Le patrimoine culturel, historique et archéologique de Béjaïa ne cesse d’être un sujet d’intérêt et de discorde entre différents acteurs de la société au niveau local.
L’association pour la protection du patrimoine de Béjaïa vient de tirer la sonnette d’alarme quant à un cas de supposée atteinte au patrimoine archéologique de la ville de Béjaïa. C’est ainsi que ces derniers jours, il aurait été découvert un puits au niveau du Bois des Oliviers, sur un site de construction d’un édifice destiné à devenir un hôtel. Les entrepreneurs auraient découvert un puits inconnu et jamais exploré, donc pas encore répertorié par les services habilités à le faire. Et faisant fi de la loi et de la réglementation, cette découverte n’aurait jamais été signalée. L’association de la protection du patrimoine, une fois l’information reçue, a immédiatement alerté les autorités et une équipe d’archéologues de la Direction de la culture de la wilaya a été dépêchée sur place, pour confirmer les faits et prendre les mesures qui s’imposent dans ce cas. Ce qui a été fait, selon nos sources. Mais ladite association ne s’est pas contentée d’alerter les autorités. Elle aurait même déposé plainte auprès du procureur de la République et exige que des mesures concrètes soient prises pour arrêter les travaux sur le site, jusqu’à ce que les experts se prononcent sur ce cas. Pourtant, l’entrepreneur a bel et bien reçu un permis de construire en bonne et due forme. Mais depuis un certain temps, le chantier a été abandonné et l’APC aurait confié les travaux à une autre entreprise. Et c’est donc cette entreprise, elle-même, qui aurait fait cette découverte, sans la signaler. Dans un appel à un rassemblement sur le lieu même du site, aujourd’hui (dimanche) à 10H, ladite association a rendu public un communiqué dans lequel elle donne des détails. Selon elle, «l’entreprise EURL SHIFABE a procédé à des terrassements de grande envergure, détruisant ainsi des vestiges enfouis au sous-sol qui n’ont jamais été déclarés et ceci en infraction à l’article 94 de la loi 98-04, relative à la protection du patrimoine culturel qui stipule que la non déclaration des découvertes fortuites est un délit puni par la loi». Et d’ajouter : «Cette entreprise a procédé à la démolition et l’enfouissement d’un puits ancestral sans donner l’occasion aux archéologues de déterminer sa valeur archéologique. Les travaux de terrassement ont provoqué l’effondrement du mur de clôture du lycée des Oliviers, construit à l’époque coloniale. S’agissant de gravats, tout a été évacué afin d’effacer toute trace de matériaux susceptibles de prouver l’existence de vestiges archéologiques». Accusation grave, si elle venait à être confirmée, elle soumettrait les auteurs de cette infraction à la rigueur de la loi. En accordant le permis de construire, l’APC savait-elle qu’il y avait ce genre de risque ? La réglementation ne l’obligerait-elle pas à vérifier la nature des terrains avant d’accorder ces permis ? Mais selon nos informations, ledit permis aurait été délivré avant l’entrée en vigueur du plan de sauvegarde de l’ancienne ville de Béjaïa. Ce ne serait, donc, pas à ce niveau que se situerait le problème, mais bien dans celui de la conscience des constructeurs qui se sont permis de détruire des vestiges archéologiques sans en avoir auparavant avisé les autorités concernées, comme le stipule la loi de 1998. Le sit-in auquel appelle l’association de sauvegarde du patrimoine ne servirait donc pas à «forcer» les autorités à agir, puisque les mesures nécessaires ont déjà été prises. Par contre, elle contribuera certainement à la prise de conscience de la population dans son ensemble concernant la nécessité de faire attention aux découvertes et de les signaler.
N. Si Yani
