Le cimetière chrétien en dégradation

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Le cimetière catholique de Bordj-Mira, dans la commune de Taskriout, ne semble pas bénéficier d’entretien. En effet, les quatorze tombes qui s’y trouvent sont laissées à l’abandon. Quelques sépultures sont éventrées, pendant que d’autres restent anonymes, car ayant perdu leurs pierres tombales, puisque, les croix qui témoignent des emplacements sont arrachées et jetées par terre. Les ronces, les mauvaises herbes ont pris possession de cet espace d’à peine 800 m2, dans l’indifférence générale. La clôture, qui l’entourait jadis, a vieilli et a cédé en quelques endroits.Les autorités locales ne sont-elle pas au fait de cet état de délabrement avancé ? De même, les citoyens et les associations ne semblent pas, non plus, s’en soucier. Ceux qui sont enterrés dans cet endroit sont tous des missionnaires catholiques. Rappelons qu’avant l’indépendance, les pères blancs exploitaient une ferme à Bordj-mira et après l’indépendance, ils y avaient fondé un centre national d’agronomie, où ils donnaient des cours à des stagiaires et organisaient des stages pratiques à des agriculteurs venant de toute l’Algérie. Ils avaient pris possession de ces lieux vers les années 1870 et ce n’est qu’en 1976, après que l’Algérie ait nationalisé tous les établissements privés, les écoles, les centres de formation professionnelle ou d’action sociale, que cette communauté a été obligée de plier bagage. D’après Achène K., un natif des environs, qui a eu l’occasion de connaitre certains d’entre eux et de travailler dans cette ferme depuis sa tendre enfance, les pères blancs débordaient de bonté et de gentillesse. «Jamais ils n’ont eu de problème avec personne. Tout le monde les aimait bien. Ils ont fait beaucoup de belles choses pour les gens de la région», témoigne-t-il. Il se souvient même de quelques noms : le père Louis Juguet, le père Maurice Dornier arrivé en 1967, le frère Gérard, le frère Michel. Le père Maurice Cuchet est le dernier à être enterré dans ce cimetière ; il décéda en 1972 après s’être noyé sur la plage à Aokas, lors d’une sortie avec les stagiaires du centre. Selon d’autres témoignages, les pères blancs rendaient bien des services aux gens de la région. En plus de donner du travail, ils soignaient gratuitement les hommes, comme les animaux domestiques. Aussi, ils se déplaçaient à pied quand il n’y avait pas d’autres moyens. Ceci dit, ils ne demandaient rien en contrepartie. Au contraire, dit-t-on, ils offraient gratuitement des médicaments et parfois même des denrées alimentaires. Ils respectaient les mœurs et la religion des autochtones et n’essayaient jamais de les convertir. Pour rappel, en Algérie, la présence des Pères Blancs et des Sœurs Blanches était appréciée et respectée par les populations autochtones, car ils respectaient la ligne d’action définie par le créateur de leur institution, le cardinal Lavigerie. Celui-ci interdisait tout endoctrinement catholique et se donnait pour unique but la scolarisation, l’action sociale et les soins médicaux, dans le cadre d’une convivialité fraternelle à l’écoute de l’autre et dans le respect de sa culture et de ses convictions. Plus de quarante ans après leur départ, lesdits religieux demeurent, pour beaucoup, une véritable référence de bonté, d’altruisme et de sacrifice.

Saïd M.

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