Très répandu depuis la nuit des temps, le glanage est toujours pratiqué en Kabylie, notamment, au début et à la fin de la campagne de l’olivaison. «Le glanage est une pratique qu’on retrouve, plus, dans d’autres régions, où les récoltes sont importantes, comme les régions viticoles. Si vous passez sur la RN12, du côté de Bordj Menaiel lors des vendanges, vous apercevrez des dizaines de seaux ou de sachets, pleins de raisin, disposés près de la chaussée et proposés à la vente. Chez nous, en revanche, nous n’avons plus que les olives, contrairement à jadis, où nous cultivions des céréales et beaucoup d’autres fruits», tente de nous expliquer Djamel, jeune investisseur qui a acquis une huilerie depuis trois années et qui, depuis doit satisfaire tous les glaneurs, même ceux qui se présentent avec un maigre butin. «Vous savez, je ne peux pas refuser la trituration à un client, surtout aux femmes âgées qui arrivent parfois, avec un sac de trente kilogrammes d’olives, voire moins, car elles ne peuvent plus les triturer à la maison à la manière ancestrale, tant cette dernière demande beaucoup d’efforts. Je suis, donc, obligé de les accueillir comme les autres oléiculteurs, mais sans aller jusqu’à leur demander de payer le service, pour des quantités aussi maigres», confie notre interlocuteur. Attendant patiemment son tour, ami Rabah, habitant non loin de ladite huilerie, dira : «L’année passée, j’avais réussi à ramasser, avec mes jeunes enfants, pas moins de 125 Kg d’olives. De cette récolte, j’avais obtenu 35 litres d’huile, soit un rendement plus qu’excellent avec 28 litres d’huile pour un quintal, alors que, généralement, il est de 22 litres en moyenne», confie ce vieil interlocuteur tout en ajoutant que cette année, il n’a récolté que l’équivalent d’un seul sac de 54 Kg. Un autre client de M’Kira, ayant eu à vivre la même mésaventure, est venu avec cinq sacs, mais appartenant à trois personnes différentes, dont deux vieilles glaneuses qui ne pouvaient faire le déplacement, dira-t-il. Au bout de plus de deux heures d’attente et d’observation des pressoirs, le verdict tombe pour le glaneur de M’Kira qui a enregistré un rendement de moins de 15 litres d’huile pour un quintal d’olives. Quand vint le tour d’Aami Rabah, il a été demandé à l’ouvrier, chargé de l’opération finale de la récupération de l’huile, de placer un bidon gradué pour permettre de suivre le dégoulinement de l’huile. Après un bon moment, le robinet s’est tari alors que le trait indiquant le niveau de l’huile s’est arrêté à la sixième barre. Le sac de 54 kilogrammes n’a donné, en fin de compte, que 6 litres d’huile, soit 12 litres pour un quintal. «Vous avez suivi l’opération du début jusqu’à la fin, c’est pour cela que je refuse de traiter une récolte en l’absence de son propriétaire, car dans des cas pareils, les concernés peuvent me taxer de voleur. Les propriétaires des huileries se plaignent tous de la même chose», déclare le jeune propriétaire. Cependant, et malgré une grande déception, Aami Rabah verse sa quantité d’huile, dans son récipient, tout en rendant grâce à Dieu.
Essaïd Mouas.