Dans cet entretien, le maire FFS d’Idjeur dresse le bilan de son mandat qu’il juge satisfaisant. Il dit d’ailleurs ouvertement son intention de se représenter pour un nouveau mandat.
La Dépêche de Kabylie : Vous êtes à la tête de cette APC depuis décembre 2012. Comment jugez-vous votre bilan ?
M. Belli Azouaou : La localité souffrait d’un grand retard en matière de développement. Nous avons dû parer au plus urgent : défaillance du réseau d’assainissement, édifices publics en décrépitude, même ceux pas encore occupés, toitures des écoles, foyer de jeunes en piteux état et la bibliothèque communale non-inaugurée… Nous avons tout fait pour rattraper le retard. Je dirai que je suis satisfait de ce qu’on a pu réaliser. Mon équipe et moi avons fait en 4 ans et demi ce qui n’a pas été fait en dix ans. Mais malgré tous nos efforts, des villages ne sont toujours pas assainis, tel Ighraïène, et les extensions restent à faire à travers presque tous les autres. J’aurais voulu, avant la fin de mon mandat, concrétiser le projet du lycée de 1 000 places pédagogiques et 300 repas, inscrit en 2015. Malheureusement, la politique d’austérité en a décidé autrement. Nous avons plus de 400 lycéens qui sont confrontés, chaque année, aux affres du transport et aux dangers de la route. Des professeurs du Technicum Frères Hanouti nous ont alertés sur le fait que les élèves arrivent en classe fatigués et somnolents, étant obligés de se lever tôt pour arriver à temps à leurs cours. J’appelle de mes vœux les autorités concernées pour débloquer ce projet dont notre commune a le plus grand besoin. Nous avions aussi programmé des projets productifs, telle une mini-zone d’activité, un marché hebdomadaire… Mais nous n’avons pas pu obtenir le budget nécessaire pour les entamer.
Qu’en est-il justement du secteur de l’éducation ?
Nous avons sept villages doté chacun d’une école primaire avec cantine. Malgré les restrictions budgétaires, nous nous faisons un devoir de les aider en alimentation et en entretien. Nous avons deux CEM, un au chef-lieu et un autre à Tifrith. Pour le secondaire, le projet du lycée tant attendu a été gelé comme je l’ai expliqué.
à propos du CEM sis entre Tifrith et Ighil n’Boukiassa, pour lequel un problème de baptisation a été soulevé. Le cas a-t-il été réglé ?
Le CEM avait été baptisé du nom du Chahid Chikhi Abderrahmane, bien avant mon arrivée. Mais deux mois après mon installation, les citoyens d’Iguersafène ont exprimé leur opposition en fermant la mairie. J’ai essayé de leur expliquer que l’établissement relevait du secteur de l’éducation et que le choix du nom du Chahid n’était pas du ressort de l’APC. J’ai ensuite fait appel aux services concernés par les baptisations et débaptisations, ainsi qu’à la direction des moudjahidine. On a alors décidé de garder le CEM au nom du Chahid Chikhi et de baptiser le lycée du nom d’un Chahid d’Iguersafène.
Les villages de la commune sont distingués en termes de propreté. Mais est-ce qu’il y a une réflexion pour une solution durable aux déchets ménagers ?
La commune d’Idjeur était en 2012 une décharge à ciel ouvert. Dès 2013, nous avons fait du volet environnement une priorité, avant tout autre projet de développement. On a pensé à la réalisation d’une décharge communale et d’un centre de tri juste à côté, mais un village s’y est opposé. Nous avons néanmoins instauré des recommandations pour le respect de la nature que les citoyens ont vite adoptées. En 2014, le village Iguersafène a décroché le premier prix au concours du village le plus propre de la wilaya. L’année passée, le village Bouanane s’est distingué en obtenant la 3e place au même concours. Et pour cette année, nous avons 4 villages qui vont s’y présenter. Toute la commune en est fière. Le plus grand acquis est qu’au jour d’aujourd’hui les enfants de tous les villages d’Idjeur ont compris qu’il est important de s’impliquer dans la protection de l’environnement. Chacun de nos sept villages a sa propre décharge qu’on entretient et qu’on peut qualifier de contrôlée. Bouanane et Iguersafène ont leurs centres de tri qui sont opérationnels, celui de Mehaga est en cours de réalisation. L’APC fait de son mieux pour accompagner les villages avec les moyens nécessaires : Bacs à ordures, grillages, poubelles… Pour le chef-lieu, la mairie a signé une convention avec des jeunes promoteurs qui transportent nos déchets, avec autorisation bien entendu. Nous savons que ce n’est pas une solution durable, mais la direction de l’environnement n’a rien fait pour nous aider. Tout ce qui se fait dans notre commune est financé avec le budget communal destiné aux projets d’amélioration et de développement.
Que dire de la santé à Idjeur et qu’en est-il de l’hôpital de daïra ?
Nous avons été très heureux d’apprendre que l’hôpital de Bouzeguène n’est pas concerné par les restrictions budgétaires. L’Etat nous a également accordé l’ouverture d’une piste qui va directement de notre commune vers Aït Ikhlef. Nous souhaiterions également l’ouverture et la réhabilitation de la RN34. Concernant le secteur de la santé, nous avons six unités de soins, une dans chaque village. Et les habitants de Bouaouane vont à Tifrith Ath Oumalek, tout proche. Il y a un médecin qui travaille une fois par semaine dans chacun de ces dispensaires. Ces derniers sont malheureusement très dégradés, mais nous avons dégagé une enveloppe pour les réaménager. Une polyclinique s’impose. J’ai vu le directeur de la santé pour son inscription, mais ce n’est pas le bon moment.
La commune dispose aussi de grandes potentialités touristiques mais…
Idjeur est située au cœur de l’Akfadou. Elle dispose de belles montagnes et d’un magnifique tissu forestier. Le problème est qu’elle est enclavée, isolée. Il y a la RN34 qui vient de Yakouren et passe par la maison du gouverneur et le poste de commandement historique (PC) au cœur d’Akfadou pour rejoindre la willaya de Béjaïa… Si nous obtenions sa réhabilitation et celles d’autres axes qui nous entourent, nous serions sauvés. J’ai sollicité le directeur des travaux publics de la willaya qui m’a informé que le dossier devait se traiter au niveau du ministère des Travaux publics. L’ouverture de cette route apportera de la lumière sur Idjeur, sur la daïra de Bouzeguène et sur toute la région. La forêt d’Akfadou serait mise en valeur et nous pourrions réaliser des parcs d’attraction pour la promotion du tourisme qui sera plus rentable que le pétrole.
Sinon, des locaux commerciaux, des logements locatifs… non-exploités ?
Comme toutes les communes du pays, nous avons bénéficié de locaux à usage professionnel et artisanal. Nous avons un certain nombre au lieudit Thala Djedid à Tifrith Athoumalek et 46 autres à Mehaga. Ils sont effectivement à l’abandon malgré les affectations. Nous avons donc dégagé une enveloppe de 200 millions de dinars pour leur réhabilitation. On pourra par la suite établir des contrats aux jeunes locataires. Cela absorbera du chômage et constituera des rentes pour la commune. Tout comme les logements de fonction, ces locaux font partie du patrimoine communal qu’on doit mettre au service de toute la population, notamment dans cette période difficile qui exige de nous de récupérer tout argent et de l’investir. Concernant justement les logements, nous avons 50 unités qui sont déjà habitées. En 2015, nous avons décroché un programme avec l’OPGI au lieudit Bouadga. Nous avons pu réaliser 50 unités sur les 93 prévues. Mais aujourd’hui, nous risquons de les perdre, parce que la direction des forêts s’y oppose.
Où en êtes-vous dans la distribution du quota de l’habitat rural ?
Notre commune a bénéficié d’un quota de 160 aides. La liste est prête, mais nous avons un problème : 43 demandeurs avaient avancé dans leurs travaux et les services concernés considèrent leurs cas comme projets achevés et donc non-concernés par ces aides. Je les défendrai jusqu’au bout, parce que je sais qu’il y en a parmi eux qui ont acheté les matériaux de construction à crédit. Le décret exécutif de 2014 dit que la première tranche est à 60% à la présentation du permis de construire, après qu’elle était 40 % en 2013, pour réaliser les fondations, piliers et dalle. Les autorités doivent revoir ces cas.
Si on parlait jeunesse et sport ?
Idjeur a six stades combinés opérationnels. Celui du village Igheraïène est en cours de réalisation. Nous avons quatre aires de jeux et il y a au programme la concrétisation de stades pour Ighil N’Boukiassa, Tifrith et Bouaouane. Le directeur de la jeunesse et des sports nous a promis une mise à niveau d’un stade communal et une levée topographique pour un complexe sportif de proximité au village Mehaga au pied de l’Akfadou. On suit avec attention les déclarations du directeur. On a entendu parler de 10 mises à niveau. Nous souhaitons figurer parmi les chanceux bénéficiaires, car cela va être une bouffée d’oxygène pour nos jeunes talents qui manquent de lieux de divertissement et de loisir. Pour ce qui est de la culture, chaque village a son foyer de jeunes équipé. Nous comptons même les aménager en sono. Il y a des associations, mais elles activent timidement. Nous souhaitons voir plus d’animation artistique et culturelle, afin d’atteindre l’objectif pour lequel ces infrastructures existent. Aussi j’ai envie de mettre l’accent sur un autre chantier que nous avons assuré. C’est que, en 2012, nous avons trouvé les cimetières des 286 chahid que compte la commune en piteux état. Mais nous avons relevé le défi et avons tout fait pour préserver la mémoire de nos martyrs. Nous avons bénéficié d’une enveloppe de 5 millions de DA de l’APW pour l’élargissement de la route qui mène vers le mausolée Sidi M’hend Oumalek, à Tifrith, mais puisque celle-ci a été financée avec les 720 millions dans le cadre des PCD, nous avons donc décidé de réhabiliter tous les cimetières des Chouhada avec les 5 millions de l’APW que nous avons répartis sur les villages. Nous avons aussi deux stèles à Idjeur : Une au chef-lieu et l’autre à Mehaga faite par les villageois. Avant la fin de ce mandat, je souhaite ériger au chef-lieu une plaque commémorative qui réunira les noms de tous les Chouhada.
En parlant de fin de mandat, comptez-vous vous présenter pour un nouveau mandat ?
Comme tout élu, je souhaite continuer. Je suis satisfait de ce que nous avons pu réaliser mon équipe et moi, mais je voudrais encore concrétiser beaucoup de choses. Plusieurs projets programmés, d’intérêt général, demandent plus de temps pour voir le jour. Si les citoyens d’Idjeur jugent que nous avons été efficaces et veulent que nous les représentions encore, oui, je suis disponible et prêt à travailler pour ma région et mon pays.
Entretien réalisé par Fatima Ameziane