«L’héritage d’Aït Ahmed est lourd à porter»

Partager

Membre du présidium du FFS et désigné tête de liste aux prochaines législatives dans la wilaya de Tizi-Ouzou, Dr Baloul revient, dans cet entretien, sur plusieurs points relatifs à sa personne, au parti et au prochain scrutin.

La Dépêche de Kabylie : Première élection sans le leader historique du parti, feu Aït Ahmed, comment vivez-vous le changement?

Dr Aziz Baloul : Oui en effet, c’est la première élection sans notre leader Aït Ahmed, et c’est très difficile pour nous. L’héritage qu’il nous a laissé est très lourd à porter, ce qui nous oblige à redoubler d’efforts, d’attention et de travail pour concrétiser son rêve d’un Etat de droit en Algérie. Nous allons essayer de faire passer notre pays à une deuxième République où le peuple pourra décider de son avenir. Il nous était plus facile de travailler en présence de Si L’Hocine. Il a toujours été notre guide. Il nous manque terriblement notamment dans les prises de décisions importantes. Heureusement, il y a une direction collégiale, qui arrive à prendre des décisions judicieuses en respect de la ligne politique du parti.

L’idée du consensus n’a pas eu l’aval des partis au pouvoir ni de ceux de l’opposition qui ont préféré se regrouper au sein de la ‘’défunte’’ CLTD. Aujourd’hui encore, vous en faites votre cheval de bataille. Comment comptez-vous la faire valoir ?

Le consensus est la manière la moins coûteuse de sortir le pays de la crise. Les revenus pétroliers cesseront tôt ou tard, il faut que ce peuple travaille, mais il faut que ça soit lui qui prenne les décisions et les mette en œuvre. Tous les Algériens, sans exclusion, à travers leurs élus, doivent s’asseoir autour d’une table et discuter de l’avenir du pays.

Mais ce projet n’a justement pas eu une large adhésion…

La CLTD a fait de l’opposition au quatrième mandat son cheval de bataille, le notre c’est l’opposition au système complet, pas à un homme, car les hommes sont interchangeables. Dans ce système, l’homme ne représente pas grand-chose. Le consensus a été rejeté effectivement, car s’ils acceptaient un consensus, ils abandonneraient le pouvoir. Et ils ne sont pas prêts à le faire. Renoncer au pouvoir est un pas qui leur sera très difficile à franchir. Il y a tout de même des nationalistes et des patriotes au sein de ce système qui sont prêts à rendre le pouvoir au peuple. Mais ils ne sont pas nombreux.

Le FFS a connu une crise qui a mené à plusieurs exclusions et démissions. Ne redoutez-vous pas une saignée dans le réservoir électoral du parti ?

Ces gens sont tellement obnubilés par leurs propres personnes qu’ils ne représentent qu’eux-mêmes. Ils passent leurs temps à attaquer le FFS, c’est leur seul programme politique. Ils n’étaient pas beaucoup à être exclus, la plupart sont partis de leur plein gré. Quant aux exclusions, elles ont été faites par une commission de discipline locale ou nationale.

Dr Halet, exclu récemment du parti, a déclaré que sa mise à l’écart a été orchestrée, notamment, pour préparer le terrain à votre candidature. Que répondez-vous à cela ?

L’exclusion du Dr Halet a été orchestrée par lui-même, les raisons n’ont jamais été électoralistes. Ce chapitre est clos pour nous, nous ne reviendrons pas dessus.

Beaucoup insinuent que Dr Baloul a réussi à s’imposer au FFS et à intégrer le présidium, grâce à ses liens familiaux avec feu Aït Ahmed…

Je suis adhérent au FFS depuis sa création, je suis membre du conseil national du parti depuis sa création aussi, sans interruption jusqu’à ce jour. J’ai été président de la commission de discipline du parti pendant des années, ensuite président de la commission des recours, très proche collaborateur de Si L’Hocine, ayant effectué avec lui tous les déplacements à l’étranger et à l’intérieur du pays. Je n’ai aucun lien de parenté avec Si L’Hocine. Certains disent que je suis son neveu, c’est faux. Ils peuvent toujours se renseigner auprès des concernées ou du service d’état civil. Si L’Hocine avait juste préféré un directoire de confiance.

Le FFS ne cesse de se revendiquer comme un parti national et non kabyle.Certains parlent carrément d’un complexe que vous auriez développé…

Il faut faire une distinction entre le fief, le bastion historique et l’implantation du parti et les idées qu’il porte. Le FFS a été créé en 1963 à Tizi-Ouzou, en Kabylie, il a été porté par des kabyles, mais son ambition et son message sont nationaux, pour une Algérie unie et indivisible. C’est ce qu’explique le discours que nous véhiculons. Ce n’est pas un complexe. C’est expliquer que tout ce qui doit se faire doit l’être en Algérie, pas seulement en Kabylie.

Karim Tabou, ex-premier secrétaire du parti, a accusé le FFS sur un plateau de télé d’avoir accepté les faveurs du pouvoir à travers des quotas. Il a parlé de 10 sièges offerts au parti, à Bordj Bou Arreridj, Constantine et Bouira.

Un commentaire ?

C’est une personne indigne. S’il est convaincu qu’il y a eu des quotas, comment a-t-il pu accepter d’être dans les quotas. Le FFS ne s’est jamais impliqué dans ces histoires de Quotas.

En 2012, le FFS avait eu 7 sièges à Tizi-Ouzou, aujourd’hui les données ont changé. Comment comptez-vous faire pour préserver ce résultat ? Considérez-vous que descendre en dessous de ce chiffre serait un échec pour le parti ?

Nous faisons des campagnes de proximité, nous essayons de convaincre. La dépolitisation de la société entraîne l’abstention. Et celle-ci sera en faveur des partis du pouvoir, car eu leur électorat-clientèle existe, il est là prêt à voter. L’abstention travaille contre nous, contre les partis démocratiques. Donc, notre rôle est d’expliquer aux gens que l’importance est de voter. Maintenant, si nous obtenons moins que la dernière fois, nouds ferons mieux la prochaine fois.

Quels sont vos objectifs pour ces législatives ?

Nous allons être à l’écoute des citoyens, nous allons transmettre les demandes et doléances des citoyens de Tizi-Ouzou aux décideurs du système. On n’est pas un parti de pouvoir, nous ne voulons pas promettre à la population des choses que nous ne pourrons pas réaliser. L’éthique en politique est très importante. Si nous ne parvenons pas à mettre de l’éthique dans la politique, il n’y aura plus jamais de politique.

Laskri a accusé, dernièrement sur un plateau télévision, Saïd Sadi de trahison. Vous partagez ces propos ?

Le FFS ne cultive de haine envers personne, il est dans une démarche de consensus national. Je ne veux pas m’opposer au RCD, c’est un parti qui fait son chemin. Mais l’Histoire retiendra tout ce qui a été fait depuis l’ouverture démocratique. Les trahisons se sont succédé aussi au FFS, à chaque étape il y a eu des trahisons, ce ne seront pas les dernières. C’est le lot de tous les partis politiques

Un dernier mot…

Ce que je demande aux citoyens c’est de prendre conscience que le pays est menacé par l’archaïsme et les puissances de l’argent et que nous risquons à terme de nous entredéchirer. Et le FFS ne veut pas qu’on en arrive là. Il faut faire attention, la Libye est juste à côté, la Tunisie, l’Egypte et le Mali aussi. Il faut faire très attention. Les apprentis-sorciers, qui veulent nous emmener dans une impasse, ont déjà assuré leurs arrières ailleurs. Nous, nous n’avons qu’un seul pays, nous n’avons pas de pays de rechange.

Entretien réalisé par Kamela Haddoum

Partager