S’il existe un problème auquel bon nombre de municipalités de la wilaya de Béjaïa sont confrontées sans vraiment arriver à y remédier, c’est bel et bien la gestion des déchets ménagers.
Leur gestion se pose avec autant d’acuité, et ce, dans la mesure où,; pratiquement, dans toutes les localités, la défaillance prend les mêmes proportions. Tout compte fait, des différents règlements adoptés et mis en œuvre par les autorités, la gestion des déchets urbains demeure l’une des problématiques les plus cruciales, sinon du moins les plus posées par une population de plus en plus sensible à la donne environnementale. À Béjaïa ville comme ailleurs, le cadre de vie du citoyen est loin de conférer l’aisance requise. La malpropreté, les amas d’ordures ménagères et les décharges sauvages continuent à faire office de décor. Sacs éventrés et encombrants déposés sauvagement ici et là font que cette situation qui devient trop banale aux quatre coins de la wilaya de Bgayet exaspère les riverains à plus d’un titre. L’invasion des ordures n’a épargné ni villages ni cités urbaines, emboitant ainsi le pas aux écrins de verdures et aux plantes aux mille et une odeurs. De véritables fléaux qui pourrissent sur les voies, les trottoirs et les bords de routes. La question se pose avec acuité, quand on sait que la gestion de ce volet requiert bien le civisme du citoyen autant que les moyens techniques déployés. Une question lancinante, d’autant plus que la balle est souvent interjetée entre les différentes parties concernées par ce qui, d’emblée, s’apparente à un drame écologique. L’intérêt accordé à l’entretien de l’environnement, notamment immédiat, avait du moins depuis quelques années évolué, mais le résultat semble attendre encore pour quelque temps. La vision globale s’étant pratiquement métamorphosée à telle enseigne où l’on a même tendance à faire de ce volet un cheval de bataille de certains responsables, désormais convaincus du bien-fondé de «la revendication verte». Le nouveau wali (déjà parti ou congédié ?) compte (du moins comptait) secouer le cocotier et s’attaquer d’une main ferme à la mauvaise gestion des déchets.
Il y a prise de conscience mais…
Le développement local, accusant des failles parfois insurmontables, constitue ainsi le talon d’Achille de la nouvelle stratégie des pouvoirs publics. La collecte des déchets ménagers au niveau des zones habitées demeure à son état embryonnaire. En effet, l’on sait que la plupart des zones éparses ne connaissent point d’éboueurs. Les dépotoirs individuels font, par là figure de décor. La prolifération des dépotoirs sauvages, souvent dans la proximité immédiate des habitations et la pratique généralisée de l’incinération anarchique des déchets, deviennent de plus en plus inquiétants. Cela pose donc un véritable problème pour la santé publique pour lequel les spécialistes ne manquent pas de s’alarmer : pollution des nappes phréatiques, incendies, menaces pour la biodiversité, nuisances pour les riverains. Les problèmes causés par les décharges sont légion, ce qui a poussé les habitants à sortir de leurs gonds à moult reprises pour interpeller les autorités locales sur le danger qu’elles représentent. Les citoyens se doivent de se rendre à l’évidence que ces décharges constituent un danger et pour leur santé et pour l’environnement. Dans l’immense territoire de la wilaya de Bgayet, le visiteur qui est appelé à se rendre à cette région est souvent happé par la prolifération des décharges. Nul besoin de se triturer les méninges ou user de GPS, les décharges publiques font office de panonceaux indiquant l’entrée ou la sortie de la ville. L’exemple le plus édifiant est celui de la ville de Sidi-Aich. La sortie est de la ville a pris ces dernières années des allures de cloaque, emmurée de telle sorte à voiler les tonnes de déchets amoncelées dans une indicible horreur. Le hic est que les usagers sont d’emblée interpellés par l’immense fumée noire qui couvre cette zone dégageant ainsi des odeurs nauséabondes. Les automobilistes sont ainsi contraints de hisser les vitres de leurs véhicules le temps de déguerpir loin de ce lieu de désolation. Cette décharge publique a élu domicile dans un petit écrin de verdure, enserré entre l’Oued Soummam et la RN26. Le lit de cette rivière est devenu un véritable réceptacle de toutes sortes de déchets. Pourtant, l’environnement a toujours posé un grand problème dans cette wilaya où la pollution, sous toutes ses formes, est omniprésente au quotidien. Une situation qui porte un sérieux préjudice à l’environnement et empoisonne la vie des citoyens. Ces dépotoirs dénaturent le paysage et d’où se dégage une odeur nauséabonde qui incommode dangereusement les habitants et exposent les citoyens aux inévitables contaminations de maladies, telles les zoonoses engendrées par des animaux et chiens errants rôdant à proximité de ces décharges. Dans la galaxie d’acteurs impliqués (élus, administrations, société civile…), les responsabilités se perdent et les informations s’empilent dans les rubriques faits-divers pour être recyclées d’année en année sans que les causes ne soient mises en lumière. Pour aller au fond du problème, une véritable révolution doit être menée par les pouvoirs publics pour ouvrir le dossier des décharges publiques sans pincer le nez aux citoyens. La prise de conscience, plus ou moins collective, à propos des questions environnementales, ne manquera pas de contribuer dans l’accélération du processus de prise en compte de la donne écologique, par les pouvoirs publics d’abord et ensuite par le citoyen lambda.
Tous responsables !
Le débat enclenché, souvent par presse interposée, n’a, par ailleurs, pas manqué de susciter de la réprobation à tous les niveaux. À qui donc incombe la responsabilité du désastre écologique qui menace nos villes et villages ? Sans doute à tous en premier le citoyen qui en est à l’origine. Ceci dit la question requiert autant de pertinence, surtout que la balle se trouve, malheureusement, interjetée entre les différents organismes chargés du secteur. Ni les services des APC initialement chargés de la collecte, et ni encore moins ceux de la direction de l’environnement de la wilaya, ne se sentent totalement responsables de la dégradation patente qui menace l’environnement. Manifestement, le manque de moyens humains et matériels adéquats semble bien, de premier abord, justifier une partie du manque constaté en la matière, mais les faits sont là pour démontrer un laxisme certain dans une gestion donnée inexorablement pour anachronique. La multitude des décharges sauvages et autres dépotoirs à ciel ouvert continue à empoisonner le quotidien du citoyen. Un fait accompli qui n’en trouve aucune justification. En effet, les statistiques établies par le passé par les services de la wilaya de Bgayet illustrent bien l’ampleur du désastre. Cette wilaya, avec ses 52 municipalités, produit une quantité de déchets ménagers qui dépasse tout entendement. Une quantité déjà énorme à laquelle s’ajoutent les autres catégories de déchets non biodégradables générés par les activités industrielles, commerciales et de construction. Le même constat de l’absence de contrôle s’applique, bien sûr, tout autant aux décharges sauvages qu’à celles qui sont érigées en tant que telles. Pour ces dernières, appelées communément décharges communales, le constat demeure pour la plupart déplorable. Ces endroits demeurent pour ainsi dire, à l’état rudimentaire, sans aucun contrôle et loin du respect des normes techniques en la matière. Celles de Sidi-Aich et de Biziou illustrent parfaitement la catastrophe écologique qui se trame au su et au vu de tout le monde.
Et le respect de la législation ?
La surveillance des entrées d’ordures, foncièrement exigée, ne fait pas pour autant office de règle au niveau de ces endroits qui deviennent, par la force des choses, de véritables lieux de prédilection des différentes espèces animales qui y élisent domicile. Un autre danger qui guette les populations environnantes. Sur ce registre, les spécialistes en épidémiologie ne cessent de tirer la sonnette d’alarme. Autant dire que c’est là un dérivé néfaste de la mauvaise gestion des déchets ménagers. Les retombées risquent bien de s’avérer graves si on s’en tient aux effets néfastes d’une telle pollution sur la santé des citoyens. Cependant, un autre problème se greffe à celui-là. Il s’agit du non-établissement par plusieurs communes des plans municipaux de gestion des déchets. Pourtant, la législation n’est pas pour autant restée muette sur ce sujet. Une loi relative au contrôle et à la gestion et à l’élimination des déchets avait bel et bien été adoptée et mise en œuvre (du moins officiellement) depuis 2001 (loi n° 01-19 du 12 décembre 2001). Celle-ci porte bien sûr les modalités de gestion allant de la prévention des effets nocifs de ces déchets à leur revalorisation avec notamment la création de CET (centre d’enfouissement technique), et l’organisation de campagnes de sensibilisation comme palliatif à la dégradation sans cesse grandissante, notamment en milieu urbain. La loi en question a, par la suite, donné naissance au Progdem (programme de gestion des déchets ménagers).
Bachir Djaider

