C’est déjà la fin !

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Cette année, en l’espace de quelques semaines, la majorité des cueilleurs d’olive ont, déjà plié les gaules et les olives ont subi la force des broyeurs. «Les meules n’ont plus rien à se mettre sous la dent», ironise un propriétaire d’une huilerie à Akfadou. En effet, la cueillette des olives est de tout repos cette année pour les propriétaires d’oliveraies. Et pour cause, à peine commencée, quelques ménages n’ont fait qu’amasser les olives déjà tombées à terre. Les dizaines d’huileries que compte la région de Ath Waghlis ne tournent pas à plein régime. La plupart de ces huileries baisseront rideau dans quelques jours, alors que d’autres l’ont déjà fait. Les oliveraies sont désertes à une période, o&ugrave,; jadis, elles étaient peuplées.«C’est la saison des vaches maigres», lance, dépité, un septuagénaire originaire du village Ayaten. Plusieurs facteurs se sont conjugués pour conduire à cette situation, dont les incendies de forêt et les tempêtes de neige des hivers précédents, la propagation d’une bactérie appelée par les oléiculteurs la «mouche de l’olive» et, plus fort encore, la sécheresse ayant caractérisé l’hiver de l’année dernière. Il est très important de souligner que 90 % des oliviers de la région se caractérisent par un âge très avancé et par l’absence de soins. C’est ce qui explique la faible productivité enregistrée, au moins, durant deux années sur trois. Un simple tour à travers les oliveraies de la région suffit pour constater, avec grande amertume, ce que sont devenus ces arbres ancestraux plantés par nos aïeux. Des arbres à troncs creux, signe de pourrissement avancé, avec des branches au bois sec, d’autres oliviers, ressemblant à des eucalyptus, sont abandonnés, depuis plusieurs années, et envahis par des ronces et des arbustes sauvages. Cette situation catastrophique, plus proche d’un processus accéléré d’extinction des oliveraies, renvoie la véritable image de l’arboriculture dans la région de Kabylie aux prises avec un sous-développement chronique, dont les raisons et les conséquences sont d’autant plus inquiétantes que douteuses. Une véritable catastrophe écologique et économique pour une région qui n’a pas été dotée d’infrastructures économiques ou industrielles capables de lui garantir un minimum de quiétude sociale et de fixer une population qui la fuit. La hausse des prix de l’huile d’olive, aux relents spéculatifs évidents, reste essentiellement motivée par les effets de la baisse de la production. «Le litre de l’huile d’olive se négocie autour de 700 à 800 dinars», avance un paysan de la localité d’El-Flaye. Réputée pour son huile pure et purgative, l’ârch Ath Waghlis subit de plein fouet la déliquescence des milliers d’hectares d’oliveraies qui ne cessent de se rétrécir. Jadis, les oliviers se comptaient par milliers. Auguste Veller, un écrivain français ayant vécu en Algérie dans les années 1880, en qualité d’enseignant dans une école primaire à El Flaye, relatait dans un ouvrage dédié à la région de Sidi-Aïch et ses alentours, un état des lieux tout en mettant en exergue l’attachement de la population locale aux travaux des champs, dont l’entretien de leurs oliviers centenaires. Emblème de fécondité et symbole de fierté, l’olivier a de tout temps constitué une rente vivrière pour le kabyle. Les ménages puisent de cette oléacée tout ce qu’ils en ont besoin. Les avantages tirés sont légion : une huile d’olive à consommer ; et peut même être utilisés comme remède pour certaines maladies vu ses vertus médicinales ; les olives peuvent aussi être conservées en saumure pour une future consommation, et de même, le bois amassé après ébranchage est utilisé pour se réchauffer. Quant au noyau, il peut servir de combustible et s’avère un très bon isolant ayant les mêmes fonctionnalités que le polyester et le liège. La margine est récupérée pour être consommée crue, et c’est un plat prisé des personnes âgées.

Bachir Djaider

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