri » (Le prisonnier de l’amour). Toutes les chansons de ce produit traitent de l’amour, parfois des frustrations, des joies, des tabous et parfois des regrets. D’ailleurs, il m’a quelque peu encouragé à aller de l’avant d’autant plus que les paroles et la musique sont les miennes. J’ai eu beaucoup d’encouragements même si j’ai peiné à l’écouler parce qu’il faut que je vous dise que je l’ai édité à mon compte. Cela n’a pas été facile pour sa promotion.
Vous êtes de la génération moderne, mais je crois que vous vous intéressez beaucoup à nos traditions ancestrales. N’est-ce pas ?
On ne doit pas nier d’où on est venus. Certes, la technologie est en plein pied dans notre quotidien, mais il ne faudrait pas oublier notre terroir, nos traditions, la vie de nos aînés. Dans le deuxième album paru en 2015, j’ai beaucoup évoqué la vie à l’ancienne dans par exemple la chanson « Anughal amezikini ». Là je veux passer un message: la modernité est une bonne chose. Cependant, on ne doit pas oublier nos traditions et nos coutumes. Elles représentent le ciment de notre culture et de notre existence. Ce CD de 9 chansons a eu aussi son succès. Mes fans le recommandent toujours. Vraiment, cela m’a beaucoup plu surtout quand certains me disent qu’en l’écoutant, je leur fais vivre des moments seulement entendus vaguement par-ci par-là.
Vous êtes à votre troisième album. Est-ce qu’on peut dire que vous avez changé de vision et la manière de choisir vos thèmes ?
Absolument pas. C’est la continuité dans mes chansons. C’est ce qui sort de mes tripes. Je ne vois pas comment changer parce que c’est moi même. Dans ce produit, déjà sur les étals, il y a six chansons: Aya Nekini, Sin waguren, Niya miya, Ayen aka, Akim anahkou et El vavor. Ce sont des thèmes sociaux mais pleins de beaucoup d’amour. Ils reflètent le quotidien de nos jeunes. D’ailleurs, celui édité au compte de l’éditeur était un franc succès. Il m’a permis de le présenter ainsi que les autres bien-sûr dans des émissions télé (TV4), à la chaîne II de la radio nationale et dans des galas.
Tout le monde dit que les éditeurs ne s’intéressent pas aux nouveaux produits, mais beaucoup plus à l’argent. Est-ce vrai ?
C’est la règle. Si vous n’avez pas de nom, les éditeurs ne s’empressent pas à éditer vos produits. Et s’ils le font, vous le faites à votre compte. Cela est un facteur décourageant parce que les jeunes n’ont pas de quoi régler la facture. Dans la plupart des cas, ils abandonnent. Il faudrait revoir aussi ce domaine qui a besoin de tant de professionnalisme. Pour ma part, dès que les deux premiers produits ont bien marché, celui qui m’a édité mon troisième l’a admis si vite.
Vous avez consacré un hommage aux enfants disparus. Pourquoi ?
En effet, cela fait mal au cœur qu’on entend ici et là que des innocents sont enlevés avant d’être atrocement égorgés et parfois mutilés. Pourtant, ils ne sont responsables de rien. L’histoire de la petite Nihal Si Mohand qui a défrayé la chronique tout l’été dernier aussi bien en Kabylie qu’ailleurs, ne m’a pas laissé de marbre. La chanson intitulée «Basta ! Arrêtez de tuer des enfants», je l’ai composé et diffusé gratuitement sur Youtube. Que de tels faits ne se produisent plus. C’est un phénomène qui fait peur à tous les parents. D’ailleurs, aujourd’hui, il faut voir à la sortie des classes, combien de parents sont à l’attente de leur progéniture devant les établissements scolaires, notamment du primaire et du moyen. Cette chanson a été vue depuis son lancement en septembre dernier plus de 4 400 fois sur ce réseau. Je crois qu’elle aura l’impact tant souhaité.
Un autre produit pour 2017…
Eh bien, je vous l’annonce en exclusivité: le quatrième album de Nacer Khelif est en voie de finalisation. Tout est prêt. Dans quelques jours, je serai au studio pour commencer. Et j’espère que pour une autre fois je serai à la hauteur et je comblerai mes fans qui m’attendent toujours. Il y aura, peut-être, pour la première fois, une reprise mais ce sera une surprise.
On vous laisse le soin de conclure…
Tout d’abord, merci à votre journal qui ouvre ses colonnes aux étoiles montantes. Je crois que c’est la meilleure façon d’encourager ces jeunes qui choisissent cette voie. Je tiens à remercier tous mes amis qui m’encouragent, le groupe avec qui je travaille, notamment le percussionniste Arezki Amitouche, sans diminuer de valeur pour les autres.
Entretien réalisé par Amar Ouramdane